( 2003 édition originale) 2005 pour Flammarion, 120 pages.
Au début du texte, une jeune serveuse de restaurant, Theresa, observe des clients attablés en terrasse, Lil et Roz, deux femmes dans la soixantaine, encore belles, leurs fils, également magnifiques, et leurs petites filles fort mignonnes « Elle avait été amoureuse de Tom, et puis d'Ian, puis de nouveau de Tom pour leur beauté, leur aisance, et quelque chose de plus, un air comblé, comme s'ils avaient baigné toute leur vie dans un plaisir qui s'exprimait à présent sous forme d'ondes invisibles de contentement...Theresa était amoureuse d'eux tous... ce qui emplissait ses yeux de larmes c'était de les voir tous là, de les regarder comme en ce moment... sa vraie passion, c'était eux : la Famille. »
Ce que Theresa, issue d'un milieu modeste, admire naïvement, c'est la beauté de la classe possédante, mais aussi le fait qu'ils soient tous très soudés, complices, fusionnels. Voilà des gens qui n'ont pas quitté l'originelle félicité...
Puis elle déchante, la pauvre Theresa, étant témoin d'une crise, d'un affrontement entre les grand-mères et leurs belles-filles qui viennent reprendre les enfants en brandissant un paquet de lettres coupables : « la lumière se retirait d'eux... », et décide de ne pas se marier, et même d'émigrer en Angleterre !
Suit un long flash-back :
Lil et Roz sont inséparables depuis la petite enfance où à l'école elles se rencontrèrent, vivant dans la même rue, partageant la même vie facile, au bord de la mer, dans un pays au climat clément. Devenues grandes, elles s'arrangèrent pour ne jamais être loin l'une de l'autre, en dépit de carrières différentes. Se marièrent ensemble, eurent un fils à peu près en même temps, des époux qui ne comptaient guère, et dont l'un mourut prématurément tandis que l'autre partit planter ses choux ailleurs. Lorsque leurs fils furent pubères, chacun devint l'amant de l'amie de sa mère...et nul n'en a rien su, jusqu'à l'affrontement d'aujourd'hui.
Cette histoire est contée avec ironie, et rapidité, on a l'impression d'une parodie de conte de fée. Les protagonistes sont parfaits, exagérément beaux, ils ont quelque chose de magique, restent toujours ensemble, sont heureux, et ont, sinon « beaucoup d'enfants », juste assez pour, à chaque génération, reproduire le duo fusionnel : les deux fils sont inséparables, les deux petites filles aussi, qui sont l'incarnation de Lil et Roz maintenant grand-mères. Les personnages « intermédiaires » époux de Lil et Roz et épouses de leurs fils issus de la génération suivante, sont des adjuvants qui leur servent à se reproduire.
Mais tout cela aboutit à un conflit ouvert avec les épouses des garçons devenues des ennemies avec qui il faudra compter, et on ne sait qui va gagner....L'auteur va jusqu'à opposer les belles-filles, petites et brunes, aux autres éléments de cette fratrie in tantinet incestueuse, blonds grands et beaux... !
Le conte de fée qui pourrait mal finir contient peu d'éléments de roman social et psychologique, dont Doris Lessing est ordinairement prodigue, et l'on ne peut le lire qu'au second degré. L'auteur est très ironique à propos de ses héros « des êtres soignés et resplendissants, comme tous ceux qui savent profiter du soleil », ils sont des caricatures d'êtres humains. On assiste à leurs craintes à propos de possible chute, sans rien ressentir, et c'est un peu dommage !
J'avais pris ce livre sur une impulsion, pour me familiariser avec l'état de grand-mère, mais je ne me sens pas trop concernée par ce roman.
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