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24 juin 2011 5 24 /06 /juin /2011 14:20

la Métamorphose bilingue    Edition bilingue de poche

 

 

      Mon blog s’allonge malgré moi, et je remarque qu’il est finalement peu représentatif des écrivains que j’ai le plus aimés.  Rien sur Kafka, rien sur Thomas Mann !  Faute d’avoir lu de nouvelles œuvres, je me suis penchée sur cette édition bilingue fort agréable car je ne lis pas l’allemand sans aide, sauf s’il s’agit de textes vraiment simples.

 

Le 24 juin 1924,décédait Franz Kafka, voilà l'occasion de relire deux oeuvres où l'on meurt très bien à la fin...

 

        Tout le monde connait l’histoire de Gregor Samsa, infortuné VRP, qui se réveille un matin «  transformé en une véritable vermine ». Cette phrase provient du narrateur omniscient qui  tout de suite nous révèle l’état de Gregor.

La Métamorphose est écrite à la troisième personne, au style indirect libre. Outre le point de vue de ce narrateur, il y a celui de Gregor, qui préfère croire que ses sensations bizarres  sont «  le premier signe d’un refroidissement, mal professionnel des voyageurs de commerce » . Pourtant « il apercevait son ventre bombé, brun, divisé par des arceaux rigides, au sommet duquel la couverture du lit, sur le point de dégringoler tout à fait, ne se maintenait que d’extrême justesse ».

Bien des lecteurs sont dégoûtés ( un mot que j’ai souvent entendu) par la multiplication des détails réalistes dus à cette métamorphose.

 

Personnellement, cela me fait sourire, je trouve que l’effet recherché est surtout humoristique, un humour vraiment noir mais humour tout de même. Cet effet est produit par différents choix  d’écriture :

- Le narrateur omniscient, pas plus que le personnage, ne s’étonnent de cette transformation qui devrait leur paraître incroyable.  Il s’agit d’un fait surnaturel et il est considéré comme devant être admis, dès l’incipit. Cependant le champ lexical ne relève ni du fantastique, ni du surnaturel, ni de la stupéfaction face à une chose aussi extraordinaire.

Bien au contraire, le réalisme domine, et les soucis domestiques parsèment le texte : le réveil ne sonne pas, le chef de bureau attend, comment faire pour sortir du lit lorsque l’on est dans un état pareil, rassurer la famille, se cacher? Différentes stratégies sont exposées dans le détail.

 

- A part ce qui est arrivé à Gregor, le reste du texte reflète une vie normale autour de Samsa. Les réactions hostiles et violentes du père, de la mère, de la sœur etc.… sont banales étant donné la situation.

C’est là ce que l’on peut dire de la première partie, surtout événementielle : les réactions de Gregor à sa métamorphose, l’arrivée du chef de bureau, les appels de la famille précipitent l’action.

Gregor réussit à ouvrir la porte provoquant un affolement général. Chassé, enfermé dans la chambre, il a été blessé, le père lui a écrasé une patte.

On dit que c’est un « insecte monstrueux » et on ne dit pas quelle est sa taille. Il est assez grand pour se hisser jusqu’à la serrure et regarder au travers.  Comme un enfant de trois ans environ, dirais-je.

 

 

La partie 1 installe le décor et donne à voir les péripéties immédiates inhérentes au violent changement de situation dans cette famille Samsa, la partie 2 voit l’action se ralentir.

 

La métamorphose est ici un mode de vie différent.  Elle n'est pas traitée comme dans  des contes et légendes où c' est une intervention visant un but. Gregor n'a pas été changé en insecte par un ennemi, ni par une bonne fée, pour être protégé de ses poursuivants; il n'est pas devenu repoussant pour éprouver l'amour d'une jeune fille.

Il  ne va pas reprendre sa forme initiale. Il restera comme il est. Dans les contes, on dirait " c'est un faux héros".

 

Gregor s' adapte : dans sa nouvelle position, il doit changer sa façon de se déplacer, d’appréhender les lieux, de voir sans être vu. Les objets ordinaires prennent une grande importance : le verrou, la serrure, le lit, la porte.

Gregor prend du  plaisir, pendant cette période : à regarder par le trou de la serrure, à marcher le long des murs, à écouter sa sœur jouer du violon. J’insiste sur le fait, qu’en dépit de sa terrible infortune, il prend du plaisir depuis le début. D’abord,  à terroriser sa famille par son apparition monstrueuse… hélas pour lui, il ne s’est pas déguisé ! C’est du réel…

Sa sœur nettoie la chambre chaque jour ( il reste caché), et lui donne à manger. Il  se nourrit en suçant des aliments  qui l’auraient rebuté autrefois.

L’insecte-homme ne ressent plus comme avant «  il semblait étrange à Gregor que parmi les divers bruits du repas, on ne distinguât jamais que celui de leurs dents en train de mâcher, comme s’il fallait montrer à Gregor qu’on avait besoin de dents pour manger, et que même avec les plus belles mandibules on ne pouvait arriver à rien ».

Tout ce qui n’est pas la chambre, devient pour lui un au-delà susceptible d’être évoqué, sans plus.

Hélas, un jour, la mère et la sœur décident de vider cette chambre « qui ne sert plus ».Pendant l’opération Gregor doit rester caché mais il se précipite sur une affiche à laquelle il tient beaucoup et s’y colle : elle représente une  femme vêtue d’un manteau de fourrure. Il adore cette fourrure… le symbole sexuel me paraît évident.

 

Gregor est sévèrement puni. ..

 

Partie 3 Il ne cesse de décliner  tandis que sa famille prospère, comme s’il fallait qu’il s’efface pour leur permettre un épanouissement ! Grete travaille come vendeuse et prend des cours, la mère fait de la couture pour un magasin, le père est devenu huissier de justice. Cette partie est profondément tragique. On n’a plus envie de sourire…

Une nouvelle apparition de Gregor  aux siens (il y en a une pour chaque partie) va  lui être fatale.

Du temps de Gregor, qui faisait vivre toute la famille de son salaire, le père était un homme vieilli » cet homme qui autrefois restait terré au fond de son lit épuisé  lorsque Gregor partait en déplacement … ) à présent il porte un bel uniforme bleu, un peu raide, avec des boutons dorés comme en portent les huissiers de banque » ; c’est ainsi que Gregor se fait avoir. Son père tout ragaillardi est capable de le poursuivre et de lui lancer un projectile.

  Quelle sorte d’insecte est Gregor ?

Qu’est-ce qui ressemble à un insecte  et qui a pourtant en soi quelque chose de  l’humanité ?

En septembre 1912, Kafka va marier une de ses   sœurs : Valli ; en novembre, une autre sœur Elli, sa cadette met au monde un enfant, le premier de la génération suivant celle de Kafka. Pendant cette période, il écrit la Métamorphose…

 

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commentaires

M
<br /> <br /> Humour noir, humour tragique, réalisme des détails, quel désespoir malgré tout dans cette métamorphose. <br /> <br /> <br /> <br />
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D
<br /> <br /> Bonjour Dominique, ton billet m'a donné envie de relire La métamorphose (l'oeuvre la plus accessible de Kafka et en plus elle est terminée). Merci. Bonne journée.<br /> <br /> <br /> <br />
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<br /> <br /> Le fait qu'elle soit achevée est un plaisir de lecture supplémentaire!<br /> <br /> <br /> <br />
D
<br /> <br /> Kafka c'est très curieux, tu parles d'humour et quand je te lis je souscris plutôt, Alexandre Vialatte qui a écrit un petit livre tout à fait passionnant sur Kafka était de cet avis<br /> mais voilà quand je le lis je ne ressens pas du tout cet humour, j'éprouve une angoisse, voire une répulsion, je n'arrive pas du tout à voir là le moindre humour<br /> <br /> <br /> bizarre bizarre<br /> <br /> <br /> <br />
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<br /> <br /> Moi non plus,Dominique, la première fois que j'ai lu Kafka j'ai éprouvé des sentiment en rapport avec l'étrangeté, de l'anxiété, un univers volontairement "décalé" comme on dit à présent.<br /> <br /> <br /> Mais plus tard,dans la Métamorphose surtout,j'ai bien perçu un humour très noir...<br /> <br /> <br /> <br />
L
<br /> <br /> lu quand j'étais au lycée, et je pense que j'étais trop jeune pour en saisir toutes les subtilités...<br /> <br /> <br /> <br />
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<br /> <br /> Je ne sais pas....jel'ai lu en seconde, et j'ai été transportée! même sans saisir toutes les subtilités.<br /> <br /> <br /> <br />

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