Gallimard, 2017, 480 pages.
Après un prologue qui nous propulse de nos jours, et nous montrent Lila et Lenu sexagénaires, et toujours en train de se quereller, retour à la fin des années 60.
Lila et Lenu ont 24 ans, et l’on aborde la période troublée de 1968 ; Lila a quitté son mari Stefano et vit avec Enzo, sans relations sexuelles. ils élèvent le fils qu’elle croit avoir eu avec Nino : A mesure qu’il grandit, elle le trouve ressemblant à Stefano!
Ayant quitté la relative aisance matérielle de sa première union, elle se fait embaucher dans une usine de salaison dirigée par un ancien copain de leur quartier .C’est un petit patron mais despote et exploitant au maximum les ouvriers ; en acceptant de venir témoigner contre les conditions insupportables de la vie en usine, Lila se met en danger, et déclenche une série de mouvements violents de révoltes, auxquels participent Pasquale Peluso et Nadia la fille de l'enseignante, tout deux engagés dans les luttes sociales. Lila leur reproche de ne pas se mouiller ( et ils se souviendront de la leçon…) .
Prise entre les fascistes, dont font partie la famille Solara et le fils du pharmacien, les ouvriers (les uns prêts à la révolte, les autres soumis ne voulant pas d’histoires), et les communistes qui veulent aider et finissent par faire davantage que rédiger des tracts, Lila finit par se terrer chez elle en proie à des troubles psychosomatiques, et elle appelle Lenu à son secours.
Mais Lenuccia sera mal récompensée de ses bons services : là-bas au quartier tout le monde l’admire d’avoir réussi et la rejette aussi bien. Et Lila fait de même.
La suite, c’est le mariage et la vie conjugale de Lenuccia : son mari est vraiment quelqu’un de bien (elle a échappé aux crétins frustes et souvent violents de son quartier) mais bien de choses, pourtant , les séparent...
Un tome 3 qui est un peu long. Comme dans le précédent, ce sont les histoires d’amour qui traînent en longueur, irritent par des répétitions de phrases et de situations trop convenues. Les rencontres de Lenu avec des féministes, sont bien de ce temps ; leurs idées ont vieilli mais portent en germe les revendications actuelles.
L’aspect roman de mœurs est bien vu. Ce que j’ai préféré dans cet opus c’est le parcours de Lila qui m’a semblé plus original que celui de son amie.
On admire la façon dont les deux filles se tirent d’affaire, celle qui ne réussit pas à quitter le quartier et celle qui est partie. L’une comme l’autre ont un caractère bien trempé et savent lutter contre l'adversité. le quartier de leur enfance est à la fois une communauté qui les a façonnées, et un piège qui se referme sur elles. Lorsqu’elle y retourne, Lenu est à la fois maltraitée, et bien reçue.
Dans ce récit, il est souvent fait allusion au dialecte du quartier de Naples dont elles sont originaire; de la façon, dont elles en jouent, tantôt le reparlant ( exprès ou inopportunément) tantôt l'abandonnant pour l'italien correct. Mais en français, ce dialecte n'est pas rendu : il se limite à quelques onomatopées , tournures simplifiées, et l'ambiance de cet autre langage nous manque.
Tome 4 L'Enfant perdue ***+
Gallimard, 2014, 550 pages
Retour sur le fantasme de la poupée. ( tome 1 et roman « Poupée volée » dont la narratrice devrait être Elena, mais pourrait aussi être Lila…)
Comment les deux « amies « souvent ennemies traversent la fin des années 70, et les trois décennies qui suivirent. Le quartier difficile, dangereux, et propice aux règlements de comptes, que Lila n’a pas voulu( n’a pas pu) quitter, et que Lenuccia reviendra habiter avec elle, un bon paquet d’années .
Nul n’en sortira indemne…
J'ai peu à dire sur ce quatrième tome. On sait déjà dès le début du 1 que Lila disparaît ; dans ce dernier opus on en apprend davantage sur ses raisons de "disparaître". Un constat amer et l'évidence que lorsqu'on veut bousculer les habitudes de l'endroit et de la fratrie où l'on est né et en dénoncer les corruptions, on le paie...