Métailié Noir, 238 pages.
Fils d’un couple divorcé, Jorge a longtemps vécu loin de son père, instable, alcoolique, parfois violent.
A 14 ans, Carmen, sa mère , accepte de le laisser partir randonner en montagne pendant trois jours avec Carlos son père. Elle se reproche d’avoir trop séparé le père et le fils.
Entre Jorge et Carlos, ça commence mal. L’adolescent est effrayé des manières brusques de son père, et Carlos voudrait prouver à son fils qu’il l’aime, et le lui répète, mais il est maladroit, éprouve des sentiments contradictoires à son endroit, boit trop, et fait preuve d’une certaine immaturité alors même qu’il voudrait faire de son fils un homme !
Avant de partir il a remis à Carmen un roman qu’il vient d’écrire : c’est un roman noir, écrit en langage cru : quatre bandits séquestrent une riche héritière, certains la droguent, d’autres la violent, et tous quatre se tarabustent ; il s’agit de récupérer une rançon …
Carmen lit et s’inquiète de la violence du roman, même si c'est le genre qui veut ça. Carlos veut-il lui faire peur ? Y-a-t-il un message dissimulé entre les lignes ? Elle évoque son passé avec Carlos : elle, venant de la bourgeoisie aisée, et Carlos d’un milieu défavorisé, ils ne se sont jamais bien entendus. Carlos s’est senti humilié ; il faisait des efforts pour se cultiver, se polir, est devenu enseignant, a écrit un recueil de poèmes puis ce roman, mais rien de tout cela ne fut bien constructif.
Nous avons trois fils de narration : le roman, imité de J.H. Chase pour le contenu: Carlos y dévoile beaucoup de ses contradictions, à travers une histoire banale que Carmen trouve ennuyeuse à lire (nous aussi , un peu).
Le récit de Carmen, angoissée pour son fils, obsédée par le roman de Carlos, insatisfaite aussi de son existence : elle a pour amant son patron d’éditeur, et il la traite comme une pute.
Enfin l’excursion dans la montagne ; loin de rapprocher le père et le fils, elle s’avère bien sombre ; les conditions météorologiques ne sont pas de la partie ; en outre Carlos mène son fils à un refuge où se trouve sa nouvelle compagne…
Nous avons un « roman dans le roman » soit une mise en abîme, l’auteur en profite pour livrer des considérations sur le pouvoir de l’auteur, celui du lecteur (considérés comme deux adversaires) ; certaines remarques sont intéressantes, la plupart, on les a lus mille fois. La virée dans la montagne est bien conduite et distille un suspens valable. Enfin le personnage de Carlos est fouillé, intéressant. Les deux autres (Carmen et Jorge) ne sont qu’esquissés, c’est dommage.
L’ensemble est néanmoins plutôt bon et donne envie de relire l’auteur.