C’est l’année 66-67 ; Anne a 19 ans, elle doit passer son oral de bac en septembre 66 et persuade Francis Jeanson de lui donner des cours de philo, pendant les vacances. Elle a aussi écrit à Godard aux Cahiers pour lui dire qu’elle aimait ses films « et l’homme qui les avait tournés ». Elle a déjà tourné elle-même avec Bresson « Au hasard Balthasar », l’an passé.
Godard et elle se sont croisés sans se rencontrer vraiment. Ils sont chacun tombés amoureux d’une image, d’une représentation fantasmatique de l’autre…
Cela ne va pas nuire à la rencontre réelle. La réalité rejoint la fiction.
On assiste alors à cette idylle, pendant un an, une année qui sera bien peu studieuse, en fait !
Anne a des problèmes avec sa mère et son grand-père (François Mauriac) pour faire accepter sa liaison avec Godard, se faire procurer la pilule etc.…
La famille finira par accepter le cinéaste et la différence d’âge (16 ans) avec Anne, car même s’il est très différent d’eux comme famille de pensée, il est de la même classe sociale, ce qui est très important. Ils ont aussi vécu dans des lieux identiques, durant leur enfance (notamment la Suisse).
On aime cette lecture qui se fait rapidement (le récit est simple, sans apprêt, agréable, souvent humoristique) mais dans la seconde partie, Anne et Jean-Luc attaquent une existence très mondaine, tourbillonnante, moins intéressante qu’au début. Ils se sont mariés, ce qu’Anne ne voulait pas, car elle n’a que vingt ans, et ne compte pas passer toute son existence avec cet homme.
A propos du tournage de la Chinoise, Anne ne comprend vraiment pas l’engouement de Godard pour Mao (non plus que les autres jeunes gens qui tournent avec elle), ni la signification du maoïsme. Ils trouvent les préceptes de Mao assez tartes. Mais cela semble n’avoir qu’une importance moindre. L’important est de tourner !! Le Godard que l’on découvre est complètement immature, facétieux, sentimental, utopique, bien que son intelligence et sa culture (disons son habitude de parler par citations, son sens de la formule brillante, et son art de mêler littérature et cinéma à la vie courante) soit fort séduisante pour une jeune fille, de 19-20 ans, encore scolarisée et avide d’apprendre. Et l’on comprend qu’Anne s’en laisse conter.
On est bien loin du Godard des « Histoires du cinéma », mais assez proche d’un personnage comme celui de Ferdinand -Pierrot le fou.
commenter cet article …