29 juillet 2006
6
29
/07
/juillet
/2006
12:27
L’Homme sans qualités ( Der Mann ohne Eigenschaften)
123 chapitre dont 58 achevés.
On a interprété ce titre : « L’Homme disponible », « L’Homme sans propriétés » et aussi dans une approche psychanalytique « L’Homme châtré », en tout cas quelque chose désignant la castration.
Le récit devait se dérouler sur un an, l’année 1913, et se donne comme un prélude à la Grande Guerre.
Lieu principal : Vienne, capitale de la Cacanie c’est – à dire de l’Autriche-Hongrie. Autre lieux : en province, la petite ville où est enterré le père d'Ulrich dans la partie II, premiers chapitres.
Des lieux affectionnés par le personnage ; jardins, ponts, rues, jets d’eau.
Des lieux affectionnés par le personnage ; jardins, ponts, rues, jets d’eau.
La publication a lieu en 1937, sous le titre « Voyage au bout du possible » qui concerne le tome I.
En 1933 parait une partie du 2 : « Millenium : le règne des criminels. Ce sont une cinquantaine de chapitres, des fragments, qui sont autant de variations possibles et complètent le tout.
En 1933 parait une partie du 2 : « Millenium : le règne des criminels. Ce sont une cinquantaine de chapitres, des fragments, qui sont autant de variations possibles et complètent le tout.
Genèse : Musil travaille à L’HSQ depuis la publication de l’Elève Törless en 1906.
Le roman initial devait s’appeler « Les Jumeaux ». Contrairement à la chronologie du roman tel qu’il nous apparaît, c’est l’épisode de la rencontre entre Ulrich et Agathe qui fut l’idée initiale du récit, sinon son enjeu.
Musil a écrit un poème « Isis et Osiris » ( cité dans son journal en 1925) sur le thème mythique des rapports entre ces deux divinités, il conte comment la sœur mangea le sexe de son frère endormi. Un poème écrit à la manière des Romantiques allemands, et qui ne nous entraîne pas si loin de « Musil en tant que scientifique », puisqu’il est persuadé que le mythe aide à comprendre la réalité objective. Le poème contient le roman « in nucléo ».
Le roman initial devait s’appeler « Les Jumeaux ». Contrairement à la chronologie du roman tel qu’il nous apparaît, c’est l’épisode de la rencontre entre Ulrich et Agathe qui fut l’idée initiale du récit, sinon son enjeu.
Musil a écrit un poème « Isis et Osiris » ( cité dans son journal en 1925) sur le thème mythique des rapports entre ces deux divinités, il conte comment la sœur mangea le sexe de son frère endormi. Un poème écrit à la manière des Romantiques allemands, et qui ne nous entraîne pas si loin de « Musil en tant que scientifique », puisqu’il est persuadé que le mythe aide à comprendre la réalité objective. Le poème contient le roman « in nucléo ».
Il y a donc à l’origine de L’HSQ un groupe de fantasmes (inceste frère soeur, gémellité, dévoration) dont Musil tire un autre ( l’androgynie) en s’appuyant sur des mythes. Et qu’il a l’intention de développer.
Cependant, les lecteurs de L’HSQ découvrent apparemment tout à fait autre chose, lorsqu’ils abordent l’œuvre par son commencement.
Même s’ils ignorent la suite, l’intérêt porté à ce fantasme , et l’empathie pour celui -ci, les portent à lire le roman d’un seul trait, parce que ce fantasme pointe sous le premier récit.
Cependant, les lecteurs de L’HSQ découvrent apparemment tout à fait autre chose, lorsqu’ils abordent l’œuvre par son commencement.
Même s’ils ignorent la suite, l’intérêt porté à ce fantasme , et l’empathie pour celui -ci, les portent à lire le roman d’un seul trait, parce que ce fantasme pointe sous le premier récit.
Même s’ils ne partagent pas le penchant de l’auteur, ils prendront goût à leur lecture. L’idée leur plaît de lire un roman philosophique, scientifique, de critique sociale, de mieux comprendre les prémices de la Grande Guerre et la société viennoise proche du pouvoir politique, à travers le récit musilien.
Ils vont aussi découvrir dans cette première partie un autre fantasme musilien : l’homme peut être libre. Celui-là est universellement partagé…
Ils vont aussi découvrir dans cette première partie un autre fantasme musilien : l’homme peut être libre. Celui-là est universellement partagé…
L’incipit de L’HSQ introduit le lecteur dans le roman par des considérations météorologiques qui redoublent ironiquement une réalité sociale. Une dépression qui vient de l’est annonce de fortes précipitations pour un avenir proche. Et indique que nous sommes à Vienne .
On ne s’occupe que de célébrer le trentième anniversaire du règne de Guillaume II, le soixante-dixième de l’archiduc François-Joseph, à la veille de sa destruction : l’incipit, fait pour le voyageur, ressemble un peu à celui du « Rouge et le noir ».
Le personnage d’Ulrich ( c’est l’homme libre) : un prénom seul lui suffit. Il a trente-deux ans, mathématicien, il travaille pour lui-même lorsqu’il en a envie. Il a fait trois tentatives pour devenir un grand homme : l’armée, le métier d’ingénieur, et les mathématiques. Puis, ayant remarqué qu’un « cheval génial » l’avait précédé, il s’est désintéressé.
Il n’est engagé dans aucun projet professionnel ou autre. Connu comme intellectuel bourgeois qui flâne dans le quartier, il fréquente des personnes qui, elles , sont toutes engagées dans un processus et qui sont « des possibilités » « des incarnations » de ce qu’il aurait pu devenir; il les tourne quelque peu en dérision, enchanté de ne pas s’être laissé avoir.
Ulrich c’est quelqu’un à qui on ne la joue pas.
Ulrich c’est quelqu’un à qui on ne la joue pas.
« Vous envisagez tout sous la forme de l’essai » lui dit Paul Arnheim, chapitre 121 T 2 .
-La vie elle-même est une expérimentation."répond Ulrich.
Les amis d'Ulrich n’expérimentent rien, ils se contentent de suivre le programme déjà établi à l’avance du rôle qu’ils ont accepté de jouer.
A Par exemple, celui d’ un homme politique.
- Le comte Leinsdorf, vieil aristocrate, politicien, qui voit venir la guerre avec fatalisme. Engagé dans un projet « L’Action Parallèle » destiné à tenir en bride les esprits et raisonner les intérêts . Tous les notables feignent de croire à l’utilité
de ce mouvement dans une monarchie « Impériale et Royale ».
- Le « sous-secrétaire Tuzzi » : politicien rusé que Ulrich appelle ainsi par mépris.
B. d'Un homme d’affaire
-Paul Arnheim : ( On sait que Musil a pris pour modèle Rathenau)
-Paul Arnheim : ( On sait que Musil a pris pour modèle Rathenau)
D’abord industriel, il règne sur des usines et l’exploitation de gisements de pétrole en Rhénanie, activement engagé dans un capitalisme typique de l’époque. Mais c’est aussi un homme mondain, et qui a une forte mainmise sur l’édition. Il écrit (et fait écrire…) des romans à succès tous signés de son nom.
Ulrich a une longue conversation avec lui, à la fin de la première partie, se voit proposer un emploi, et refuse de collaborer.
-Léon Fischel, un « banquier relativement honnête ».
C. d'un artiste (raté bien sûr…)
-Walter, l’ami d’enfance d’Ulrich, qui n’arrive pas à percer. Ulrich représente Nietszche pour Walter et son amie Clarisse. Il est censé être une force active barbare. Walter serait « l’Homme du Ressentiment » .
Ces positions sont d'ailleurs réversibles…
D. d'un militaire.
Vieux et retraité -Le Général Stumm von Bordwehr.
Vieux et retraité -Le Général Stumm von Bordwehr.
Ulrich va souvent le rencontrer à la Bibliothèque Nationale. Le Général retraité assure Ulrich, un peu stupéfait, qu’un vrai bibliothécaire ne saurait se laisser aller à lire les livres dont il assure la gestion, sous peine de provoquer un invraisemblable désordre. Stumm est un homme de bon sens, il nous apparaît aussi comme naïf.
-Un militant révolutionnaire jeune et exalté : Hans Sepp.
E. d'un hors-la-loi criminel et fou ( Moosbrugger) et d'un psychiatre vicieux : Meingast.
L’ouvrage est prolixe de paradoxes et des pensées monologuées d’Ulrich rapportées au discours indirect libre, véritables dissertations qui ont fait dire que l’HSQ était un essai raté, un essai transformé en roman un essai de roman. Philippe Jaccotet, traducteur de l’œuvre en français,(le seul pour l’instant) a employé ces mots ; puis l’HSQ est devenu selon une formule plus sympathique « un roman philosophique » . Thomas Mann, contemporain et grand rival de Musil est rangé dans la même catégorie, alors que l’on a dit « Thomas Mann ne se permet aucun dérapage dans la forme et Musil aucun dans la pensée ».