Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
15 février 2012 3 15 /02 /février /2012 14:08

Mort à Venise 

D’après Thomas Mann

 

Aschenbach était professeur dans la nouvelle de Thomas Mann, et il regrettait de n’avoir su écrire autre chose que des manuels scolaires. C’était à Venise qu’il faisait l’expérience que décidément il ne serait jamais romancier dans le sens d’ « artiste de la langue ».  L’objet d’amour qui aurait pu servir à réaliser une telle œuvre, le jeune polonais Tadziou, résistait à cette transmutation d’un être aimé en un outil faisant fonctionner une œuvre d’art.

Le drame d’Aschenbach c’était la fascination le trouble sexuel, face au jeune garçon, absolument indépassable, impropre à toute sublimation, aussi bien qu’à une consommation d’acte.

Visconti transpose le professeur en «  musicien qui ne peut plus créer ». Cet artiste, tout occupé du son, va découvrir tout d’un coup l’espèce de fascination exercée par le visuel et sombrer dans la déchéance et la mort.

Ce n’est pas tout à fait la même histoire.

Visconti a choisi un accompagnement musical  profondément dramatique, lyrique, impressionnant un peu faux à  mon goût, qui convient à son cinéma : des extraits de symphonie de Gustav Malher. Les passages sont bien choisis, on apprécie les longues plaintes mélancoliques.

Tadziou est un petit Polonais ( il semble que l’acteur soit en réalité scandinave) de quatorze ans au seuil de la puberté. Il est bouclé comme un ange sorti d’une peinture italienne du quattrocento.

Il évolue dans l’univers de la plage, des plages à la mode de 1920. Les baigneuses sont moches, le temps est gris. La caméra suit et poursuit le garçon dans ses évolutions dans les rues et à la plage. : elle le perd et le retrouve, espère le traquer, mais il n’est jamais surpris. C’est Ascenbach qui se surprend lui-même à tenter de lui faire signe. Dirk Bogarde s’est donné l’allure d’un homme plutôt gauche auquel il arrive une incompréhensible mésaventure. Il semble frappé de stupeur. Dans le livre, il pensait tout le temps, dans le film il a l’air stupide comme tous les amoureux.

Il ne comprend rien à ce qui lui arrive. L’incident des valises le fait rester, il ne semble pas savoir pourquoi. Le professeur Aschenbach, lui avait des hésitations des résistances, se créait des alibis pour approcher le garçon, «  Je devrais pouvoir lui dire un mot, le toucher, cela me dégriserait peut-être ».

Des hypothèses étaient suggérées sur ce qui arrivait à Aschenbach, sur la passion.

Il le considérait comme « sacré » et s’en rendait compte. L’histoire d’Aschenbach ne s’arrêtait pas à un problème esthétique( cette sublimation qu’empêchait la fascination), elle englobait aussi la problème social, celui de la communication et de la reconnaissance de l’autre que Thomas Mann ne sépare pas de l’art.

Le film est beaucoup plus direct et plus cruel aussi. Il nous plonge dans la fatalité de la passion et ses conséquences. Ascschenbach est immobile, figé, par rapport à Tadziou , qui bouge remue sans cesse, indifférent, malicieux, parfois perplexe. Prend-il parfois la pose, ou est-ce l’autre qui l’imagine ?

Ascehnbach est réduit à néant sous nos yeux, grotesque et tragique, assailli,  avec du rimmel et de la teinture qui lui coule du visage, dévoré par la fièvre, la vue brouillée.

 

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0

commentaires

A
<br /> J'avais acheté la bande son du film avec l'extrait de la symphonie n°5 de Mahler. Sublime et poignant. Intemporel.<br />
Répondre
M
<br /> Revu récemment: beau roman mais beau film aussi. <br />
Répondre
C
<br /> Nous touchons là l'une des perfections cinématographiques.<br />
Répondre

Présentation

  • : Nuagesetvent
  • : Comptes rendus de mes lectures avec des aspects critiques + quelques films de fiction Récits de journées et d'expériences particulières Récits de fiction : nouvelles ; roman à épisodes ; parodies. mail de l'auteur : dominique-jeanne@neuf.fr
  • Contact

Rechercher

Archives Récentes