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9 août 2006 3 09 /08 /août /2006 10:01

Julio  Cortazar : nouvelles (1945-1982) édition intégrale. Gallimard, 2001 (Du Monde entier).


Le premier recueil de nouvelles de Cortazar s'intitule « L'Autre rive ».

il est basé sur le thème du double. 

Un homme qui vit seul avec ses petites habitudes décide soudain d'aller chez une collègue de travail : il s'y voit, en train de vaquer aux occupations qu'il aurait dû effectuer s'il n'était pas sorti (titre : Lointain miroir).

un comptable qui vit avac sa mère et sa sœur se trompe d'appartement, et rentre chez son voisin de palier. Personne ne s'aperçoit  de la chose sauf lui et il doit s'accoutumer à être le voisin... ce n'est pas trop difficile (Mutation).

Le « Rescapé de la nuit », véritable réussite,  met en scène un individu qui habite avec sa grand-mère et auquel il serait difficile de donner un âge précis. Il pourrait avoir 12 ans ou 40 ans... en tous cas il  se réveille d'un cauchemar : il a rêvé qu'il était mort. Après soulagement vient la nouvelle angoisse : il  se regarde dans la porte vitrée de son armoire qui ne lui renvoie pas son image- mais celle de son cadavre gisant sur le lit.  Il va réveiller sa grand-mère, et sans oser lui parler de ce divorce problématique entre son corps et lui, constate qu'elle l'entend, et même qu'elle peut le toucher. Retourne à sa chambre, tente de réveiller le cadavre, le griffe, puis le caresse et le peigne, lui ferme les yeux, pour qu'il soit présentable pour sa grand-mère. Le matin arrive ; il avait encore rêvé : mais son corps maintenant vivant porte les traces de ce qu'il a fait subir au « cadavre de la nuit » : coiffage, griffure ect...


Le recueil n°2, Bestiaire, introduit l'élément fantastique bien connu de la créature étrange (plus ou moins animale mais avec ce petit supplément qui nous entraîne au-delà  de la  simple animalité) que connaissent les lecteurs de nouvelles plus célèbres tels que «  Axolotls » que Cortazar écrira plus tard.

On s'intéresse ici aux mancuspies, ces bêtes étranges, répugnantes pour le commun des mortels, qu'un groupe d'infortunés compagnons nourrit  dans le but de les vendre. Ces personnes sont hypocondriaques et se soignent avec des substances homéopathiques aux noms latins ( nux vomica, belladona,) qui les rassurent, pour des maux psychosomatiques aux descriptions bizarres, regroupée sous le titre «  céphalée », qui en dépit de cette désignation, sont plus complexes que des maux de tête...

Comme dans la nouvelle "axolotls," les éleveurs de mancuspies, ont bien des points communs avec leurs infortunés  compagnons. Comme eux, ils sont promis à une mort prochaine.


Les personnages aux prises avec  ces créatures étranges ( ou plus ordinaires : il est question d'un tigre dans une autre nouvelle)  sont des exclus . L'animal avec lequel ils ont à en découdre, n'est qu'un symptôme cruel de leur mal de vivre. Ainsi cette nouvelle non moins étrange du jeune homme à qui l'on a prêté un appartement .  Il se plaint à la propriètaire d'être victime  d'une maladie qui consiste à  « vomir des petits lapins »  dont ensuite il ne peut se résoudre à se débarrasser ; la maladie s'est accentuée depuis qu'il vit dans l'appartement de sorte qu'il  ne peut plus continuer à vivre. ( « Dernière lettre à  une amie en voyage »)

«  Quand je sens que je vais vomir un petit lapin, je me mets les doigts dans la bouche, écartés comme une pince, et j'attends de sortir de ma gorge comme une effervescence  de sels de fruits ».

De quoi l'énoncé « vomir un petit lapin » est-il la métaphore, on ne le sait pas franchement, on peut imaginer bien des choses ! A coup sûr, c'est une expérience érotique incomparable à quoi le jeune homme ne saurait renoncer. Par des phrases simples et concrètes, des répétitions, des explications faussement innocentes qui nous entraînent lentement vers la chute finale, l'auteur nous  saisit à ce point que l'on a  presque l'impression physique  de ce dont il  relate l'improbable expérience.


Le troisième recueil «  Les Armes secrètes » est  l'un des plus célèbres.

Le recueil débute par «  Les Lettres de maman » : un couple, Laura et Luis est hanté par le souvenir de Nico, le frère de Luis, premier fiancé  de Laura, que Luis lui a  pris, profitant de circonstances  telles que la timidité de Nico, et sa maladie. Les deux jeunes gens se sont mariés quelques semaines après sa mort dans la réprobation générale et ont fui comme des coupables pour aller vivre à Paris.

Deux ans plus tard, Luis constate que Laura et lui ne parlent jamais de Nico, silence criant  qui favorise la présence écrasante de l'absent .

lAlors la mère de Nico, restée à Buenos Aires, qui leur écrit régulièrement, se met à parler de son fils défunt comme s'il existait encore et annonce sa prochaine visite ...



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