Edwin Topliss a écrit vingt huit romans pornos en presque dix jours chacun, depuis qu’il est nègre pour le compte de son ancien ami d’université, Rod, lequel emploie pas mal de nègres sous-payés pour écrire sous son pseudo de Dirk Smirff.
Il était livreur de canettes de bière lorsque Rod a fait appel à lui : « Si tu es capable d’écrire une lettre à ton percepteur, tu peux tout aussi bien écrire un roman porno »
Mais ce matin, le 21 novembre 1967, Edwin cale.
On l’avait également prévenu « personne ne peut écrire ce genre de merde ad vitam aeternam »
Alors il s’adresse à lui-même, sombre dans l’autobiographie. Avec son nom, avec un autre nom. Son passé, son quotidien…sa vie de famille médiocre, son mariage forcé avec une jeune femme de passage qu’il avait mise enceinte.
Il se rabâche aussi les quatre schémas d’intrigues passe-partout servant à produire des romans et démarre des « bouts d’essai » en réutilisant des passages d’anciens livres.
Pour se donner de l’inspiration, il saupoudre sa propre vie de conquêtes amoureuses avec détails pornos destinés à se remettre sur les rails.
Quelques jours s’écoulent, voilà qu’il commence un nouveau chapitre affolant.
C’est un roman sur l’impossibilité d’écrire, en même temps que sur le métier d’écrivain. Westlake s’est sûrement inspiré de ses débuts et de ses pannes, lui dont la production est si féconde et l’imagination si abondante.
Ecrire pour s’adresser à quelqu’un. C’est ce dont le narrateur, nègre exploité jusqu’à la corde, devient conscient, alors même qu’il se révèle incapable d’honorer une nouvelle commande. Il prend à partie le lecteur « vous », et finit même par écrire des lettres qui ne seront pas envoyées. Il est saisi de « smith-coronite , espèce de psychose de la machine à écrire ».
Cette histoire désolante est contée avec brio sens du burlesque et de l’humour noir comme Westlake y excelle.