The House By The River 1949. Fritz Lang.
Fritz Lang utilise pour ses "films noirs" le dispositif habituel du scénario policier ( meurtre, enquête, psychotpathe ou criminel, atmosphère angoissante -au moins au premier degré- onirique parfois, utilisation esthétique du clair-obscur, toujours) non pour simplement mettre en scène une histoire à suspense mais souvent pour montrer les ravages de la culpabilités sur lêtre humain.
Son propos peut avoir une visée sociale et politique( c'est le cas de "Fury" et " L'Invraisemblable vérité" ; ici le but est surtout poétique.
L'inspiration est psychanalytique comme « La Femme au portrait » mais l’esthétique est plus aboutie.
Ouverture: sur le Fleuve qui semble toujours en crue, les flots tourmentés se précipitent vers d’improbables buts. (Long travelling)
Des parties de troncs d’arbres et des branches qui plient résistent au passage des tourbillons, le conflit donne lieu à d’écumeux bouillonnements. Le ciel est lourd de menaces au-dessus de cette agitation, de fortes vagues annoncent un malheur proche, une violence incontrôlée.
Une voix off ( la voisine Miss Ambrose) dit qu’elle déteste ce fleuve.
Ce Styx, enfin, charrie un lourd fardeau impromptu qu’on identifie peu à peu : cadavre de vache.
Stephen Byrne est assis dans un jardin en face du fleuve, à sa table de travail. C’est un romancier, toujours entre guillemets, sans guère d’inspiration. Ressemble à une sorte de dandy boudeur et l’on se demande ce qu’il peut bien faire devant une feuille blanche avec un stylo.
La page se remplit de taches, un scarabée s’y aventure, en arpente lentement la surface.
Emily, la bonne, a dû prendre son bain dans la pièce que Marjorie, l’épouse , utilise habituellement. Elle a utilisé les produits de sa maîtresse, y compris son parfum.
Lorsqu’elle redescend l’escalier dans l’ombre, le romancier l’attend dans l’entrée ; décidé à lui faire des propositions.
On entend des pas et l’on distingue vaguement les marches qui craquent. Puis soudain cela va trio vite pour Stephen-il est saisi de frénésie et la retient fermement d’un baiser. Emily résiste et hurle, la voisine indiscrète est toute proche. Emily ne se tait pas. Stephen, épouvanté joue le rôle qu’on attendait de lui depuis qu’on l’a vu. Son forfait accompli, nous pensons que c’est un pauvre type, jouet des événements, d’un moment d’absence, non pas d’un assassin prémédité.
Voici une haute silhouette chapeautée qui se découpe dans l’embrasure de la porte : John, le frère boiteux, l’aîné de Stephen, qui a tout vu. Comme toujours.
John est la mauvaise conscience de Stephen mais il finit par se ranger aux avis de son cadet et accepte (par peur ? sympathie pour le frère ? ou plutôt pour sa femme ?) de l’aider à mettre le corps dans un sac. Par une nuit noire, puis semi-lunaire, les deux frères envoient un paquet dans le fleuve qui ressemble à celui du bovin de tout à l’heure. Stephen a failli se noyer : un poisson d’argent a jailli du fleuve sur la barque et il a pris peur.
La vie continue : les manuscrits refusés, à présent c’est du passé. Stephen sait quoi écrire : son histoire puisque désormais il en a une, la seule chose qui lui soit jamais arrivée,le meurtre d’Emily., son acte. « C’était enfin du réel ». Rien de tel que du réel pour faire de la fiction.
Il en est fier.
Stephen voudrait cacher ce roman confession qu’il écrit plus vite que son ombre.
La police fait une descente dans la maison. Le corps d’Emily a été retrouvé dans un sac qui porte les initiales de John. Et ce dernier se terre dans sa maison comme il a toujours fait.
Stephen cherche à faire accuser son frère : « boiteux, il était sûrement obligé d’être violent avec les femmes » dit-il aux policiers.
John regarde le fleuve, furieux, charrier quelque mystérieux fardeau dans ses eaux d’encre. Pendant ce temps, Stephen arrive chez lui avec les boucles d’oreilles de Marjorie qu’il a fait disparaître pour qu’on accuse Emily de s’être enfuie avec. Ces bijoux jaillissent de temps à autre dans la nuit, surprenant la torpeur de Stephen.
Il est devenu fou. Il a terminé son histoire réelle dont il est fier. Il faut en outre qu’il la dise. Et il en informe John. Et pour continuer l’histoire, il faut encore u peu plus de réel. Stephen réussit à faire tomber John dans l’eau tumultueuse après l’avoir frappé. La rivière est devenue exigeante, il lui faut des corps. Stephen poursuit la série au comble de la joie. Il écrit ! C’est Marjorie qu’il lui faut tuer à présent. Marjorie qui a lu le roman.
Une masse d’illusions s’empare de Stephen. La grande ombre accusatrice qui se profile sur le mur. Est-ce John ? Un revenant ? Les lumières des lampes jettent des reflets agités par le vent qui vient de la rivière. La porte de la salle de bain semble s’ouvrir toute seule. Les rideaux s’en vont voler de leurs propres ailes mues par un vent électrique. Les cheveux d’Emily ces attributs angéliques les lourdes tentures en haut de l’escalier s’animent et étranglent le meurtrier qui bascule dans l’escalier.
Au ré de chaussée Marjorie et John commencent déjà à faire des projets de vie commune, tout en regardant le jugement s’exécuter.