Première publication en 1907. Vous pourriez le trouver en livre de poche.
Mr Verloc travaille pour les renseignements secrets à l’ambassade de Londres, ainsi que pour la police. Il les renseigne sur les activités des anarchistes, tout introduit qu’il est dans cette congrégation dont il écoute les discussions et suit les déplacements.
Officiellement, il tient un magasin où l’on vend de vagues articles de papeterie. Winnie, sa femme, beaucoup plus jeune que lui, l’a épousé parce qu’il avait un peu d’argent et voulait bien prendre chez lui sa vieille mère infirme et son frère débile auquel elle est si attachée, qu’elle ne se plaint pas de ne pas avoir d’enfants. Malmenée par un père cabaretier et alcoolique, elle a voué son existence à Stevie que le père battait comme plâtre. Elle sait que Mr Verloc supporte le garçon comme « un animal pas trop gênant ».
Se doute-t-elle des véritables activités de son époux ? Elle reste impénétrable, mais , parmi les douteuses fréquentations de son mari, elle aime bien Michaelis, qu’elle repère comme victime.
Cet homme, condamné jeune à perpétuité pour une affaire où il n’avait tenu qu’un rôle mineur, est devenu anarchiste, parce que sans place dans la société.
Loin de vouloir jouer les héros, Mr Verloc considère son travail comme la routine d’un petit fonctionnaire. C’est pourquoi il va perdre tous ses moyens, lorsque Mr Vladimir, secrétaire d’ambassade, le convoque un matin, et lui signifie son congé, à moins qu’il ne se lance dans une action spectaculaire destinée à, soi-disant, mécontenter et affoler la population, faire travailler la police ( qui s’endort paraît-il), et faire sortir les anarchistes de leur trou.
Bref, Mr Verloc devra faire exploser une bombe à Greenwich.
Est-ce une plaisanterie ? Mr Verloc , craignant de perdre son emploi, se lance dans l’élaboration du projet, de façon délirante, parce qu’il veut sauver sa peau, son emploi, sa sécurité…
Les anarchistes n’ont pas la part belle dans ce roman , en particulier les délégués du Comité Rouge, tous lâches et stupides, le phraseur Karl Yundt le « camarade Ossipon » décrété docteur pour une vague année de médecine et qui joue un rôle ignoble auprès de la pauvre Winnie. Sans compter « l’homme au détonateur » qui ne se déplace jamais sans sa bombe. Mr Verloc n’est pas en reste, petit fonctionnaire grisâtre, devenu lâche , assassin, ignoble dès qu’il croit devoir se livrer à un acte héroïque. Parmi ce tas de pauvres crétins que le narrateur fustige à l’aide de traits mordants, de cynisme sec, et d’humour noir, Winnie est la seule à qui le lecteur reconnaît des sentiments humains et un certain courage. Par ailleurs, ce roman n’est pas « pessimiste » il est seulement lucide, et plein d’intelligence, tandis que l’intrigue est fort bien menée…
Après plusieurs Conrad, le dernier en date "Lord Jim" (pour aider ma fille qui devait le lire pour ses études) , j'ai eu la nette impression de n'avoir pas le pied marin. En effet, ce roman me convient mieux...