Minuit, 2012 ; 155 pages.
Viviane et son mari se séparent. Julien a fui « l’horreur conjugale » et sort avec une jeunesse. Viviane et lui n’étaient mariés que depuis trois ans, et ont dépassé la quarantaine. Que s’est-il passé ? Viviane a eu un enfants sur le tard, elle ne croyait plus à la conjoncture mari-enfant la concernant, elle planait tellement qu’elle n’a pas bien évalué le potentiel de son conjoint.
Maintenant la voilà seule avec l’enfant le bébé, ou « la petite », douze semaines.
Douze semaines ? Pourquoi pas trois mois ? On dit « une grossesse de x semaines », surtout dans le langage médical, mais dès que l’enfant est né et a dépassé un mois de vie, c’est rare que l’on compte en semaines.
Le narrateur parle à la deuxième personne du pluriel : Vous. Vous êtes Viviane … c’est dur d’être Viviane quand on vous le commande si expressément. Par chance, cet artifice qui pourrait vous bloquer, ne vous dérange pas trop. La narration fluide et alerte, vous y aide.
La situation aussi : Julien est un vrai salaud, vous n’avez aucune peine à le haïr ; vous voulez bien reprendre le jeu de couteaux, cadeau de mariage auquel il n’a pas touché, et vous ressentez le malaise de Julia, pardon Elisabeth, non Viviane, au moment de quitter ce qu’elle avait cru un foyer conjugal. Vous non elle, enfonce la touche »Psy » sur son portable. Vous n’auriez pas eu de mention « Psy » sur votre portable, mais simplement le nom du praticien. Non seulement c’est un « psy » mais en plus, on lui dit « docteur », il prescrit des médicaments, et malgré tout cela il voudrait vous psychanalyser. On ne peut pas tout faire !
Donc, Viviane a tué cet imposteur. Crime de sang. C’est aller un peu loin mais « il n’a jamais vu en vous qu’une bourgeoise, une pâle carriériste, une névrosée de base qu’on domestique à coups de pilules blanches ou bleues ». La jeune femme ne lui a jamais fait aucune impression, c’est une patiente lambda, il est comme son Julien , et elle le tue à la place de son mari…
Comme dans l’Assassin à la pomme, il y a donc crime, et enquête, et cette intrigue on la vit rapidement comme le prétexte à dérouler des phrases. Le fond semble se séparer de la forme, si vous voulez.
Le criminel en herbe fait des choses de plus en plus bizarres, et on ne voit pas très bien à quoi cela rime. La narration est élégante, aussi, les déambulations dans Paris précises, rigoureuses, bien balisées. Rue du Pot de Fer, du Roi de Sicile, rue de la Clef, Vocabulaire parfois original : « Oui, Jean-Paul, stridules-tu d’un air homicide » ( le patron aussi, elle voudrait bien le tuer). Viviane est aussi un peu jalouse de cette rouquine enceinte qu'elle suit et entreprend de faire parler.
A la fin Mme Hermant, Viviane, oui au fait quand s’appelle-t-elle Fauville ? , j’ai oublié … n’est guère plus avancée qu’au début.
Ce que j'ai ressenti moi, tout de même, c'est qu'elle voudrait bien tuer plein de gens. Elle a la haine, c'est cela le message, il est tout simple, et
vous le comprenez.
Et la petite a peut-être bien treize semaines,maintenant, avec un peu de chance, ou douze et demie ?
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