Sabine Wespieser, 249 pages.
Franz Huchel, 17 ans, quitte la province un endroit de hautes montagnes auprès d’un lac, l’Attersee, car l’ami de sa mère, qui les entretenaient tous les deux se noie dans ce beau et traître lac.
Franz va travailler à Vienne comme apprenti chez un ami de sa mère, le buraliste Otto Tresniek. Otto a perdu une jambe pendant la Grande Guerre, il vend toutes sortes de périodiques, ainsi que des cigarettes et des cigares de luxe, notamment les Hoyo de San Juan qui vont jouer un rôle dans cette affaire.
Nous sommes en 1937, à l’automne, et pendant que Franz se met à lire les journaux et se forme une conscience politique proche de celle de son patron, la peste brune progresse rapidement. Les juifs commencent à être sérieusement maltraités.
De temps à autre, un vieux monsieur vient acheter des cigares dans la boutique ; Otto Tresniek se sent honoré de cette fugace présence : c’est le professeur Freud « le docteur des fous « . La Bergasse se trouve à quelques rues de là. Curieux, Franz suit le professeur et lui adresse la parole : il voudrait lire tous ses livres ! Comment, s’étonne le professeur, n’as tu rien de mieux à faire que de lire les gros bouquins poussiéreux d’un vieux monsieur ? … tu es jeune, va prendre l’air, promène-toi, trouve-toi une fille...
C’est un roman d’apprentissage agréable à lire, aux descriptions soignées, parfois originales, qui permettent de visualiser rapidement les gens et les situations. Les oiseaux jouent un grand rôle. Des pigeons, des petits oiseaux un peu bizarres « qui amènent la peste ».
Les dialogues courts et amusants jurent avec la situation critique.
La rencontre de Franz et de Freud qui se prolonge en rendez-vous sur un banc est-elle vraisemblable ? Comment expliquer que ce très jeune homme soit d’emblée si attiré par un vieux monsieur « qui soigne les fous » alors que Franz se sent plutôt sain d’esprit ? Même si la suite montre qu’il ne l’est pas tant que cela ! Franz a beau être un jeune homme de la campagne, difficile de croire qu’il soit si naïf ; son comportement est plutôt suicidaire, à moins qu’il ne mésestime gravement l’ennemi.
Pas sûr non plus que les échanges eussent été d’emblée aussi décontractés entre Franz et ses interlocuteurs.
Les portraits de femmes sont très traditionnels : la mère aimante et qui sait conserver sa dignité, la pute sans foi ni loi, la vieille fille attachée à son père…ces portraits sont néanmoins tracés d’une plume délicate.
Mettre en scène un personnage illustre tel que Freud, n’est pas chose facile ! A sa place, je ne l'aurais pas nommé.Le jeune auteur a de l’ambition, il ne se refuse rien… de ce roman je retiendrais surtout les descriptions, et certains dialogues piquants.
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