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8 mars 2008 6 08 /03 /mars /2008 00:47
 Albin Michel, 2007

 J’en ai lu environ 200 pages sur 600 environ.


Ce livre apporte pas mal d’indications nouvelles sur les parcours de Dylan, souvent des propositions, des hypothèses sur ce que l’on ne sait pas, et que l’on peut conjecturer. En ce sens c'est une oeuvre ouverte qui invite à questionner.


Mais questionner sur quoi?


   A-t’on vraiment envie de savoir combien de fois Dylan a rencontré Woody Guthrie et dans quelles circonstances ?

(S'il ne l'a jamais rencontré, et qu'il a inventé sa rencontre avec lui, ce n'en est que mieux...)

Combien de petites amies il a eues et ce qu’elles ont à raconter ?

A t’on envie de savoir s’il a vraiment suivi quelques cours à l’université ou aucun ?

Dans combien de bars new-yorkais il a chanté avant d’être remarqué par quelqu’un qui compte ?

Si son parcours fut progressif et besogneux, ou son ascension rapide ?


A-t-il besoin qu’on le défende de s’être fabriqué une biographie imaginaire ?

J’ai bien lu des éléments de cette biographie fantaisie autrefois sur la pochette de « The Times They Are A changin’ » mais je l’ai prise comme de la fiction. Ce qui m’étonne, c’est que l’on ait pu y croire.

A- t-il besoin qu’on le défende d’avoir été arriviste, alors que tous ceux qui réussissent le sont ?

Bref tout cela peut compléter ce qui a été dit par ailleurs, sans à mon avis, éclairer davantage l’œuvre, sauf en de rares moments, lorsque Bon parle vraiment pour lui : par exemple à propos de Desolation Row : «  Et si une grande chanson de dylan c’était comme renverser dans une maison d’enfance, un carton de vieux jouets. Il reste de belles couleurs, même un peu abîmées, il y a des cassettes de vieux films, et des livres avec des histoires qui faisaient vaguement peur» ; cette métaphore est excellente, elle s’applique bien à la chanson en question, que du coup l’on voit d’un œil neuf. Elle répond à la question initiale : 

 «  Introduction,’ ou comment devient-on Bob Dylan »

C’est soi-même qu’on recherche.

 Des notations comme celles là il n’y en a pas beaucoup. Il faut de la patience pour les trouver.

Je n’ai pas eu tellement de patience, je n’en ai trouvé qu’une…

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25 février 2008 1 25 /02 /février /2008 16:18
en-lisant-gracq.gifJosé Corti, 1981, 302 pages.
 

C’est le dernier volume de critiques littéraires de Gracq.

 
 
 

 Le premier Préférences (1967), contient le pamphlet «  La littérature à l’estomac »où il s’élève contre la médiatisation de la littérature, et dans le reste du recueil rend hommage à ses écrivains préférés Balzac, Stendhal, Chateaubriand, Jünger…

 
 
 

 Pour lire Gracq, tant les fictions que les ouvrages critiques, on doit avoir toujours présent à l’esprit ce qu’il dit dans Préférences (in le chapitre « Les yeux ouverts ») concernant certains de ses souvenirs écrans, certains de ses fantasmes fondamentaux, ceux dont il peut parler :

 
 
 

1) le jour, où, enfant, il aurait vu le départ du paquebot France et aurait eu l’impression d’un «  lâcher tout » d’un vrai départ, d’une « mise en route » d’un mouvement essentiel et particulier, en fait l’essence du mouvement même.

 
 
 

Il aime Stendhal pour cette raison : les personnages y sont toujours en mouvement.

 

Cet auteur a pour principal attrait d’avoir su donner un caractère d’imprévisibilité à la narration, à l’action : on est toujours surpris par la phrase suivante.

 
 
 

2) la sensation de contentement qu’il éprouve à être transporté sur un lieu élevé, sur une hauteur, de regarder une vaste étendue de paysage, et avec vue panoramique sur les environs.

 
 
 

3) La chambre vide : le fait d’entrer dans une pièce habitée familièrement par quelqu’un qui s’est absenté. Cette opération est source de plaisir car, fortement marqué d’interdiction.

 

« L’Etre absent surgit du rassemblement des objets familiers autour de lui ».

 
 
 

Ces fantasmes si bien délimités, Gracq ne cesse de les exploiter dans tous ses livres, les approfondir les développer, les illustrer.

 
 
 

Et je crois que chacun de nous devrait chercher aussi à isoler ses impressions fondamentales pour mettre de l’ordre dans son paysage mental.

 
 
 

 Le 2 et le 3 induisent le goût de l’ouvert, puis celui du lieu clos, ce qui peut paraître antinomique : c’est bien pour cela que l’auteur nous donnera l’impression de se contredire. Mais ces contradictions sont sources d’enrichissement

 

En tout cas, le troisième fantasme, la « chambre vide », invite au geste de la lecture : la joie qu’il éprouve de pénétrer dans une œuvre, c’est bien celle de découvrir le lieu habité d’où l’auteur s’est absenté, laissant son livre.

 
 
 

Il débute par une étude comparée de l’art pictural et de la littérature. «  La parole est éveil appel au dépassement ; la figure figement, fascination. Le livre ouvre un lointain à la vie, que l’image envoûte et immobilise. »

 
 
 

«  Ce qui en littérature se rapproche le plus d’un tableau, la description, ne ressemble en rien à une série de prises de vues qui constamment se ressourcent à leur foyer. En littérature toute description est chemin ».

 

En montrant la différence entre un tableau et une description, JG veut prouver que la littérature est plus vivante. Du moins celle qu’il apprécie…

 
 
 

Continue en développant sa conception de l’œuvre romanesque : la hantise de ce qui est figé, mort, revient sans cesse, en opposition à ce qui est la vie même.

 

Le roman repose sur une contradiction : il est en même temps parfaitement construit rien n’y est mis au hasard (aspect figé, clos sur lui-même) et pourtant l’inspiration existe, l’œuvre est un miracle en soi, un moment de grâce qui se renouvelle à chaque lecture ; JG ne cesse d’insister sur l’ « inconscience merveilleuse du romancier » en particulier à propos de Stendhal et de la Chartreuse…

 

Le romancier est un véritable créateur qui impose arbitrairement son œuvre là où rien ne l’attend. Il passe outre au mystère qui consiste pour lui… à susciter à fabriquer sans aucun secours de ses mains, quelque chose, qui puisse ensuite devenir opaque à son propre esprit.

 

Le roman est un réseau de relations multiples mais aussi une entité indivise.

 
 
 

IL affirme son goût pour les romanciers du 19eme siècle : Stendhal Balzac Flaubert Zola , surtout Stendhal qui, pour lui représente l’apogée de l’art romanesque.

 
 
 
 
 

Flaubert et Zola sont appréciés mais critiqués.

 

Pour Gracq, le romancier cesse d’être inspiré avec Flaubert. « L’Education sentimentale » qu’il n’aime plus, alors que Madame Bovary lui plaisait encore, serait l’un des premiers symptômes de ce déclin. Ensuite vient Proust, qui achève en quelque sorte le roman. Ce déclin c’est la constatation que l’œuvre romanesque se complexifie se dote de moyens nouveaux, mais que ceux-ci l’entraînent vers la mort. 

 

« Ce lâchez tout de ballon libre, dont la sensation nous est donnée seulement de loin en loin dans nos lectures romanesques préférées et qui est peut-être le couronnement de la fiction, parce qu’il est comme la matérialisation même de la liberté, Proust se l’interdit… toute la Recherche est résurrection, mais résurrection temporaire, scène rejouée dans les caveaux du temps, avant de s’y recoucher, par des momies qui retrouvent non seulement la parole et le geste, mais jusqu ‘au rose des joues et à la carnation de fleur qu’elles avaient’ en leur vivant »

 

Ce qui produit cette fâcheuse impression, c’est que Proust en dit trop : il ignore les pouvoirs de la suggestion. L’œuvre de Proust est comparée tantôt à une masse inerte, tantôt « à la jungle étouffante et compacte d’une prose surnourrie dont on n’arrive jamais à s’élancer hors

 

d’elle pour jouer librement… on ne rêve guère à partir de Proust, on s’en repaît ».

 
 
 
 
 

Les Eaux étroites (1976) La Forme d'une ville (1985 combinent l’autobiographie (non intime) et les notes de lecture, les souvenirs se groupant autour des lieux favoris de l’auteur.

 

 Dans En lisant, en écrivant c’est l’écrivain parisien qui évoque des lieux (les architectures modernes telle que la tour Montparnasse, qui lui plaisent) et son appartement parisien. La modernité architecturale le revigore curieusement «  cet après-midi, revenant de la tour Montparnasse et gravissant, le long même de la tour, l’escalier qui mène au terre-plein, le même charme agit sur moi, puissant : ces beaux et vastes volumes aux angles tranchants, aux arêtes nettes, faisaient ma respiration plus ample et plus légère… » il ne me serait pas venu à l’idée, avant de lire ces lignes que ces paysages urbains pouvaient paraître esthétiques et surtout pas insuffler une force de vie.

 
 
 

Gracq multiplie les métaphores originales qui prennent appui sur des champs lexicaux concrets (la cuisine, l’artisanat, diverses techniques, les processus physiologiques).Sa littérature est souvent assimilée à un repas où Stendhal serait l’apéritif et Proust le plat de résistance- à bien des égards indigeste.

 

Le mot «  apéritif «  revient souvent : la littérature, c’est ce qui doit mettre en appétit- mais sans rassasier- sinon c’est l’ennui qui guette.

 

Zola c’est la fiche et le catalogue, Balzac le magasin d’antiquités, c’est pourquoi Balzac vieillit bien et Zola moins.

 

« Ce combat contre l’angoisse du figement donne au livre son harmonie profonde, et alimente les exposés consacrés à la description et au paysage, ou, à travers un débat avec Valéry et Breton, à un éloge de l’arbitraire du roman (Pourquoi pas «La marquise sortit à cinq heures»). 

 
 
 

Pour reprendre ses termes, on va considérer ce livre comme une promenade, un cheminement à travers les formes esthétiques et les auteurs qu’il lit et relit.

 
   
 
 
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28 janvier 2008 1 28 /01 /janvier /2008 00:00

Amis.jpgMartin Amis «  Guerre aux clichés », recueil d’articles critiques (1971-2000)
Gallimard, 2007. 

 

 C’est très plaisant : contrairement à  beaucoup de  critiques français (écrivains ou pas) Amis n’ennuie jamais son lecteur en faisant des chroniques de livres. Il fait preuve de verve, d’humour, d’ironie féroce, d’un sens maîtrisé de la digression, et l’on rit souvent. 

 

 Voilà des critiques vraiment démocratiques. Il a cette qualité précieuse de se mettre à la place du lecteur ordinaire, lorsqu’il parle des grands textes, et minimise la culpabilité du lecteur qui n’a pas pleinement réussi à  apprécier l’un ou l’autre des grands romans sacralisés.
 

 

Les textes sur «  Cinq grands romans incontournables » vont nous concerner tout d’abord puisqu’il s’agit des ces chefs d’œuvres  de la littérature que l’on a tous lus ou essayé de lire,  avec des fortunes diverses.

 

 Don Quichotte : («  la lance brisée »)

 

«  Lire Don Quichotte équivaut peu ou prou à recevoir la visite du vieux barbon de la famille : il s’attarde indéfiniment, multiplie ses petites farces… déroule le flot interminable de ces souvenirs et radote à l’envi sur ses horribles copains… »

 

et pour la construction «  c’est un agglomérat qui procède simplement par accrétion… pas de suite, rien que du supplément… la bouillie primitive de la fiction : ça fume, ça glougloute, ça grésille de vie en puissance, ça grumelle de prototypes âcres et grossiers ».

 

un monument d’ennui, un livre écrit au temps où il n’y avait pas de roman, pas fait pour le lecteur…celui qui écrit ces lignes en sait quelque chose… il vient de le lire… !

 
Vous allez comprendre un peu plus  pourquoi vous aimez ou n’aimez pas Don quichotte.
 
 
 

 « L’Ulysses de Joyce » :

 

 il faut une semaine pour le lire en ne faisant que ça. Joyce a trouvé le moyen de n’écrire que pour son plaisir et surtout pas pour le lecteur. (Je pense que Amis est aussi un peu dans ce cas, il parle en connaissance de cause ! Certains de  ses livres sont  difficiles à aborder.) 

 

« Son livre est un livre sur le cliché, sur les formules éculées et les tournures toutes faites, sur les métaphores figées  … Ulysses parodie tout depuis le Curso Mundi jusqu’aux manchettes des tabloïds. Quel plaisir, du moins en théorie-de voir notre styliste accompli adopter le langage d’un huissier, d’un annuaire, d’un ivrogne ou d’un texte sacré… » 

 

Ce point de vue n’est peut-être pas neuf, mais pour moi, il relance la réflexion sur Ulysses et mon approche de ce livre. 

 

Martin Amis se moque volontiers des snobismes et des préjugés. Il se demande qui peut lire Joyce et à quel prix comment en tirer profit.
On s'interroge avec lui sur les raisons que l'on peut avoir de lire  de la littérature ( en dehors des contraintes universitaires) sur ce qu'est une "lecture de plaisir", et à quel titre le roman de Joyce peut effectivement en être une. 

 

Philip Roth : « sa bêtise croît sans cesse depuis Portnoy, alors que son style a tendance à s’améliorer… » etc. mais ce serait une erreur de croire que Amis n’aime pas Roth, Joyce, ou même Jane Austen ( lecture intéressante aussi de Pride and Prejudice). Son goût pour ces auteurs dont il se moque apparaît dans la lecture, au moins entre les lignes.

 
 
 

Certains textes sont  également réussis   qui se développent autour de productions  telles que Jurassic Park : l’envahissement par les dinosaures.

 

Même le livre des Records, lui inspire des pages assez plaisantes, avec des digressions loufoques… 

 

Amis ne sacralise pas la littérature, même lorsqu’il voue une admiration particulière  à l’auteur dont il parle (Nabokov, Bellow) et quelque critique que soit son attitude il aide à renouveler la vision que l’on a de telle ou telle œuvre, qu'il met en relation avec la société, la politique.

 
Malgré sa férocité, il n’assassine aucune des œuvres citées.
 

On préfère les textes sur «  cinq grands romans incontournables »ainsi que  la critique centrale  sur les nouvelles de Kafka. .

 

Ceux qui ont lu DeLillo, Updike, Roth et Mailer (ce n’est pas mon cas) apprécieront aussi les pages sur ces romanciers américains. 

 
Un bon moment à passer et pas mal d’idées nouvelles.
 
 
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11 novembre 2007 7 11 /11 /novembre /2007 16:34

Paru chez Flammarion en octobre. 350 pages, 200 reproductions en noir et couleur.
La-nuit-sexuelle-quignard.jpg

Ce livre consiste en présentations et commentaires d’un choix remarquable d’oeuvres d’art ( peintures, gravures, dessins…) en deux dimensions, qui toutes ont une relation directe avec la sexualité, en particulier avec le fantasme dit de » la scène primitive » soit le moment de la conception de l’être humain.

«  Notre vue ne porte jamais vraiment jusqu’à la scène qui nous fit et que nous répétons sans cesse néanmoins au cours des étreintes où les corps s’additionnent et se redissocient ».

 

Le problème de l’homme est que la conception d’un être humain ne se limite pas, comme pour l’animal, à une  simple copulation mais procède d’un acte sexuel, c'est-à-dire que l’homme imagine et symbolise.

 

 Beaucoup de gens objecteront qu’ils se moquent de savoir quand ils ont été conçus et comment ;  ou encore, que la mère (voire les parents) leur ont relaté la circonstance.

Or il ne s’agit pas de cela, pas de renseignements objectifs, ni d’orientation dans le temps, mais du mystère de l’origine, mystère qui reste entier pour l’homme et ne se peut dater ( «  la scène primitive précède le passé. C’est le jadis, hors mémoire, hors temps »).  

«  Sans doute l’expression utilisée de nos jours de scène primitive est-elle excessive pour désigner le fait que les hommes et les femmes dérivent d’une étreinte entre un homme et une femme autre qu’eux-mêmes, puisque cette étreinte est invisible à leur regard faute d’être déjà conçus. Peut-être faut-il lui préférer l’expression de nuit sexuelle puisqu à n’en pas douter, il n’est plus question dans l’âme inquiète d’une nuit intérieure que d’une figuration originaire ».

Quel sens donne t ‘il au mot « Nuit »  : Quignard oppose la nuit étoilée féconde à la nuit noire démoniaque.

«  Une fois nés au terme de chaque jour, c’est la nuit terrestre. Et si c’est par la nuit qui est en nous interne que nous parlons, c’est dans la nuit externe, quotidienne, que nous nous touchons. Avant la naissance, ce fut la nuit utérine. Après la mort, l’âme se décompose cette troisième sorte de nuit n’a pus aucun sens pour s’aborder nuit infernale.

C’est  l’expression  d’un auteur qui entend ne pas faire oublier qu’il est poète autant qu’essayiste  et véhicule sa pensée  à l’aide de métaphores chargées de sens. Autant de « nuits » que d’événements fondateurs pour la personnalité.  

 

«  Brusque éclair comme le coup de foudre qui tombe longtemps avant que le chant s’élève, longtemps avant que la langue humaine se comprenne. Cette scène précède les corps encore sans existence qu’elle fabrique, qu’elle fige, qu’elle portraiture. Tel est le véritable sens du clair-obscur ».

Aussi le livre se présente t’il sur fond noir, comme au cinéma, même si le cinéma n’est pas convoqué pour l’occasion. On peut d’ailleurs remarquer que certains peintres ( tel Caravage) avaient déjà un grand sens de la mise en scène.

Mais le choix de pascal Quignard est varié (deux cents œuvres sont reproduites avec soin) et d’un goût très sûr. Elles sont présentées selon un vertain ordre, et groupées par  thèmes En fait, l’auteur, à partir de la scène primitive, aborde commente et illustre d’autres fantasmes fondamentaux communs à tous les êtres humains et qui se rattachent à celui là ( la scène primitive) qui pour lui les rassemble tous.

 

On trouvera donc des images commentées sur la dévoration «( «  Saturne »), le (dé)voilement ( Loth et ses filles, Noé et ses fils) ; l’interdit de toucher ( Noli me tangere) , la dénudation ( l’apocalypse qui révèle « ôte le velum »).

Pasacal Quignard aborde aussi les différentes façon de penser ou de représenter les fantasmes suivant les différentes cultures et religions (Grecque, romaine, chrétienne, orientales, musulmanes…)mais de toutes les époques ainsi les peintres actuels sont-ils de la partie ( Rustin , Bacon, Hopper…)

 Parmi  tant de belles pages, on peut noter « le Jugement dernier » de Lucas Signorelli qui, raconte Quignard,  inspira Freud qui le contempla à Florence, pour ses théories sur la sexualité.

Ainsi qu’un hommage à Goya pour ses peintures noires de «  la quinta del sordo ».
 

Voilà une nuit qui se propose de nous éclairer ou plutôt, comme dit Quignard «  de désobscurer la situation ».

Je ne sais si c’est le cas. Mais nous partons pour un voyage émerveillé dans ces œuvres remarquables, et le commentaire de Quignard est toujours intéressant, lettré,pensé, ses propos nous apprennent toujours quelque chose ne serait-ce que sur la mythologie, l’art…bien sûr on peut trouver son expression un peu péremptoire et emphatique. En dépit de ces défauts, le livre est passionnant.

 

Il a aussi été écrit comme protestation, pour défendre l’art contre les diverses formes du puritanisme religieux et dans ce sens, c’est une œuvre politique :

 C’est vraiment une raison politique qui m’a plongé soudain dans l’excitation, dans l’effervescence. Il y a deux ans je me retrouvé aux USA, d’abord à l’université d’Atlanta puis, après, à l’université de Sewanee, quand la loi américaine contre les images indécentes a été votée. Tout le monde sur les campus, toute la gauche américaine, même le petit-fils d’Edgar Poe, George Poe, ne parlait que de cela. La loi a été votée à l’unanimité par le Sénat américain puis plébiscitée avec 95 pour cent des voix par la Chambre des Représentants. Le résultat s’appelle exactement The Brodcoast Decency Enforcement Act. Les images sexuelles ne sont pas interdites, mais dès qu’elles rencontreront le regard d’un enfant ou d’un puritain ou d’une minorité religieuse une amende suffocante tombera comme un couperet. Sachant la rapidité avec laquelle le puritanisme traverse l’océan Atlantique j’ai alors été pris d’une espèce de fièvre. Je me suis dit : « Nous avons mangé notre pain blanc de liberté. »

(Extrait de l’interview accordé à la revue Art Press, octobre 2007).

 
 
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11 octobre 2007 4 11 /10 /octobre /2007 10:14

Les meilleurs représentants du rock sont ceux qui ont tenté d’en sortir. Zappa allait vers le jazz et la musique atonale, le Pink Floyd vers la symphonie romantique, les Stones vers le théâtre sur scène … et Dylan vers la poésie. C’est, à priori, ce que dit le Dylan de Bon.

Découvrir les textes de Dylan cependant cela se fait par l’écoute de sa voix et sa manière de dire,  d’interpréter, dans quoi il y a comme un chant, lequel passe difficilement pour un chant de sirène, à moins que le  témoignage d’Ulysse qui tenait les prestations de ces femmes-oiseaux pour insoutenables et irrésistibles en même temps, ne dise précisément qu’être fasciné ou rebuté par l’écoute de dylan signifie exactement la même chose.

 Lire un texte de dylan sans l’entendre chanter cela a t’il de l’intérêt ?

 Pour moi, peut-être que non.

Lorsque je n’ai plus aimé le chant de Dylan (à partir de « Oh Mercy » disons) je ne me suis plus intéressée à ses textes.

Peut-être le livre  repose t’il cette  question ?

La première de couverture raconte une histoire : voyez ces portraits en buste d’un Dylan artificiel,  solarisé en trois couleurs et en trois exemplaires, avec lunettes épaisses, expression dédaigneuse et méprisante, le plus rébarbatif des dylan possibles c’est ce qui a été choisi comme illustration. Encore et toujours le filtre warholien.
Voyez  aussi le nom de François Bon inscrit en vert tendre sur une surface immaculée ce jeune Bon qui, dans l’innocence printanière de ses quinze ans allait à la découverte de ce dylan là…qui allait lui révéler toute l’opacité l’hypocrisie  la complexité du monde adulte représentée, assénée…  par ce grand frère qui se dissimule dans ces images peu amènes.

Voyez enfin la sobriété étonnante du titre «  Bob Dylan : une biographie ». On n’a jamais fait mieux. Le premier biographe  Scaduto intitule son bouquin impunément «  Bob Dylan » comme si c’était possible  d’en parler directement. Après lui, on se réfugie dans des sous-titres vaseux reprenant le plus souvent le thème de la route-qui-ne-mène –nulle-part «  No direction home, à la croisée des chemins, sur la route avec…  ou encore le truc du masque «  Behind the Shades ».

Mais là bon sang «  une biographie » … ! Il fallait oser. On croyait que c’était une rencontre, non, c’est une biographie.     

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20 août 2007 1 20 /08 /août /2007 12:58

Devenir père, devenir mère.

Devenir père devenir mère

 Arip/Erès, 1999. Sous la direction de Michel Dugnat

 

Ces contribution devaient me servir de documentation pour fabriquer des observations intéressantes sur la façon de jouer de l’enfant avec ses parents dès lors que dans mon roman j’ai introduit un gamin de trois ans qui joue, c’est le cas de le dire, un certain rôle pendant plusieurs chapitres.

J’ai eu des enfants mais je n’ai pas pris de notes véritables et je ne veux pas me servir trop de ces souvenirs là.

On donne un  historique de la fonction du père et de la famille assez ironique, bien exposé, sans fioritures.

 

Un psychanalyste présente les différentes sortes de pères que l’opinion reconnaît ; Il fait un sort au "père biologique », au père nourricier ( qui n’est plus spécifique) au père éducateur ( extrêmement concurrencé par une myriade de professionnels de la pédagogie) et au « papa poule » ( on pense à Trois hommes et un couffin) qui serait un peu ridicule et non sans danger.

Alors on ne dira plus « être père » mais «  avoir un père » : Etre père est impossible, avoir un père c’est envisager le problème plus judicieusement.

Rien sur le refus de procréer.

 

 

Philippe Julien

 

« Tu quitteras ton père et ta mère ». Aubier, novembre 2000.

 

 

Essai psychanalytique d’un vieux mais bon lacanien, présenté comme extrêmement accessible au grand public.

Il se positionne par rapport à l’évolution des mœurs dans la famille (le rôle du père et ses évolutions à travers le demi-siècle ; l’abandon du mariage ; la fréquence du divorce ; la monoparentalité).

On peut le mettre en parallèle avec un catho de gauche comme JC Guillebaud, qui est humaniste au premier degré. Et observer les différences.

On lira avec intérêt ce qui fit la divergence entre Freud et Jung ici clairement expliquée.

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10 juillet 2007 2 10 /07 /juillet /2007 13:33

dico-de-litte---fg-copie-1.jpgCharles Dantzig « Dictionnaire égoïste de littérature française « Grasset, 2005.

Ce dictionnaire compte 1000 pages.


 Il est l'oeuvre de Charles Dantzig. Je ne savais rien de lui, même son nom ne me disait rien, avant d'avoir eu ce bouquin sous les yeux à la Fnac au rayon littérature biographie.

Je l'ai pris et l'ai feuilleté à la cafétéria pendant une heure au moins. Je ne me suis pas ennuyée un seul instant! Dantzig présente un corpus constitué de noms d'auteurs, de genres littéraires, d'habitudes de lecture, d'objets en rapport avec la lecture ou l'écriture, de mots concernant l'édition, d'idées reçues et de modes. Il commente tout cela avec humour, fantaisie, soutenu par une vraie culture et une certaine indépendance d'esprit.


On réagit vivement, comme dans une conversation : ça c'est bien vrai ou encore il n'a rien compris, parfois c'est pas bien neuf ce que tu dis!


On a envie de réagir, oui,  à la plupart de ses notices, c'est le genre de livre que l'on a furieusement envie d'annoter! On regrette que l'auteur ne soit pas avec nous pour discuter. Bref, c'est le genre de bouquin que tu ouvres lorsque tu te sens seul, que tu n'as rien à te dire, que tu t'écoutes et que rien ne vient. Dantzig remédiera facilement à cette panne. Il va te relancer!

 

Par ailleurs, il parodie quelquefois les auteurs de maximes,  façon  La Rochefoucauld ou Chamfort, avec plus de souplesse.Il se fait critique littéraire, mais parle aussi de la société, appporte sa vision du monde, laquelle n'est pas exactement ce que tout le monde rabâche à longueur de journée.

 

Charles Dantzig est l'auteur de plusieurs romans( dont je n'avais aucunement entendu parler), mais, l'ayant trouvé  je l'élis pour la conversation.


J’en ai extrait  quelques  tranches pour vous les faire partager.

Avec parfois de petits commentaires.

 

Ennui : quantité de gens se marient pour la même raison qu’ils lisent : ils s’ennuient. Aussitôt s’anéantit le romanesque de l’amour ; marié on se rend compte qu’on est le même avec du poids en plus. Les membres du couple s’ennuient. Ils se remettent à lire. La facilité du divorce a réduit le nombre de lecteurs de romans.

Quand on s’ennuie en écrivant c’est mal écrit.

L’ennui : un plaisir stérile.

Un monde drogué de distractions lit beaucoup moins qu’un monde où il faut remplir les jours.

Eprouver de l’ennui, c’est se montrer prudent pour un lecteur : je m’ennuie je n’ai pas compris.

« Plutôt l’ennui qu’un plaisir médiocre » Gourmont (« Des pas sur le sable … » promenades philosophiques.

 

Candide assomme le roman picaresque (depuis Lazarillo) ensuit Thackeray l’achève avec Barry Lyndon »

 
 

En 1995, le gouvernement anglais a aboli le prix unique du livre : la médiocrité a envahi l’édition : les grandes chaînes ont tué les librairies indépendantes. On ne trouve plus que Dillons Foyles et Waterstone. Le best-seller y acquiert de la postérité.

 

Je pense en effet que les best-sellers, on en parle davantage qu'auparavant. Les romans fabriqués pour la consommation courante, sont sur-médiatisés. Tout ce qui autrefois s'appelait " bibliothèque bleue", "littérature de colportage",  ou plus tard " roman rose", était beaucoup lu mais l'on n'éprouvait pas le désir de le commenter. Maintenant on va disséquer ces textes; les faire étudier en classe . Et l'on confond cette littérature avec des textes plus exigeants. Ce qui m'énerve le plus, c'est de voir ces auteurs être salués par des critiques qui ne font plus la différence. 

 
Lire et écrire ne sont pas des facultés naturelles.
Ma parole! ça pourrait être un sujet de dissert . Ce type de phrase qui paraît tellement évident mais dont on ne tient en principe pas compte. Et l'envie qui nous vient de démontrer le contraire...!
 

Charles Dantzig n’aime pas l’Oulipo. « La poésie qui ne sait que jouer est la plus indigne des facéties ».

Pas d’accord : le jeu est au centre de la poésie, mais c’est un jeu sérieux. Il est vrai que l'Oulipo va parfois trop loin. Avec l'Oulipo Pérec a écrit les meilleurs choses du  monde ( comme La Vie, mode d'emploi),

mais aussi 53 jours et la Disparition qui me laissent froide.


Chanson : ce n’est pas de la poésie c’est un art à part.

C’est un art qui a ses règles qui ressemblent à celles de la poésie : Paul Zumthor l’appelait « poésie orale ». Dire que ce n’est pas de la poésie est sans intérêt : le mot poésie est sujet à des interprétations très variées. Depuis l’acception grecque …


 

La Politique, dit Stendhal c’est un coup de pistolet dans un concert » (Le Rouge et le Noir).

Ce « coup de pistolet dans un concert » me fait penser à Hitchcock, « L’Homme qui en savait trop ». Une scène fameuse.... 

 
 
 
Les styles :

Le style Bible : et + imparfait. Savoir dans le sens de comprendre.

Connaître à la place de savoir.

Connaître à la place de copuler aussi

 
 

Code civil. Le droit n’apprend pas à écrire mais à ne jamais accepter quelque écrit que ce soit sans en avoir vérifié la source.

 

Ecole normale : l’érudition facétieuse : exposer des connaissances en plaisantant.

Peur de rater l’examen que l’auteur croit passer en permanence.

 

Des journalistes : avoir peur de répéter un « demeurer « après un « rester »

Des « avouer » après « un dire »....


Des journaux : Libé a longtemps écrit en style Duras même inconsciemment avec les adverbes de conviction : forcément évidemment.

Le Monde écrit en Proust.

Voilà qui est daté : Libé écrit en Rotschild (sauf Pierre Marcelle) et Le Monde en Lagardère bientôt tout le monde écrira en Sarkozy…

 

Style maritime : plaît parce que spécialisé : vergues, hauban, cacatois, drisses, écoutilles, tous les styles spécialisés sont descendants de l’héraldique.

 
 
Style structuraliste : de faux savants peuvent s’y camoufler.
 

Le sujet : c’est le déclic qui ouvre le fichier « imagination » de l’écrivain. L’histoire n’est qu’une excroissance des personnages.

 

Sade : Justine un des romans célèbres les plus mal écrits de la littérature française. Années 60, il devient une gloire ; mais c’est la dégénérescence du style de Racine, l’influence de Rousseau, les cadences latines, et relatives. Bourré de clichés, de mots répétés, rabâchage de corruption, crime, scélérat… trop de superlatifs, préciosité c’est du Greuze.

 

Greuze : sa petite fille à la cerise! Imaginez là chez Sade! non je n'y réussis pas. Sade ne me laisse rien imaginer du tout.


 

Julien Sorel : je me représente lisant un livre en haut d’un arbre dans un équilibre précaire pendant que mon père qui fait marcher sa bétonnière risque de m’appeler : « Fainéante ! Tu lis encore ! et envoyer le volume dans l’eau ».

Le père est un « manuel » disent parfois ces gens-là avec un orgueil plein de ressentiment envers ceux qui lisent des livres.

 
 
JJ Rousseau  a bien fait d’abandonner ses enfants. Son Emile eût fini dans un HP.
 
Pascal c’est un traité amoureux contre Montaigne.
Il a plus de punch que Montaigne, plus de ferveur, et bien du mérite à l'avoir lu!
 

Les surréalistes : il les trouve trop sérieux et appliqués et Apollinaire celui qui a trouvé le mot est le seul qui lui plaise.

 

Goût de la contradiction: les surréalistes synonyme de fantaisie,d'imagination débridée, et supposés ne pas aimer les régles, présentés comme des tâcherons!  Ou plutôt comme des artistes qui ont trop souvent appliqué des recettes, et créé des dogmes sans le vouloir!

Chez les surréalistes je n'aime que les dissidents. Ceux qui ont été surréalistes un moment, qui en ont tâté et qui ont fui.

C'est vrai qu'Apollinaire me reste cher.

 
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9 juin 2007 6 09 /06 /juin /2007 20:17
surveiler-et-punir.jpgMichel Foucault Surveiller et punir : naissance de la prison
 
Publié en 1975 chez Gallimard (bibliothèque des histoires).
 

Il s’agit de montrer de quelle manière une nouvelle organisation du pouvoir s’est progressivement mise en place dans les sociétés disciplinaires.

L’auteur souligne que son ouvrage « doit servir d’arrière-plan historique à diverses études sur le pouvoir de normalisation et la formation du savoir dans la société moderne »

Dans le « curieux projet d’enfermer pour redresser » il voit le moyen du pouvoir d’assujettir et de contrôler non pas la seule délinquance mais les individus et leurs corps.

 

Le pouvoir veut améliorer les comportements en rendant les corps dociles et en dressant les esprits. Il inculquera une norme plutôt qu’une loi : le contrôle, la surveillance et la mise en examen des individus pour mieux les assujettir.

Le pouvoir s’occupera des individus, de connaître leurs pensées, mais ce ne sera plus le fait de la religion car on voudra rendre l’individu efficace et docile dans les « institutions disciplinaires » c’est d’ailleurs un pléonasme ; Foucault entend démontrer que toutes les institutions sont disciplinaires.

 

La prison fut la première de toutes et reste le modèle de toutes les autres. A partir d’un système carcéral s’organisent ces autres institutions que sont les écoles, les usines, les casernes, les hôpitaux (voir l’histoire de la folie à l’âge classique) dans le Grand enfermement).

 
 

Hypothèse : bien que la prison soit un échec et qu’elle fabrique des récidivistes, cet échec est le maintien de cette institution à la place centrale qu’elle occupe et au contrôle de l’illégalité qu’elle instaure.

 
La prison révèle le caractère carcéral de l’ensemble social.

Son organisation s’appuie sur les sciences humaines développées à partir du 15eme siècle.

 

Victor Hugo se trompe en disant « Si l’on ouvre une école, on ferme une prison ».

 
 

L’Ancien Régime :

 

La Torture, instrument privilégié du pouvoir royal est un spectacle : carnaval des atrocités.

Exemple : le supplice de Damiens qui avait tenté de tuer Louis XV ; le corps de ce criminel démembré montre ce que l’on a voulu faire au pouvoir du monarque.

Et inspire à la foule rassemblée la certitude que ce pouvoir est inviolable.

 

Le spectacle provoque aussi la révolte et la provocation : le criminel peut se muer en héros.

En ce cas la punition doit être représentative on doit lire dans cette punition infligée la nature du crime et le châtiment imposé.

 

Il devient nécessaire de bien connaître et classer les criminels et les châtiments possibles.

Ainsi va s’élaborer le code pénal. on va graduellement remplacer la torture du corps par les travaux publics, le forçat enchaîné avec sa pioche et son boulet.

 

Le souci est alors devenu « réformer les âmes », procédure qui conduira à l’abolition de la peine de mort. Petit à petit se mettent en place des procédures éducatives pour que le criminel et ceux qui le regardent apprennent à bien se conduire.

 

DRESSER : to dress : habiller on vêt le crime pour le représenter dans son horreur.

Normaliser. Abouti à un contrôle généralisé et incessant des individus assujettis.

 

« La prison n’est qu’un des lieux parmi d’autres où se met en place un pouvoir d’abord soucieux de produire des corps obéIssants. »

Foucault poursuit l’histoire de la folie en allant plus loin : » le système carcéral produit des disciplines »c'est-à-dire des règlements.

Celles-ci ne cloisonnent ni ne compartimentent l’espace social. Au contraire les mêmes normes vont s’imposer à toutes les institutions. Celui qui passe de l’une à l’autre n’est pas exclu ; il y trouve tout de suite sa place.

Passer de l’école à la prison est éprouvant mais le délinquant y retrouve les mêmes règles.

Ceci est d’autant plus vrai qu’il y a des hiérarchies dans la prison comme dans l’école. Les prisonniers riches et /ou en vue y sont bien traités et disposent de doits particuliers. On a pu observer le régime carcéral réservé à un Papon à un Tapie etc. qui n’a rien de commun avec celui d’un prisonnier normal. Il y a certainement une prison pour les gens aisés qui n’est pas la même que pour les pauvres. Il y a aussi dans les prisons de « bons élèves » qui font des études et sortent avec des diplômes même s’ils viennent d’un milieu défavorisé, comme cela se voit à l’école.

 
Le dressage :

J’en retiens les passages qui m’ont paru pertinents : attention cette lecture n’est pas forcément objective :

-organiser le temps, rendre utile chaque instant pour une activité correspondante, répartir l’emploi du temps en phases successives qui permettent un progrès en passant de l’une à l’autre.

Ceci me fait penser à ce que disent de nombreux parents en parlant de leurs enfants : les occuper tout le temps ne pas laisser la vacuité s’installer ni le temps de penser pour soi ni le temps de rêver. Chaque moment de la journée doit être réservé à une discipline quelconque : se laver manger suivre ses cours à l’école sport école re-sport activité annexe pour boucher les trous (dessin musique…) devoirs repas vaisselle un peu de jeux vidéo (on ne peut l’empêcher certains appelle ça « soupape de défoulement »…). Le temps doit être rentabilisé. C’est ainsi que le vocable « gérer » a été dérivé de son sens premier pour intéresser toutes les activités humaines.

- occuper diversement les individus : élaboration d’une culture mosaïque consistant à découper les activités en « matières » pour découper l’individu en « aptitudes diverses ».

- Diviser les activités en gestes élémentaires. Un signal, un mouvement, qui y correspond, une réaction automatique.

 

- Réprimer chaque faute même ténue y compris celles qui tiennent à la non adéquation au comportement requis : manière d’être, excentricité, insolence, négligence…

 
Le pouvoir de la Norme :

- la Norme correspond au 19eme siècle à une moyenne, vite déterminée par les sciences sociales et leur outil, la Statistique.

- Une personne se voit qualifier de « normale » si elle intériorise les règles couramment admises. C’est à ce moment–là que la norme devient une des caractéristiques du pouvoir social disciplinaire.

- Pour s’asseoir encore plus le pouvoir de la société disciplinaire va soutenir que les disciplines ne sont plus là pour neutraliser les dangers occasionnés par des groupes sociaux inutiles et ou agités, mais qu’elles sont positives. Que grâce à elles l’individu devient de plus en plus utile.

 
 

La société qui se développe est alors une société de « surveillants » qui s’occupe de surveillance hiérarchique, de sanctions normalisatrices (toujours d’actualité avec le fameux « casier judiciaire en Maternelle ») la norme permet de mesurer des écarts de sanctionner des niveaux, d’ajuster des différences.

On va pouvoir dire que les « gens sont libres de cultiver leurs différences » et paraître ainsi libéral dans le sens de compréhensif généreux non-directif alors qu’on sera au contraire répressif mais de manière tellement vicieuse qu’on pourra se glorifier du contraire.

 

Exemple très actuel : le mariage homosexuel est une mesure qui cherche à normaliser ce qui peut encore sembler subversif dans l’homosexualité.

Car ces processus de normalisation produisent toujours autant d’exclus dont le comportement est à réformer.

 
Naissance du politiquement correct :
 

« C’est à la condition de masquer une part de lui-même que le pouvoir est tolérable »

 
Le surveillant général devient conseiller d’éducation
Les flics des ZUP deviennent des îlotiers
Les concierges des gardiens
Les élèves des apprenants.
Le capitalisme le libéralisme
Le Pen devient Sarkozy.
 
La société panoptique

Le Regard : un pouvoir qui surveille c’est un pouvoir qui observe et dont le regard est invisible. Pouvoir d’autant plus indiscret qu’il se fait discret.

Le Panoptique de Bentham : tour centrale, anneau périphérique, cellules.

Etre vu sans jamais voir. Voir sans être vu : ce dernier détient le pouvoir.

 

La prison fabrique la délinquance et permet son contrôle sa gestion son utilisation.

En quelque sorte cette explication est freudienne. Elle tient compte des mobiles inconscients de ceux qui détiennent le pouvoir. La prison permet une réalisation du crime avec des dangers moindres comme les actes manqués en psychanalyse rendent possibles la réalisation des désirs souvent avec un moindre mal et les maîtrisant partiellement.

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5 avril 2007 4 05 /04 /avril /2007 18:49

La-Confusion-des-sexes.jpgA la FNAC j’ai feuilleté un de ces essais light de 90 pages que publie Flammarion dans la collection « café Voltaire ».


Michel Schneider, psychanalyste, ancien énarque et musicologue (un mélange savoureux !) sort le dernier opus anti-Ségolène royal, et anti-socialiste «  La Confusion des sexes »

.

Michel Schneider a pris du service deux ou trois ans au ministère de la culture, alors dirigé par Jack Lang : il ne s’en est pas remis ; sa description de ce  funeste parcours dans «  la Comédie de la culture » (1993) témoigne de son intense désarroi face aux inconvénients de la démocratisation de la culture, et de son incapacité à en saisir les possibles bienfaits.


Puis de livre en livre, la pensée de Schneider évolue vers cette constatation que sous l’influence des gouvernements socialistes ( à compter de 1981, il y en aura bien davantage que par le passé) la « société » se féminise, s’hystérise et que les hommes en pâtissent. Dans «  Musique de nuit » sorte de pot pourri où il parle de tout et de rien, il se moque de ces hommes politiques « auxquels on prête une sexualité débridée alors qu’ils en ont passé l’âge mais aussi  est-il  outré que Michel Rocard ait eu à figurer dans une de ces émissions de télé ringardes où on l’a ridiculisé en l’apostrophant sur sa sexualité…


Et bientôt Schneider rejoint le camp des pourfendeurs de la société laxiste où les hommes ne jouent plus leurs rôles. C’est alors « Big Mother : psychopathologie du politique » et ce refrain est loin d’être neuf. La suprématie des femmes selon MS nous mène tout droit vers la négation du sexe en tant que tel.

 


L’être humain, selon Schneider a tendance à nier la différences des sexes  dont découle l’altérité en tant que telle.

La société actuelle chercherait plus qu’autrefois  à nier le fait biologique du sexe et son inscription dans l’ordre symbolique du langage et des lois qui  force chacun à occuper  une place dans la vie sociale et l’ordre des générations. Les symptômes de ce déni : la transsexualité qui fait davantage parler d’elle, le mariage et l’adoption d’enfants  chez les couples homosexuels… avec la bénédiction des politiques socialistes.

 

 La société est  hypocrite et ne nous   autorise pas à dire que notre sexualité est problématique, mais nous contraint  à nous  prétendre libéré et positif. On fait  mine de croire que la sexualité est affaire d’hygiène  et de technique que tout peut s’arranger entre les couples à l’aide de remèdes empiriques, de sex toys, de films pornos,  de bonne volonté, de rave-parties, ou au contraire  de méthodes de détournement ( sport, religion,  jeux vidéos) …

Cela au moins est vrai.

 M. Schneider dénonce cette attitude qui est « narcissique et infantile. »Elle trahit le déni de la sexuation qui  se traduit par le fait de fuir l’obstacle de rencontrer l’objet du désir fuir l’appel de l’autre.

Se libérer semble être «  se libérer de l’emprise du masculin ». Des personnalités comme Gaby Cohn-Bendit écrit un pamphlet «  contre la suprématie du pénis » il appelle à la régression, la masturbation, la tétée…

 

MS fustige  aussi  les projets socialistes qui pénalisent le recours à la prostitution,  la  loi contre le harcèlement sexuel, lutte contre la pédophilie avec trop de zèle.

le projet socialiste entérine la suprématie des femmes. Elle ont déjà tout le pouvoir, se plaint MS, sur la petite enfance (crèches, garderies, écoles maternelles) sur l’éducation (l’enseignement, sous toutes ses formes est majoritairement pratiqué par les femmes) etc. «  le pouvoir des femmes est comme la lettre du ministre dans «  la Lettre volée » trop évident pour qu’on s’en avise »

Et aussi en  psychanalyse les femmes dominent sont parfois déclarées meilleures que les hommes.

Il ne reste rien aux hommes.

Et voila qu’on a une candidate socialiste ! Qui en plus joue la carte «  être une femme » dans son programme, et prétend se battre pour les femmes « j’agirai d’abord pour les femmes battues… femmes voilées, excisées, humiliées, inégalité salariales et dans l’emploi, mon combat est pour vous ».

En politique, la différence des sexes ne doit pas compter selon MS, elle n’est structurante que dans la famille et dans la vie privée. « En politique il n’y a pas plus de sexe que chez les anges… et que la différence sexuelle n’est structurante qu’en famille et dans la vie privée ».

Pour lui, en dehors de ces espaces qui doivent rester clos, il n’y a plus de sexe,et donc  plus de lien social !

Comment peut-il prétendre que les femmes exercent une suprématie sociale et politique puisque précisément, la «  différence sexuelle ne compte pas en dehors de la vie privée ».

 Et comment la séparation entre vie privée et vie sociale  serait- elle aussi radicale qu’il le prétend ? Si comme le dit lui –même MS la différence des sexes d’un point de vue symbolique est affaire «  de lois de langage et de société », elle intéresse aussi la sphère politique ; si la sphère politique n’est pas également concernée par les lois, le langage et la société, je veux bien être pendue !

 

 Comment peut-il fustiger SR et son « maternalisme désexualisant » ?

Les allemands se sont plaints d’avoir pour chancelière une femme sans enfants et ici on se plaint de la candidate socialiste « la ministre des mamans ». Quand il s’agit des femmes personne n’est satisfait !

Il dénonce aussi Jospin qui annonce une loi sur le harcèlement sexuel en 2002 pour la journée des femmes.

Thèse de Jospin «  je ne connais de désir vrai entre les êtres que par consentement »

 

Pour MS le consentement «  est la condition légale à l’accomplissement de certains actes sexuels. Le désir est la condition psychique du sujet parlant. Le plus souvent le désir est transi (on désire qui ne nous désire pas) ou intransitif (je ne désire personne ne particulier)

 

Le désir sexuel est toujours violent, agressif, unilatéral, souvent, harcelant parfois, et ravale l’objet sexuel à côté de son idéalisation). Il ne peut être une relation égalitaire accordant deux volontés en un contrat. On fait l’amour avec une personne mais aussi avec une non-personne un corps un ensemble de zones ou d’objets ayant une valeur érotique privilégiée  ».

 

Le désir mutuel est donc une exception c’est une situation qu’il ne faut pas espérer mais produire et surtout pas légaliser.   

Ce n’est pas faux bien sûr, ces propos sont même intéressants et à méditer, mais compte tenu de ce que nous dit MS sur le désir, il me paraît d’autant plus normal de faire une loi contre le harcèlement. Pour éviter les débordements de ce désir autant que faire se peut.

MS se trouve donc accuser les socialistes de laxisme (parce qu’ils veulent légaliser le mariage et l’adoption d’enfants chez les couples homo) et de répression (parce qu’ils pénalisent la prostitution le harcèlement sexuel et font trop de zèle contre la pédophilie)

Que MS soutienne le harcèlement sexuel  et la prostitution c’est tout de même un peu gros !

 Il me semble que  la prostitution est une perversion et que les femmes s’y abîment tout en ayant l’impression d’exercer un pouvoir sur les mâles et de les rabaisser. 

A mon avis  aucun des deux sexes ne sort indemne de la situation de prostitution ni d’aucune autre et les femmes ne sont pas plus gagnantes ni influentes que les hommes dans notre société.

Cette protestation de virilité, cet ancrage à droite, cette vitupération de la candidate socialiste, maintenant responsable de tous les maux (on nous dit qu’elle est responsable des erreurs d’Outreau !) est ridicule et de mauvaise foi. Un tel livre ne fait pas honneur à la psychanalyse.

 
 
 
 
 
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14 mars 2007 3 14 /03 /mars /2007 18:15

Publié à l'Esprit des Péninsules en 2001.

PJ est prof d’université à Grenoble. Il s’attaque d’abord aux éditeurs qui font passer pour des produits d’avant-garde novateurs d’infâmes jargons qui n’ont jamais voulu rien dire ou de véritables romans roses présentés comme des romans expérimentaux : Camille Laurens est visée pour le roman rose et Kacem que je n’ ai pas lu. Pour Camille Laurens, c’est tout à fait vrai.

Les productions éditoriales de fiction via Minuit font aussi l’objet de critiques, dénoncées comme «  l’art de la vétille » de ces machines de guerre qui présentent avec un maximum de descriptions oiseuses les moindres petits faits et gestes de l’existence en s’arrangeant pour les rendre encore plus insignifiants qu’ils ne sont ! Ceci prétendument pour illustrer le principe de Barthes et raconter «  l’aventure d’une écriture plutôt que l’écriture d’une aventure ».

Mais à force de froideur, de précision (et de dérision surtout) l’aventure n’est pas souvent au rendez-vous, pas plus du côté de l’écriture et c’est l’ennui qui gagne du terrain.

 Les cibles préférées de Pierre Jourde sont Christian Oster ( là je suis tout à fait d’accord) et JP Toussaint ( un peu moins)… de toute façon ce chapitre est tout de même assez bien venu.

Pour montrer qu’ils ne sont pas dupes de la littérature ni de la vie, ils ont créé un nouveau nihilisme.

Pierre Jourde s’en prend aussi à Sainte Bobine et lui vole dans les ailes et les plumes, ça réjouit tous ceux qui s’endorment au catéchisme.

Un chapitre sur la poésie présentée comme savante, et dont il démonte le mécanisme et prouve qu’elle est relativement simple à réaliser et ne nécessite ni inspiration ni conviction, ni talent.

Et bien sûr ce qui a fait couler le plus d’encre c’est la dénonciation par Jourde de l’hégémonie exercée par Sollers depuis trop longtemps, et la déception que cause le Monde des Livres qui ne propose plus que des sornettes en littérature française et peu de choses en tout. La comparaison avec le volumineux «  Time Litterary Supplement »hebdomadaire devrait, c’est sûr faire rougir de honte les journalistes du Monde.

Mais que dire du cahier « livres » de Libé qui, à se vouloir très branché, est nettement moins bon…

Et puis à présent, on a des « blogs le Monde » performants en matière de journalisme littéraire et linguistique : c’est vrai que la situation s’est nettement améliorée depuis que Pierre Jourde a écrit ces lignes.

Je ne comprends pas pourquoi il défend Eric Chevillard et Valère Novarina avec les mêmes arguments qui lui ont servi à contester les auteurs Minuit et POL… 

Dans l’ensemble un pamphlet réjouissant à lire, assez juste dans ses grandes lignes.
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