1956
Invité à séjourner chez monsieur et madame Stirl, Olivier Lérins débarque un beau matin à Barcos-les-Bains, station climatique du Pays basque.
On n’est pas venu l’attendre à la gare !
Par rapport à son précédent séjour dans leur maison de Savoie, Olivier (peintre de son état) est déçu. La situation a évolué ; l’état de Mr Stirl ( anglais typique, architecte de son état) tuberculeux de longue date, semble avoir empiré ; mais il se tient parfaitement bien et allume toujours sa pipe qu’il ne peut plus fumer. Sa femme, pour qui Olivier nourrit un amour non avoué et apparemment platonique, a beaucoup changé. Elle élève désormais deux gros chiens qui ne la quittent pas et ils se témoignent une affection débordante ; il y a aussi ( oh horreur…) un couple de ouistitis. Par ailleurs cette femme est toujours pleine de vie ( « électrique » pense Olivier) mais elle lui bat froid . Les échanges verbaux sont décevants, hostiles, ou superficiels…
La situation s’envenime, Olivier finit par soupçonner qu’on veut se débarrasser de lui, voire le tuer carrément…
Le lecteur pense que le couple est sous tension, parce que Mr Stirl va mal et que la mort approche. Mais pourquoi ont-ils invité Olivier dans ces conditions, qu’attendent-ils de lui ? Qu’il ne leur donne évidemment pas…
Un huis-clos étouffant, plein de non-dits…une langue soutenue très belle ! description du Pays Basque et d’un Cambo-les bains spécialement mortifère qui ne plaira pas aux autochtones
Jorn Lier Horst Le Code de Katharina
Gallimard (noire) 2021,464 pages.
Cela fait vingt-quatre ans que Katharina Haugen a disparu. Depuis, William Wisting explore obstinément les archives de ce dossier non élucidé. Et personne n’a jamais pu déchiffrer ce qu’on appelle le code de Katharina : des chiffres, des lignes et une croix que la jeune femme avait griffonnés sur une feuille trouvée dans sa cuisine.
L’ouverture d’une enquête sur son mari, Martin, suspecté d’avoir jadis été impliqué dans l’enlèvement de la fille d’un industriel milliardaire, laisse envisager un lien entre les deux affaires. Mais tout cela remonte à si longtemps… Wisting sera t-il capable d’arracher des aveux à un homme avec qui, sans être tout à fait son ami, il pratique parfois la pêche au lancer et à la foëne ?
Une très agréable lecture, écriture précise , personnages suffisamment complexes pour qu'on les suive, bien rendus dans leurs soucis quotidiens, habitudes, occupations professionnelles, méticuleusement décrits jusque dans les petits détails. Une ambiance réelle. Une intrigue qui se développe lentement mais sûrement avec un supense savoureux. Un digne héritier de Mankell.
Jacques Expert Qui ? ***
Sonatine 2012 ( édition du Livre de poche)384 pages
Dix –neuf ans après le viol et l’assassinat de Laetitia Doussaint 10 ans, une émission télévisée reprend l’affaire : malgré plusieurs gardes à vue, de multiples interrogatoires, et l’arrestation d’un suspect qui s’est révélé innocent, on cherche toujours le coupable. Les quatre principaux suspects sont devant leur TV avec leurs épouses respectives à regarder l’émission. On sait bientôt que l’une des épouses collabore avec un commissaire appelé « Grosse tête » pour faire tomber son assassin de mari.
La construction du roman ce sont de court chapitres mettant en scène tantôt l’un des suspects, tantôt sa femme, avec en tête de chapitre l’heure à laquelle a lieu la scène, tantôt la femme qui s’apprête à la faire tomber ( « elle ») ou le tueur lui-même( « lui »).
Le jeu consiste à deviner qui est le coupable des quatre types. Au début, cela fonctionne assez bien. On élimine les suspects au fur et à mesure que des indices sont dévoilés. On note leurs similarités fort nombreuses, d’autant plus que chacune des épouses semble soupçonner son conjoint.
Cependant la lassitude s’installe au dernier tiers, même si on n’abandonne pas la lecture. Le coupable est à ce moment évident…
Le portrait de cette petite société est très noir : les suspects, coupables ou non, sont insupportables en tête l’horrible Antoine Vasseur, qui bat son épouse, et fanfaronne à tout va. Les personnages répètent à l’envi que la peine de mort devrait être rétablie, tout le monde est terriblement vulgaire, et sans éducation ni culture, même l’instituteur, dont on attendrait un peu d’humanité est raciste ; on dirait un repaire du Front national, c’est ce qu’on appelait autrefois « la France profonde « (l’appellation est un peu abandonnée).
Des qualités, donc, essayer un autre titre éventuellement.
Jane Smiley Un siècle américain 1 « Nos premiers jours « ***+
Rivages poche, 583 pages
Walter Langdon rêve d'avoir sa ferme et d'obtenir son indépendance, loin du regard paternel. Avec sa femme Rosanna, il décide d'acheter une exploitation agricole dans l'Iowa. Sur cette terre, sa famille connaît les grands bouleversements historiques de la première moitié du XXe siècle, de 1920, à l'aube de la dépression, jusqu'en 1953.
Un pavé solide et des personnages sympathiques ; un côté positif ! Chacun tire le meilleur de lui-même ; c’est plutôt rare ! L’auteure se met dans la tête des enfants même tous petits et ça sonne plutôt juste.
On dénote un certain angélisme : les Langdon sont tous d’honnêtes travailleurs, surdoués dans tous les domaines, durs à la tâche courageux, réussissant à peu près tout ce qu’ils entreprennent… C’est un peu too much !
A suivre, tout de même, éventuellement.
Liane Moriarty Neuf parfait étrangers ***
LP, 672 pages.
A Tranquillum House neuf personnes viennent s’offrir dix jours de « détox yoga bien être et pleine conscience « une expérience plutôt mouvementée…menée par Malka une femme russe qui a autrefois fait une expérience de mort imminente.
Elle donne à ses pensionnaires « détox » de très bons smoothies ( qu’ils boivent lentement, ils n’ont pas grand-chose d’autre à consommer) mais au bout de quelques jours de « yoga » au clair de lune, méditation, smoothie, et marches dans le parc, ( ennui profond garanti pour moi, mais ils supportent bien) vient une nouvelle séance où Malka a forcé la dose ; l’une des pensionnaire , sage-femme de son état s’écrie « vous nous avez drogués ! »
L’intrigue est bien menée les personnages correctement campés. Mais je trouve qu’après le stage, finalement ils sont tous contents de leur sort, alors que j’espérais une critique de ces stages Détox-Zen et ça semblait parti pour… mais ce n’est finalement pas ce que je croyais…
Reste l’histoire en elle –même, qui divertit, on ne peut le nier…
Petit hôtel dans les Alpes une montagne rebaptisée l’Altefrau, une station thermale en Suisse , V. que je n’arrive pas à identifier avec son pont baroque, son château de S. son eau soufrée son hôtel Majestic…
un abattoir transformé en maison d’habitation, un chien qui mord, les pensionnaires de l’hôtel : Eric et Christine Vasseur ( elle fut danseuse elle n’est plus que femme au foyer surveillée par son mari et déprimée) la narratrice et son Franck de mari qui termine sa thèse interminable ; la patronne qui rêve des Antilles, la serveuse muette et son chignon étrange , le lac ,
l’habitude de regarder ce qui se reflète dans les vitres de toute sorte, ou dans l’eau, notamment d’y observer les gens plutôt que de les regarder en face, et chercher à deviner ceux de leurs mouvements qu’on ne voit pas ; et ce que peuvent signifier leurs expressions,
et le trublion Serge, (un agent du renseignement?) , qui se cache et n’en drague pas moins ces dames...
Beaucoup de citations plutôt bienvenues…une écriture riche comme toujours avec cette auteure, et de l'ambiguité à souhait. J'adore!
S’adresse aux lecteurs qui ont lu, enfants, un certain nombre d’aventures de la série « le Club des Cinq » et s’en souviennent assez bien.
L’auteur imagine le club des cinq se retrouvant quelque quarante ans plus tard (ou moins , cela dépend quand on a cessé de lire leurs aventures …)
François , devenu commissaire de police, est très puritain, il se presse vers le château de Kernach , dans lequel se retrouvaient les cinq en vacances, chez Claude ( la fille qui se faisait passer pour un garçon). Une réunion des "Cinq" devenus adulte est prévue. Sauf le chien Dago, les chiens ne vivent pas trente ou quarante ans...
Claude est devenue scientifique de haut niveau comme son père et vit avec une autre femme ; elle fréquente aussi Jean-Jacques le pêcheur (c’était un personnage récurrent nous dit-on mais je ne m’en souviens pas). Mick est devenu délinquant et il est en couple avec Jo la gitane (je me souviens un peu de Jo mais pour moi ce n’est pas un personnage récurrent). Il y a aussi Pilou ( je n’en ai aucun souvenir) et Annie devenue alcoolique divorcée et nantie d’une fillette …
Cette idée d’avoir transformé ces enfants plutôt bien élevés en losers finis … est plutôt cruelle. Avançant dans le récit on s’aperçoit que les cinq devenus adulte sont hantés, chacun à sa manière, par leur homologues anglais ( le Club des cinq est une traduction des romans d’Enid Blyton « The Famous Five »)
Un retour en arrière nous amène à l’arrêt de la série; les enfants détectives aux prises avec la puberté fut un épisode décisif.
Et maintenant , que va-t-il se passer ?
J'ai trouvé ce récit original mais très très noir!
Me Susane, quarante-deux ans, avocate récemment installée à Bordeaux, reçoit la visite de Gilles Principaux. Elle croit reconnaître en cet homme celui qu’elle a rencontré quand elle avait dix ans, et lui quatorze — mais elle a tout oublié de ce qui s’est réellement passé ce jour-là dans la chambre du jeune garçon. Seule demeure l’évidence éblouissante d’une passion.
Or Gilles Principaux vient voir Me Susane pour qu’elle prenne la défense de sa femme Marlyne, qui a commis un crime atroce…
Qui est, en vérité, Gilles Principaux ?
Bien que le récit soit à la 3 eme personne, il est en focalisation interne, nous ne sortons pas franchement des pensées de Me Susane.
Elle est avocate, chargée de défendre la femme de Gilles Principaux.
Dès que cet homme est entré dans son bureau elle croit le reconnaître : il a changé sa vie l'espace d'un après-midi à l’âge de dix ans, ce qui s’est passé ce jour là elle n’en sait rien , son souvenir globalement flou et précis dans certains détails ( peu éclairants toutefois ) relève du fantasme.
C’était dans « une maison Mauresque « croit se souvenir Mme Susane , sa mère « un Bois lacté » carrément ! le père lui pense que sa fille a passé un mauvais quart d’heure…et ne s'en est jamais remise.
La femme de Principaux a noyé ses trois enfants dans le bain. Pas un seul n’a réussi à s’échapper même l’aîné qui avait six ans. Est-ce qu’elle avait fermé la porte à clé ? me suis-je demandé bêtement, car je me suis imaginé dans la peau de l’enfant qui cherche à sauver sa vie…
et je n’ai pas trop réussi à décoller de cette vision d’horreur. Cette femme, Marlyne, aimait ses enfants et s’en occupait minutieusement, mais « elle aurait préféré ne pas les avoir ». Elle parle de son crime en disant « j’ai posé mon acte » comme si elle devait forcément accomplir cela comme si c’était le destin. Le mari paraît soulagé lui aussi. On devait avoir ces enfants, on devait les tuer, maintenant le pire est arrivé le plus dur est fait… étrange et effrayante famille !
Par ailleurs, Me Susane, (on ne la connaît que sous ce nom bien qu’elle ne soit pas toujours maître ou maîtresse d’elle-même…) s’intéresse à l’avenir de son employée de maison Sharon, venue de l’île Maurice, et sans papiers, dont elle voudrait qu’elle soit régularisée. Elle la paie même si elle ne fait pas le ménage ; les autres employeuses de Sharon sont de méchantes femmes… Me Susane porte à Sharon un intérêt qui va au-delà de ce qu’on attendrait d’une bienfaitrice, et cela gêne la jeune femme.
D’autres personnages font leur apparition, l’ex-compagnon de Me Susane Rudy, et Lila la petite belle fille de Me Susane ; et curieusement Me Susane s’inquiète beaucoup du sort de cette enfant, qu’à vrai dire elle connaît très peu. Elle croit déceler sur son visage son apparence des signes montrant qu’elle est maltraitée (par la méchante mère de Principaux ? qu’elle n’a jamais vue…)
Longtemps après avoir fini la lecture, on ne sait toujours pas quoi penser de ce qu’on a lu. Et pourtant, le talent spécial de Marie N’Diaye fait qu’on imagine très bien les personnages et les situations et qu’on ressent le mal être physique aussi bien que mental, les doutes et les frayeurs de Me Susane. Voire de certains autres personnages… Sans pouvoir en déduire quoi que ce soit…
Le 1er décembre 1969, Teddy, Lincoln et Mickey, étudiants boursiers dans une fac huppée de la côte Est, voient leur destin se jouer en direct à la télévision alors qu'ils assistent, comme des millions d'Américains, au tirage au sort qui déterminera l'ordre d'appel au service militaire de la guerre du Vietnam. Un an et demi plus tard, diplôme en poche, ils passent un dernier week-end ensemble à Martha's Vineyard, dans la maison de vacances de Lincoln, en compagnie de Jacy, le quatrième mousquetaire, l'amie dont ils sont tous les trois fous amoureux.
Septembre 2015. Lincoln s'apprête à vendre la maison, et les trois amis se retrouvent à nouveau sur l'île. A bord du ferry déjà, les souvenirs affluent dans la mémoire de Lincoln, le "beau gosse" devenu agent immobilier et père de famille, dans celle de Teddy, éditeur universitaire toujours en proie à ses crises d'angoisse, et dans celle de Mickey, la forte tête, rockeur invétéré qui débarque sur sa Harley.
Parmi ces souvenirs, celui de Jacy, mystérieusement disparue après leur week-end de 1971.
Martha's Vineyard est une petite île au large de la côte Est des États-Unis, dans le Massachussetts A l'instar de la presqu'île de Cape Cod et de l'île de Nantucket, toutes proches, elle se situe dans un secteur touristique très prisé.
J’ai relu plusieurs fois les 100 premières pages n’arrivant pas à accrocher. Bien que les personnages soient très différents, ce qui ressort de la traduction est plat et ne les met pas en valeur. On se rend compte que Lincoln est très dépendant de sa famille qu’il a laissée pour ce weekend entre amis. Il téléphone tout le temps à sa femme Anita ( ou c’est elle qui appelle) pour raconter le peu qui vient de se passer, des petits détails sans importance !
Ah ces portables, quel esclavage, parfois.
De temps à autre, souvent, il s’imagine son vieux père (90 ans) commentant ses actes et pensées. C’est lourd ! je le plains…
Lincoln est BCBG, et Mickey apparemment est « un musico » qui vit une existence supposée non-conformiste ; et pourtant lui aussi imagine son père commentant ses faits et gestes plus ou moins négativement… Mickey avait tiré un ticket pour le Vietnam, il s’est enfui au Canada pour y échapper… son défunt père ne cesse de le lui reprocher !
Le seul qui n’évoque pas trop ses parents, c’est Teddy, l’éditeur , mais lui est dépendant d’autres personnes notamment son prof de fac à présent décédé…
Et tous trois n’arrêtent pas de penser à Jacy , leur amie d’université, disparue c weekend de 1971, il y a quarante quatre ans ! Ils n’ont pas tourné la page.
Jacy représentait ( et représente toujours) la liberté qu’ils n’ont pas eue, une liberté dont ils rêvent encore, la femme idéale sous la forme d’une jolie fille qui-ne-porte-pas-de soutien-gorge et accessoirement qui ressemble à Audrey Hepburn, .
Elle était des leurs qu’est-ce qui lui est arrivé ? Ils espéraient tous les trois qu’elle était là pour échapper à son fiancé forcément riche et ennuyeux comme ses parents, et qu’elle allait choisir l’un des trois pour commencer une vie exaltante libre de toute contrainte… mais elle a disparu le matin du départ alors qu’ils dormaient encore en laissant un mot d’adieu… le fait que ni ses parent ni son fade fiancé ne l’aient revue non plus n’empêche pas l’amertume.
Lincoln commence à mener une enquête quasi-policière, Teddy revisite le moment délicieux où ils se sont frottés l’un à l’autre , et Mickey, on ne sait trop ce qu’il pense ; Lincoln comprend qu’il sait quelque chose sur cette disparition, mais il préfère interviewer un vrai flic….
Contrairement à sortilège du Cap Cod j’ai réussi à terminer le bouquin. Quelle patience !
Les références musicales ne m’ont pas trop parlé ( je n’ai jamais été très rock…) l’atmosphère m’a paru plombante, les pensées des hommes peu originales, et bien sûr l’histoire est très déprimante. La dernière partie lorsque l’on apprend ce qui est arrivé à Jacy est fort longue et très "mélo" ; je suis sûre que cette histoire aurait pu me plaire, racontée autrement... avec de l'humour noir, de l'originalité.
A l’âge de 13 ans environ, Giovanna entend ses parents se dire à mi-voix que leur fille ressemble à Vittoria, sa tante, la sœur de son père qu’il déteste au point d’avoir noirci son image sur les photos de famille où elle apparaît. Surtout, Giovanna entend dire qu’elle devient « laide » comme cette tante.
Elle va chercher à la connaître ; son père vient d’une famille très modeste, et il a fait beaucoup d’étude, jusqu’à devenir universitaire. La tante Vittoria est restée fidèle au genre de la famille, elle en fait même un peu trop : usage effréné du dialecte napolitain, vulgarité , obscénités… cependant Giovanna va la fréquenter ainsi que la famille de son ex-amant dont elle s’occupe , volant la vedette à al femme légitime.
L’adolescente fait des va-et-vient entre le milieu populaire et le milieu intellectuel, réussissant à vivre pas trop mal dans l’un et l’autre et à y jouer un rôle dominant. En effet les leçons de Vittoria c’est comment résister et prendre le pouvoir. Tout, dans ce roman est une question de rapports de force, que donnent l’autorité personnelle et l’argent, et à la fin du roman, Giovanna n’a que 16 ans mais a du charisme et un fort ascendant sur diverses personnes de son entourage, qu’elle a appris à manipuler , y compris la fameuse tante qu’elle réconcilie avec son père. Une belle réussite pour Giovanna, entourée qu’elle est de gens faibles et superficiels… même son grand amour de Roberto ne me fait pas grand effet… elle n’en fera qu’une bouchée s’il y a une suite !
Un récit très réaliste, qui serait presque balzacien si Elena Ferrante avait plus de souffle…mais son style finit par ennuyer. Le bon point du récit, c’est qu’il ne génère pas d’illusions. Les personnages sont pénibles, voire détestables, l’héroïne y compris… c’est un peu comme dans la vie !
Un matin d’août 1995, Daniel Hardesty, douze ans, et son père Fran, qu’il n’a pas vu beaucoup depuis la séparation de celui-ci d’avec sa mère, prennent la route pour le nord de l’Angleterre. Un road-trip qui représente une chance de resserrer leurs liens.
Fran, qui travaille sur les décors d’une série télévisée, L’Artifex, dont Daniel est fan, lui a promis de lui faire visiter les studios à Leeds. Cependant, plus les kilomètres défilent, plus les mensonges et le désespoir de Fran se dévoilent au grand jour, le poussant à des actes d’une violence inouïe.
Ça commence comme un bon thriller psychologique avec de l’action, mais hélas, on commence à se lasser lorsque Daniel le narrateur nous inflige la lecture de l’Artifex , ce conte pour enfant et nous l’inflige presque totalement ! Nous ne sommes pas des enfants… il aurait pu se contenter d’en donner quelques extraits, courts de préférence…
Mais ce n’est pas le seul défaut ! Le narrateur s’épanche beaucoup trop… perd du temps à nous expliquer ses états d’âme sans que cela soit original, ou simplement apporte des informations supplémentaires. S’en tenir aux faits eût été bien plus productif. Du coup, on lit très vite en diagonale, on passe des pages, et le dernier chapitre consacré à la vie adulte de Daniel est la plus frustrante. D’autant qu’on a compris depuis le début qu’il s’adressait à son fils (présent ou à venir, peu importe…).
L’histoire se déroule sur deux périodes ( trois ans au début des années 80, et environ 1 an de 2017 à 2018. En 1980, Élise jeune fille de vingt ans, serveuse dans un bar à Pimlico et modèle au Royal College of Art, rencontre une femme Constance Holden , au cours d’un promenade à Hamstead Heath. C’est le coup de foudre, pour chacune des deux. Elles entament une liaison.
Constance est romancière ( elle écrit des romans psychologiques ) et Élise en a lu au moins un » Cœur decire » qu’elle a aimé. Le temps passe et Constance va partir à Los Angeles pour participer à l’adaptation cinématographique de son roman ; elle emmène avec elle Élise qui ne travaille plus et vit d’amour mais pas d’eau fraîche ( préférence pour les boissons fortes !).
Là-bas en Californie, la vie luxueuse et artificielle des stars de cinéma déroute Élise et plaît à Constance qui s’entiche de la comédienne Barbara Lowden ( Est-ce Barbara Loden qui a servi de modèle ? On ne saura pas…)
En 2017, Rosie , la fille d’Élise , est avec son papa au bord de la mer, en France. Elle n’en finit pas de s’interroger saur sa mère qu’elle n’a pas connue. Son père lui a dit qu’Élise avait disparu peu après sa naissance à New-York. Il l’ a élevée seul après être retourné en Angleterre. Deux romans de Constance sont découverts par Rosie dont le fameux Cœur de cire. De son père elle apprend que sa mère était proche de Constance ; voulant en savoir plus elle se fait embaucher comme secrétaire de la romancière, se présentant sous un faux nom.
Ce n’est pas, et de loin, le meilleur roman de cette auteure dont j’avais apprécié le Miniaturiste et les Filles au lion. Dès le départ j’ai eu du mal à croire à cette idylle entre les deux femmes. La faute en est à l’écriture vraiment plate, qui multiplie les états d’âme et les explications sans originalité des comportements. L’intrigue est classique et correcte, mais l’inspiration n’y est pas. Je n’ai pas réussi à m‘intéresser aux personnages.L’auteure ne les fait pas exister suffisamment. Même Hamstead Heath elle peine à la faire exister, faute de description un peu originale…
la finale est assez bien menée mais retombe à plat. Un feu d'artifice à la pyrotechnie faiblarde, et sans bouquet final. C’est de la littérature de divertissement, et justement on en attend des surprises des coups de théâtre qui sont ici manqués.
Un étudiant occupant une minuscule chambre à Paris, ne se rend pas à son examen de sociologie qui doit valider sa licence. A partir de ce manquement à ses obligations, il en vient beaucoup d'autres : il ne fait plus rien; rien qui ait un sens en tout cas.
Il s’adresse à lui-même ou à n’importe qui d’autre, à la deuxième personne du singulier. De ce fait, nous sommes censés nous sentir concernés (davantage qu’avec un je ou un il)
Et se sentir concerné c’est pas évident, car le sujet va abandonner toute préoccupation sociale, s’essayer à l’indifférence, par jeu, curiosité, et manque de conviction soudain pour la vie active voire même la vie routinière ; par dépit de son avenir tout tracé ( travail, famille, patrie en quelque sorte) il reste dans sa chambre sa chambre de bonne d’étudiant, ou chez ses parents , il ferait penser à ces jeunes japonais qui ne veulent plus sortir de chez eux ( les hikikomori).
Est-ce une dépression ou profond ras-le bol, ou une expérience ? Les deux semble-t-il. Il vit sa dépression comme une expérience. Pour ne pas trop en souffrir ?
Dès lors son quotidien sera : l’observation des choses autour de lui, choses usuelles, domestiques , sans intérêt, et répétition de ses observations : la fissure au plafond, la bassine de plastique rose avec les chaussettes dedans, le lavabo du palier qui goutte ( mais pas toutes les secondes…)
-l’arpentage de rues parisiennes, en suivant des itinéraires compliqués ou les promenades dans la campagne ( sous-bois ou chemins de terre) plus monotones encore.
-le refus de tout contact social
- des lectures ou des relectures de livres qu’il connaît déjà par cœur, ou du Journal le Monde, en n’exceptant rien , ne choisissant aucun article. Comme il détaille longuement les différentes rubriques, on se rend compte que le Monde a bien changé depuis 1967 !
Dans une seconde partie cette torpeur qui ne le faisait pas souffrir se met à lui causer de la frayeur.
Dans le miroir brisé où il vérifiait l’intégrité de son image corporelle, il commence à moins s’y reconnaître. Surtout, lorsqu’il traîne au lit, dans un demi-sommeil, en divaguant, dans un état d’autohypnose, ses sensations corporelles commencent à lui jouer des tours. L’appréhension qu’il a de son corps se morcèle ; on dirait que des monstres viennent l’assaillir…. C’est comme un trip, acceptable au début, qui dégénère lentement !
Le sujet va finalement céder à l’anxiété laquelle vire à la panique… et revenir à la vie. Il s’intéresse à son voisin de chambre (l’autre) imagine son existence, se demande s’il l’a déjà croisé. Voit les gens dans la rue, des gens marginaux comme lui, et les perçoit de plus en plus proches.
Il agit aussi sur le plan de la raison : son expérience lui a montré que l’indifférence absolue, d’une part est impossible, d’autre part ne mène à rien de plus que de la déréliction, il revient « à lui » ou « au monde » ? Et recommence à éprouver des sensations, et des sentiments. Le premier sentiment qui s’impose à lui à nouveau, on l’a vu, c’est la peur.
Tu as déjà vécu cela ? Mais pas exactement comme lui… et pas décrit de façon aussi complète, scrupuleuse , intelligente…
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Comptes rendus de mes lectures avec des aspects critiques + quelques films de fiction Récits de journées et d'expériences particulières Récits de fiction : nouvelles ; roman à épisodes ; parodies. mail de l'auteur : dominique-jeanne@neuf.fr