Eric Rohmer Les nuits de la pleine lune( 1984)
« Qui a deux femmes perd son âme,qui a deux maison perd sa raison »
Louise (Pascale Ogier) travaille dans une entreprise de décoration. Elle partage un appartement avec Rémi ( Tchery Karyo) à Marne-la-Vallée, proche de la station terminus du RER. Cette station de métro symbolise pour elle la liberté. Elle peut s'y rendre à Paris d'une traite, Paris où elle a loué un studio. Elle informe Rémi qu'elle y passera désormais la semaine et le rejoindra le samedi matin. Une existence de rêve qui lui permettra des activités que son ami ne peut partager avec elle. Cet arrangement a lieu après qu'elle ait été avec lui dans une soirée dansante où il s'est ennuyé.
Pourtant Louise ne fait que troquer cet être un peu frustre pour Octave ( Fabrice Luchini) qui passe le temps à pérorer dans les cafés prétendant être à la fois écrivain et journaliste. Il égrène à bonne allure une somme de clichés montrant une culture superficielle, non sans donner à toutes ses phrases des allures de citations( on a une première approche de ce qu'on appelle à présent les cafés littéraires, ce qu'y s'y dit ,le ton adopté...) . Les spectateur s'amusent, mais Louise pas du tout.
Dans son petit studio, elle tourne en rond, se met à téléphoner sans cesse à partir d'un carnet d'adresse bien rempli mais où, visiblement, ne se trouvent pas les bons contacts...
La voilà finalement avec un petit chanteur de rock quelconque avec qui elle tente de se persuader avoir du plaisir, en vain. Se lève,exaspérée, fait sa valise, et dégoûtée de la vie parisienne, retourne chez Rémi.
C'est samedi,une nuit de pleine lune, elle prend le premier RER du matin, après avoir conté sa vie à un clochard qui se donne comme peintre et fait son portrait sur un napperon dans l'estaminet où ils s'offrent la première boisson de la journée.
Ils conviennent que les nuits de pleine lune, on recherche l'étreinte...
Une aube dans un petit café admirablement filmée, une nuit presque palpable. L'exaltation un peu factice que l'on ressent lorsque l'on est éveillé et dehors, à l'aube.
Puis vient la surprise finale...
Les deux personnages principaux la jeune fille insatisfaite et le snob ( Fabrice Luchini fait rire avec un jeu très outré à la limite de la caricature) sont d'une grande naïveté . Louise tente d'affirmer sa personnalité, Octave aussi, et chacun tombe dans la banalité. Quant à Rémi, physiquement et moralement, c'est un vrai bloc de béton.
Derrière cette satire de la petite bourgeoisie, il y a le pathétique de Louise, le corps maigre, gracieux, qu'elle vêt de toilettes noires à dentelles, le chignon noir aux mèches disparates, sa façon de percher haut sa voix en y distillant des nuances et des intonations mi-raisonnables, mi-évaporées. Elle voudrait être un bel objet, pour elle-même, et ne rencontre que des hommes vraiment minables. Le plaisir qu'elle aura connu se limite à quelques pas de danse et quelques instants d'étourdissements.