Editions Parigramme, 2009.
Ce réjouissant recueil est composé par Jacques Jouet, auteur entre autre des « Poèmes du métro »
également romancier et membre actif de l’Oulipo.
Il a choisi 80 poèmes ayant pour thème d’inspiration la capitale de la France.
La plupart sont en français mais quelques poèmes étrangers traduits y figurent.
Son but est de « donner un échantillon représentatif à la fois de l’histoire de la poésie et de la forme d’une ville ».
Toutes les époques sont présentes du Moyen Age au vingt et unième siècle. Bien sûr certains poèmes sont célèbres( Baudelaire et ses Tableaux parisiens, Cendrars et un extrait de la Prose du Transsibérien...) et d’autres peu connus voire inconnus ; c’est le charme des anthologies !
Vous y trouverez les principales formes de poésie, sauf le poème en prose.
Le livre est divisé en plusieurs rubriques, ( La seine les ponts les canaux ; l’histoire ; les rues ; les montagnes ; les jardins ; les bâtiments… ) chacune préfacée agréablement par l’auteur.
J’ai choisi forcément des pièces courtes :
1 Extrait de " Paris les jardins
DORMIR AU PLAFOND
C’est si paisible au plafond !
C’est la place de la Concorde.
Le petit chandelier de cristal
Est éteint, la fontaine dans le noir,
Pas une âme dans le parc
Au-dessous, là où le papier se décolle,
Le Jardin des Plantes a fermé ses grilles.
Ces photographies sont des animaux.
Les vastes fleurs et feuillages bruissent ;
Sous les feuilles, les insectes fouissent.
Il faut aller sous le papier peint
Pour rencontrer le galdiateur-insecte,
Combattre avec un filet et un trident
Et quitter la place et la fontaine.
Mais, ah, si l’on pouvait dormir là-haut….
Elizabeth Bishop, Nord et Sud, 1946
Traduction Claire Malroux
2 Extrait de « Paris l’Histoire »
LE GODEMICHET DE LA GLOIRE
Un vit, sur la place Vendôme,
Gamahuché par l’aquilon,
Décalotte son large dôme,
Ayant pour gland Napoléon.
Veuve de son fouteur, la Gloire,
La nuit, dans son con souverain,
Enfonce-tirage illusoire-
Ce grand godemichet d’airain.
Théophile Gautier Poésies libertines
( in le Parnasse satyrique du XIXeme siècle, 1864)
EXTRAIT DE « ¨Paris métro »
Sous l’métro Mirabeau coule le sang
C’est un suicide
Faut-il qu’on souffre tant
Les pleurs viennent toujours au bout du temps
Vienne la rame où je meurs
Les pompiers vont je demeure
L’amour s’en va comme le sang coule
L’amour s’en va
Comme la rame est lente
Et comme l’égoïne est violente
Vienne la rame où je meurs
Les pompiers vont je demeure
François Caradec , les Nuages de Paris, 2007
4 Extrait de « Paris les bâtiments »
JOURS D’EPREUVES
Jadis je logeais haut, tout contre la gouttière :
Tapi souvent à ma fenêtre en tabatière,
Rêvant à ma misère, à tant d’affronts subis,
J’écoutais les marchands de légumes , d’habits :
Et les tueyux des toits, chefs d’ouevre des fumistes,
Rayaient de noir le fond de mes grands yeux si tristes,
J’entendais parfois un doux bruit de grelots,
En me penchant, j’aimais ce gros homme en sabots
Qui se hâtait pour vendre aux phtysiques jeunesses
La consolation du tiède lait d’ânesse.
Charles Cros Le Coffret de santal, 1873
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