Le Livre de poche, 1961
Huitième volume de la série des Rougon-Macquart, publié en 1878, Une Page d’amour est sans doute le moins connu.
Mérite-t-il ce passage aux oubliettes ?
Hélène Grandjean, l’héroïne est la fille d’Ursule Macquart ( pour ceux qui ont lu la Fortune des Rougon).
En 1853, c’est une jeune veuve de trente ans elle vit à Paris dans le quartier de Passy, un appartement spacieux, avec Jeanne sa fillette de presque douze ans.
Le récit s’ouvre sur Jeanne atteinte de convulsions en pleine nuit ; sa mère fait alors connaissance avec le docteur Henri Deberle venu pour soigner l’enfant. Ce docteur est le premier homme pour lequel Hélène va éprouver le sentiment amoureux. Son époux n’était pas désagréable, mais elle ne le prenait guère au sérieux. Jeanne, qui a eu le temps de connaître son père n’y fera jamais allusion.
En fait, Hélène et sa fille vivent une relation fusionnelle, ne se quittent jamais, vivent cloîtrés, ne rencontrent que l’abbé et son frère qui viennent diner une fois la semaine. Elles n’ont d’autres occupations que les travaux d’aiguille, et la contemplation de Paris par la fenêtre de leur pièce principale. La fillette ne fréquente pas d’école, n’étudie rien, parce qu’elle est en mauvaise santé, et cette oisiveté ainsi que l’enfermement, aggravent son état.
On la dit atteinte d’une névrose chloro-anémique, soit un état mélancolique avec un cortège de symptôme physiques variés et inquiétants, bien ciblés pour attirer le docteur, que Jeanne pourtant hait, car elle devine qu’il intéresse sa mère.
Hélène et elle vont se risquer dehors, dans le jardin du docteur. L’auteur a enfin l’occasion de faire un peu de critique sociale à l’encontre de Juliette Deberle la femme du docteur, frivole très enfant, qui donne des réceptions court les bonnes œuvres, bavarde à propos d’articles de mode, s’entiche mollement d’un jeune homme fat le « petit Malignon » , toujours flanquée de Pauline sa jeune sœur godiche à marier. Tout ce monde ne divertit guère Hélène et sa fille qui retournent à leur fenêtre assister aux coucher levers de soleil( flamboyants) à la pluie et aux brumes qui embellissent les monuments parisiens, dans le meilleur goût impressionniste.
Aujourd’hui, elles contempleraient d’autres fenêtres, la télé, en ouvriraient mille autres sur Internet, et Jeanne serait accro aux jeux vidéo… ce qui ne changerait sûrement pas grand-chose à leur mal de vivre…
J’ai presque tout dit. Le sentiment amoureux ne va pas s’épanouir, on le sent, chez Hélène, et une situation quasi vaudevillesque est créée qui ressemble peu à cette héroïne si timide.
Zola n’explore aucun milieu socio-économique dans ce roman. Le portrait de Jeanne est celui d’une fillette qui dépérit, par absence de socialisation, et d’acquisitions culturelles, coincée qu’elle est toujours dans l’attente de sa mère. Un personnage pitoyable et qui rend triste.
Les portrait des personnages secondaires sont assez bien enlevés, on peut citer celui de la mère Fétu, une vieille dame miséreuse, qui voudrait intriguer.
Sur 435 pages, j’en ai passé au moins cinquante…
Un Zola en tout cas très très noir, une situation qui va toujours vers le pire, sans évolution…
mon exemplaire est vieux, vous trouverez plus sûrement ces couvertures :
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