Andy Gillet et Stéphanie de Crayencour | |
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L’Astrée est un gros roman du début du 17eme siècle un roman pastoral, en fait l’un des derniers du genre.
Il met en scène des bergers, ce terme ne désigne pas un métier mais une façon de vivre à la campagne, sans autre occupation que l’amour, chanté, célébré de toute les façons, débattu, mais chaste en principe. Dans le film de Rohmer, c’est loin d’être certain.
Le roman pastoral a quelque rapport avec le roman courtois et l’on se souvient que Rohmer a adapté Perceval dans les années 80.
L’action se situe dans une Gaule imaginaire. Astrée et Céladon sont donc amants.
Astrée a vu son ami flirter avec une autre bergère au bal. Elle le chasse et lui ordonne de ne pas reparaître devant elle. Au désespoir, il se jette dans la rivière, est sauvé et recueilli par des nymphes et un druide. Libéré des assiduités pour lui importunes d’une des nymphes, il prétend cependant ne pouvoir reparaître devant Astrée sans l’accord de celle-ci qu’elle ne saurait lui donner puisqu’elle le croit mort. Après un séjour vagabond en forêt, à chanter son affliction en vers libres, il accepte de se faire passer pour la fille du druide pour entrer en contact avec Astrée.
Le seul extrait du livre que je connaissais est le discours d’Hylas en faveur de l’amour libre. Les enseignants disaient que c’était très moderne pour l’époque ce plaidoyer. Mais pour notre époque qu’en dire ?
Lycidas, le copain de Phillis, amie d’Astrée, défend le point de vue de la fidélité : l'amour est éternel en l'autre on recherche ce qui est en soi ; dans l’amour, deux être ne font plus qu'un.
Hylas, partisan de l'amour libre, réplique au contraire on ne désire que ce qui est hors de soi. Disons : ce que l’on n’a pas ; l’autre que soi.
Pour Lycidas l'autre forme un cercle avec soi. ??
Hylas lui répond si tu te penses semblable à Phillis c’est que tu es une femme.
Lycidas objecte que dans cette fusion amoureuse seules les âmes sont semblables.
Mais ils ont raison tous les deux l’amour est à la fois narcissique et recherche de ce qui nous manque et il s’éteindrait d’être comblé.
Ces débats pour ou contre la fidélité conjugale sont intéressants mais convenus et l’on sait que, de toute manière ni la fusion de deux en un, ni l’inconstance ne donnent de résultats satisfaisants.
Les mises en parallèle du monothéisme et de la fidélité conjugale, que professe le druide un peu plus tard, Rohmer nous les sert depuis toujours. Mais les variations sur ce sujet furent plus piquantes dans des films comme Ma nuit chez Maud.
Ici rien de piquant car tout est donné d’avance et l’on sait pertinemment aussi comment va se terminer le différend amoureux des protagonistes. Absence de suspense et tout le monde est innocent. L’innocence la pureté l’absence de vraies contradictions chez les héros les rend niais. On assiste aussi à une grande quantité de célébrations et de rituels sacrés et champêtres qui finissent par lasser.
Peut-être est-ce tout simplement que l’Astrée, monument que bien des agrégatifs redoutent de trouver au programme, n’est décidément pas recevable pour tous les publics de lecteurs d’aujourd’hui.
Rohmer s’il a eu l’intention de le moderniser on peut ne pas percevoir cette volonté. On a dit que le travestissement de Céladon était une péripétie passionnante.
Mais dans le film cela n’apparaît nullement comme une péripétie. Céladon avait réussi à fréquenter Astrée autrefois en se faisant passer pour sa copine aux yeux des parents. On se doute bien que le recommencent de leur relation va passer par le même biais.
Ses adaptations littéraires sont agréables si l’on aime l’ouvrage en question la marquise d’O. et moins déjà Perceval avec ce choix de faire crucifier le chevalier à la fin. Il faut pourtant reconnaître que cette action avait quelque chose de terrifiant, de la grandeur. L’ensemble très fabriqué mais des passages délicieux comme celui de « la pucelle aux petites manches » avec un André Dussolier génial.
Le langage est pourtant assez agréable, je crois que ce sont les images qui m’ennuient…