Gallimard ( Du monde entier), 1988.
La première parution a eu lieu en 1967 au Japon.
Scène inaugurale :
Nous sommes en ville. Mitsu, Le narrateur, perturbé, descend en tremblant dans une fosse septique en construction dans son sous-sol. Il a perdu « la sensation fiévreuse de l'attente". Il ressasse le suicide de son ami qu'il vient d'apprendre. Ce dernier s'est pendu, la figure peinte en rouge, avec un concombre dans l'anus. Un acte qui semblera provocateur à des occidentaux. L'ami avait subi un traitement dans un hôpital psychiatrique d'où tous les malades sortent abouliques.
Mitsu réfléchit aussi à son enfant anormal, dont sa femme et lui ne savent que faire. Enfin, il évoque ce jour de son enfance où il a perdu un oeil, des camarades l'ayant blessé. Il ressent tous ces malheurs, au moment où débute le récit, comme une série de malédictions qui vont le mener à sa fin...
Afin d'y voir plus clair, Mitsu retourne à Shikkoku, l'île de son lieu de naissance, rencontrer sa famille, celle qui est encore en vie, et ses ancêtres...il doit
notamment y voir son frère Taka.
La lignée familiale est difficile à porter. Leur père était suspect et désavoué par la mère, probablement trafiquant de drogues. L'arrière-grand -père fut un personnage . Il s'était enfermé dans son pavillon pendant une insurrection paysanne, et le frère de cet homme, qui avait conduit l'insurrection, disparut ensuite.
Des frères ennemis...
Mitsu et Taka reviennent sur les lieux de cette insurrection qui s'est produite un siècle auparavant, pour enquêter sur les circonstances .Et, sans l'avoir consciemment voulu, ils vont rejouer cette scène de l'histoire familiale et locale, Mitsu s'identifiant pour cela à l'arrière-grand père, Taka au frère de cet homme.
Ainsi les deux frères vont s'affronter au cours d'une action qui aura un sens pour tous les deux. Solitaire Mitsu contre leaderTaka, et que chacun trouve sa place dans l'histoire.
Alors cessera la malédiction.
Résultat : je dévoile tout, car le roman est un peu déconcertant, et il est utile de savoir où cela mène pour mieux saisir.
Taka découvre qu'il veut le sacrifice, le rachat de sa propre vie , de ses fautes ( relations incestueuses avec sa sœur) et aspire à une mort violente. La situation le sert : dans leur village natal, la population manque de tout et il réussit sans peine à monter une vraie insurrection. D 'abord, il séduit la population en créant un club de football.
Le titre original du roman c'est « le football ».C'est lui le "Jeu du siècle..."
Mitsu lui, est donc resté à l'écart de l'insurrection ( bien qu'elle prenne un tour positif) et finit par comprendre qu'il ne faut pas chercher à s'identifier à ses ancêtres. Il a raison. Malgré lui , il ne peut qu'imiter l'arrière-grand-père en se retranchant dans le pavillon.
Trompé par sa femme, enceinte de Taka, à présent défunt, il accepte un poste de traducteur en Afrique.
Il faut également composer avec l'ancêtre féroce Shosokabê ( sorte de père primitif sanguinaire) qui poursuit les fils, lesquels sont sauvés en se réfugiant dans un ravin habitable : c'est là une légende qui est à l'origine de la lignée dont Mitsu et Taka sont issus.
On s'étonne qu'il se produise un si grand nombre d'événements de contingence pure, dans un récit où le narrateur, semble d'un bout à l'autre, plongé dans la méditation et/ou le monologue.
Fin: Mitsu remonte de la cave où il s'était retranché, remonte vers la vie.
C'est une sorte de happy end auquel on n'osait croire...
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