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15 février 2017 3 15 /02 /février /2017 12:06

Actes sud 550 pages

La préface de l’auteur nous apprend qu'elle fait partie de la génération Gorbatchev ; elle est née en 1948.

« Il nous a été plus facile d’accepter l’effondrement de l’idée communiste parce que nous n’avons pas vécu en un temps où cette idée était jeune et forte, auréolée de la magie pas encore dissipée d’un romantisme désastreux et d’espoirs utopiques. Nous avons grandi sous le règne des vieillards du Kremlin »

« Je pose des questions non sur le socialisme mais sur l’amour la jalousie l’enfance la vieillesse… sur les détails d’une vie qui a disparu… l’histoire ne s’intéresse qu’aux faits, les émotions, elles restent toujours en marge… je regarde le monde avec les yeux d’une littéraire et non d’une historienne. «

 

L’auteur a collecté une masse de témoignages de gens de tous âges et de conditions diverses pour parler de leur vie : cela commence par des « propos dans les cuisines « une dizaine de personnes parlent, anonymes, et se répondent : on est un peu perdu !

Même si elle a fait un résumé des principaux faits en URSS et après sa chute, débutant à la mort de Staline ( 5/03/1953) jusqu’en 2012, c’est parfois difficile de remettre les propos des personnes interviewées dans leur contexte politique exact.

Plus éclairant sont les témoignages de deux femmes de même âges ( 49 ans au moment de l’interview c'est-à-dire aujourd’hui sans doute quelques années de plus) ; elles se connaissent et ne sont pas ennemies mais vont donner des avis diamétralement opposés sur la Pérestroïka qu’elles ont connue toutes deux dans leur jeunesse et de près car elles occupaient des fonctions importantes à Moscou.

L’une regrette l’Urss pourvoyeuse d’idéaux, l’autre apprécie ce que Gorbatchev et son équipe a fait naître en dépit des privations et du chaos favorisant la corruption dans les années 90 ; l’époque était difficile : on vivait mal. On attendait autre chose ; chacune réagit suivant ses attentes. D’autres témoignages sur cette époques font apparaître des destins différents même si l’on retrouve des schémas identiques : le putsch de 1991, les prises de positions diverses, la peur ou l’excitation, la crise financière des années 90, chômage et inflation monstre, fut un drame pour certains, cette jeune femme et sa mère ne pouvant même pas faire enterrer la grand-mère, obligées de garder le cadavre, puis livrées aux aléas d’une bande de voleurs qui les sauve puis les jette à la rue… d’autres familles ont souffert de malnutrition, mais n’ont pas connu un sort aussi horrible.

Mais on lira aussi des vies de personnes plus âgées qui ont connu l’époque stalinienne, la seconde guerre mondiale, le Goulag, l’Afghanistan, et qui sont nostalgique de cette époque. Le « capitalisme » a tout détruit selon eux. Toutes les valeurs auxquelles ils croyaient…vivant misérablement, persécutés, parfois dénoncés par leurs voisins, ils n’en regrettent pas moins cette époque…

 

Tous les récits sont éprouvants, mais certains sont de terribles drames. Notamment le récit de cette femme arménienne vivant en Azerbaïdjan , puis devant s’enfuir en Russie, où elle ne sera jamais acceptée de toute façon.

L’auteur a présenté les témoignages de telle sorte que deux personnes de même âge ayant vécu à la même époque puissent livrer des ressentis différents, voire opposés.

Les récits prennent la forme du monologue, bien que celui ou celle qui s’exprime s’adresse à l’auteur. Les récits de vie sont sans doute remaniés mais l’oralité en est préservée, l’émotion, l’impression d’un jaillissement de la parole, les répétitions, tout ce qui laisse penser à une parole authentique, et favorise l’empathie. Les récits, de ce fait, sont souvent très longs, parfois logorrhéiques, pas toujours faciles à endurer jusqu’au bout.

  1. faisant pénétrer dans le quotidien de familles ordinaires, on partage la vie des gens, ce que des essais et des livres d’histoire ne sauraient faire. A travers ces témoignages forcément subjectifs, on apprend beaucoup.

C’est un livre à acheter, et à lire par petites tranches. Avant de le lire, il faut s'être bien informé de chaque tranche d'histoire de l'Urss à la Russie de nos jours( sans compter les pays qui s' sont plus ou moins séparé ) de façon à bien remettre en contexte tous les propos recueillis. 

 

 

 

 

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commentaires

D
Bonjour Dominique, j'ai ce livre qui m'attend dans ma PAL, j'espère le lire un jour et mais donc en m'informant sur l'histoire de l'ex-URSS. J'ai noté
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K
Oui, il faut s'y lancer, c'est prévu un jour (elle n'a pas eu le Nobel?)
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Svetlana Alexiévitch a obtenu le Nobel de 2016 en effet. Il y a longtemps que je voulais me plonger dans un de ses livres-témoignages.
A
Une période méconnue car négligée par l'histoire!
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On peut dire que l'Histoire a été impitoyable avec ces populations! Que de souffrances...

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