10/18 ( Domaine étranger)1996, 432 pages
2dition d’origine : Tar Baby, 1981.AB+
Titre : Tar baby « bébé goudron » est une façon de désigner les noirs pas plus amène que « nigger » ;
Un homme en fuite, dénommé étrangement « Fils » s’introduit clandestinement sur l’île des Chevaliers dans les Antilles, ayant suivi deux femmes. Il rôde autour de la demeure de Valerian Street, 70 ans riche retraité qui passe ses journées dans une serre à écouter de la musique.
Les deux femmes s’avèrent être son épouse Margaret, qu’il a épousé très jeune et qui ne s’est jamais adaptée à son existance paraît-il facile, et Jadine une jeune femme métisse nièce des employés de maison qui sert à Margaret de demoiselle de compagnie en attendant de rejoindre la France où elle travaille comme mannequin.
Tous attendent Noël et l’arrivée du fils des propriétaires Michael, qui a semble-t-il connu une enfance perturbée au milieu de cette engeance.
Mais c’est l’étranger,( « fils », un surnom qu’il endure depuis toujours) qui sera l’invité-surprise, et va faire exploser le fragile équilibre de la maison, provoquant chez chacun une remise en question. Les employés de maison vont se sentir spoliés et après s’en être pris à l’étranger, vont se dresser contre leurs maîtres. Un autre couple de noirs infériorisés par les domestiques précédemment cités, et méprisés de tous, vont se rebeller à leur manière ; Jadine et l’étranger sont attirés l’un par l’autre, mais ils ne viennent pas non plus du même monde, quoique tous deux afro-américains, et leur union va se révéler problématique.
Un roman très riche qui traite de l’affrontement de milieux sociaux opposés, aussi bien chez les noirs que chez les blancs, dont le rapprochement induit querelles et identification pour certains d’entre eux à d’anciennes révoltes d’esclaves noirs. La lucidité du texte est de montrer que les noirs se dressent les uns contre les autres, aussi bien que contre les blancs. La discorde révélée par l’apparition de l’étranger, ne cesse de provoquer des dissensions, des vengeances, que rien ne viendra apaiser.
Un récit vraiment réaliste et un roman social éclairé. J’ai remarqué aussi la façon qu’a l’auteur de faire parler les éléments naturels, en ce qu’ils participent de mythes fondateurs ; au départ dans cette île, des colons saccagèrent la nature, et s’affrontèrent aux populations indigènes.