Métailié, Noir, 2012, 462 pages.
L’action se déroule en Laponie, nord de la Scandinavie, autour de la ville de Kautokeino, en territoire norvégien.
Le prologue nous met en scène, au 17eme siècle, une tragédie sanglante, résultat d’un conflit entre un cruel Pasteur Lars Laestadius, venu évangéliser ce territoire, et le peuple Sami, attaché à sa religion païenne, à ses rites, ses coutumes, que la colonisation met à mal.
Au XXème siècle, le conflit existe toujours, et revêt des formes multiples, religieuses bien sûr, mais aussi politiques, et prenant la forme d’une haine raciale envers les Sami, qui le leur rendent bien.
Le soleil commence à apparaître : nous sommes en janvier.
Klemet, un homme de cinquante ans travaillant à la police des rennes, vient de se voir adjoindre une jeune policière venue d’Oslo, Nina. N’ayant pas eu apparemment de vie sentimentale, et frustré dans plusieurs domaines, le policier accueille sa nouvelle collègue sans aménité. Mais ils vont vite être confrontés à l’assassinat d’un éleveur de rennes, Mattis, qui vivait retiré sous son gumpi( tente) buvait trop, et résistait à la colonisation. En même temps, un tambour Sami d’une grande valeur, a disparu du Musée de Kautokeino, avant même qu’Helmut Juhl le conservateur, qui l’avait fait venir de France, ne l’ait vu.
Les suspects sont nombreux. Ce géologue Français Rascagnal, pervers notoire, qui vient prospecter pour une compagnie minière et a conclu un drôle de marché avec Karl Olsen, un vieux paysan retors. Les autres éleveurs de rennes du voisinage, avec qui Mattis était souvent en conflit. L’étrange Aslak, un éleveur qui vit reclus dans sa tente et conserve scrupuleusement toutes les façons de vivre du peuple Sami d’antan, au point de ne se nourrir et vêtir, que de ses animaux, et n’avoir de commerce qu’avec eux. C’est ce qu’on appelle vivre en autarcie… Il boit du bouillon de renne, alors que ses compatriotes se sont mis au café depuis belle lurette, ne mange que de la viande de renne ( le régime Dukan, en somme) fait sa toilette dans la neige, ne se rend jamais en ville… sa femme a l’esprit dérangé ; pas étonnant se dit le lecteur, la pauvre, à mener une telle existence !... mais il y a autre chose d’enseveli sous la neige du passé, vous vous en doutez !
Un policier très classique dans sa forme et sa construction avec les ingrédients bien connus : vengeance, appât du gain, déviations sexuelles, orgueil, et démesures à tous les niveaux.
Un roman extrêmement bien documenté sur les coutumes et le mode de vie du peuple Sami, leur savoir-faire, leur art(les chants les Joïks instruments de transmission, les tambours et leurs symboles) et leur difficiles conditions d’existence.
Un roman dans lequel on idéalise le passé censé être toujours mieux que le présent, où la colonisation n'a été qu'infamie, brutalité, et persécution, et où rien de bon n'en est jamais sorti. Le héros du roman Aslak qui méprise la civilisation, dans sa grande "sagesse". Seule, la policière Nina essaie de faire entendre un autre petit son de cloche, hésitant, mais bien timbré.
Vive Nina ! Rien que pour elle, je reprendrai de ce truc.