Comment parler des livres qu’on n’a pas lus ? Je croyais savoir…
Je n’ai lu aucun livre l’an dernier et pourtant ce blog est rempli de chroniques de livres : elles constituent à peu près 50% du contenu. Alors ?
Au hasard, le premier titre qui me vient à l’esprit
je n’ai pas lu les Bienveillantes , prix Goncourt 2007; je vais tenter d’en parler :
Le titre : c’est le nom habituel des bonnes déesses de l’antiquité les Euménides ; mais comme ce livre raconte l’histoire du mal absolu je crois qu’il s’agit plutôt des Erynnies , déesses de la vengeance et que ce titre est ironique.
C’est l’histoire d’un allemand très cultivé intelligent et membre du parti nazi dès les premières heures ; il aide activement au génocide mais sans croire que les juifs sont d’une race inférieure ni qu’ils sont une menace pour le monde. Il ne ressent pas non plus de culpabilité particulière. Le narrateur décrit cette guerre avec un grand luxe de détails et les qualités du roman sont avant tout historiques. L’auteur Jonathan Little nous écrit un very big novel de 900 pages ; c’est le fils d’un auteur américain de polars, Robert, que je n’ai pas lu. JL a un peu plus de trente ans, il écrit en français, et se paie un agent littéraire ce qui n’est pas courant en France.
Les écrivains cités dans Télérama (mais peut-être pas dans le livre de Bayard ?) dont Bégaudeau, s’exercent à parler de livres qu’ils n’ont pas lu, sans feindre de les avoir lus mais en assumant justement leur non lecture. Et non pas faire semblant d’avoir lu un livre ce qui est une autre démarche.
Ma non lecture des Bienveillantes me fait penser que je n’ai pas lu Robert Antelme, ni Raoul Hilberg ( la Destruction des juifs d’Europe)
mais « Si c’est un homme » et « Rescapés et naufragés » ( primo Lévy ) j'en ai pris connaissance et c’est loin.
Je devrais lire ou relire ces livres–là plutôt que les Bienveillantes.
Qu’ai-je besoin de savoir les pensées d’un nazi ?
Plutôt apprendre comment se préserver de telles pensées ou encore lire le livre de Victor Klemperer sur la novlangue nazie, ce serait plus utile.
Bof ! rien de neuf! Je n’ai pas grand-chose à dire. Je ne vais pas briller en société!
Quant à parler des livres qu’on a réellement lus c’est une démarche redoutable dans laquelle je n’ose me fourvoyer.
Thomas Bernhard disait (in « Maîtres anciens »? que, fort heureusement, je n’ai pas réussi à lire…) qu’il n’avait jamais lu un seul livre, qu’il était un « feuilleteur ». Ceux qui lisent intégralement un livre n’ont aucune chance de savoir ce qui s’y trouve. Je passe sur les insultes que ce râleur invétéré réservait aux malheureux qui s’appliquent à la lecture linéaire… au fond Pierre Bayard reprend cette problématique… avec un langage tout autre.