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29 octobre 2009 4 29 /10 /octobre /2009 13:21

l-amant-de-Lady-Chatterley.jpgAprès lecture du carnet de la cinéaste Pascale Ferran, dans un vieux numéro des Cahiers du cinéma j’ai eu envie de me replonger dans Lady Chatt, lu à l’adolescence, bien oublié depuis . 


A la Fnac, j’ai opté pour l'édition folio-classique avec une intro du professeur Topia ( André)  qui souhaite expliquer l’intérêt socio-culturel d’un roman qu’il serait injuste de considérer comme une partie de jambes en l’air même fort réussie.

 Il  nous dit entre autre que Lawrence jugeait Jane Austen mesquine et sèche,  et qu’il rêvait de l’Angleterre rurale d’avant l’industrialisation. 


Dans la fusion entre deux être se révèle ce qu’ils ont d’unique, pensait cet idéaliste.


…..

Constance ( Connie) est une fille « libre »: elle va à l'université,  et  son père, un intellectuel, la laisse fréquenter  des jeunes gens à sa guise.  Nous sommes au début du vingtième siècle.


Après une première histoire gentillette avec un musicien, elle rencontre Clifford issu de l’aristocratie rurale, qui n’aime fréquenter que ceux de son groupe, tandis que la citadine Connie, bourgeoisie libérale aisée, jouit d'une grande souplesse de mœurs.


Clifford est dépeint comme un jeune homme désabusé jusqu’au cynisme, trouvant tout «  ridicule » : plusieurs pages sont consacrées au « ridicule » selon Clifford, qui s’enferme dans une nihilisme sommaire. L’amour physique fait également partie des ces activités qu’il trouve grossières, et ne supporte qu’à titre de formalité.


Lorsque ce jeune homme revient de guerre, impuissant et paralytique, Connie est encore jeune et n’a plus rien à vivre d’important avec lui, sauf jouer les infirmières ; ils se déclament du Racine, un auteur, qui, pour Lawrence est conforme aux prédispositions de Clifford, pour qui la jouissance esthétique se trouve dans la pureté et le dépouillement.

Clifford finira par s’inventer des plaisirs de chair avec une Mrs Bolton qui ne le cède en rien à cette Irina Palm qui passa sur les écrans, il ya quelques temps .


Et l’histoire d’amour de Connie avec le garde-chasse ?

Vous l’attendiez ?

C’est un brave homme Mellors, il n’est pas bégueule (vous le saviez déjà ?).

Il se dit de jolies choses sur ce que peuvent éprouver une homme et une femme, dans une relation sexuelle réussie.

 Connie ne savait pas grand chose de ce qu'une relation sexuelle peut provoquer, et  sa découverte du plaisir se fait par étapes, lente mais sûre.

Mais pourquoi faut-il que Mellors qui est apte aux plaisirs charnels soit peu instruit et que Clifford, l’intellectuel, ne soit bon à rien ?

Pourquoi faut-il qu’il déclare sa femme d’une «  race inférieure » parce qu’elle a couché avec un « domestique ».

Qu’est-ce que cette sorte d’intellectuel ?

Tout cela est sous-tendu par une idéologie assez primaire.

L'avis d'Ys qui a trouvé les scènes de sexe ennuyeuses. Je suis assez d'accord!

C'est vrai qu'à présent, on varie davantage les postures et les aventures. Pensez que Connie n'a eu finalement que trois amants ( en comptant son mari et le musicien, j'espère que je n'oublie personne? corrigez-moi au besoin...) , c'est peu pour une jeune femmede trente ans . Ajoutez à cela qu'elle n'a pas essayé l'homosexualité, ni les accessoires érotiques.... !!!
 
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1 octobre 2009 4 01 /10 /octobre /2009 08:37

1ere parution 1885.

 

Etienne Lantier fils de Gervaise ( héroïne de l'Assommoir), arrive à Montsou, une nuit de fin d'hiver,vers 1860, venant de Lille où il a perdu son emploi de machineur pour avoir giflé un chef. Il s'arrête près d'un puits d'où l'on extrait le charbon, pour se chauffer. Il y rencontre le vieux père Maheu que l'on appelle Bonnemort, qui travaille de nuit. Etienne sympathise et se fait embaucher comme mineur, lui qui a toujours travaillé en usine. C'est la fosse du Voreux qui l'accueille : le «  Voreux «  est vorace, il engloutit tous les petits matins une grande quantité de mineurs de huit à soixante ans, pour les envoyer à sept cent mètres sous terre extraire des blocs charbon et les charger dans des wagonnets, pendant dix heures de suite. Il sont payés trente à cinquante sous la quinzaine suivant le rendement.

 

Embauché grâce à Maheu le fils de Bonnemort, Etienne sympathise avec cette famille de sept enfants, qui souffre de malnutrition chronique. Il s'éprend de Catherine la fille de la maison, mais, déjà courtisée par un garçon brutal Chaval,elle n'arrive pas à fair valoir ses sentiments. L'amour est un luxe que ne peuvent se payer les ouvriers ( pas plus que les bourgeois d'ailleurs...).

Etienne est logé à l'auberge du Bon-Joyeux, tenue par Rasseneur, socialiste modéré.Il fait la connaissance de Souvarine, ouvrier Russe anarchiste, qui a fui son pays. Entre les deux, Etienne va affirmer sa conscience politique qui le porte vers le communisme.

Peu de temps après son installation, les mineurs apprennent que leur maigre salaire va être réduit. Etienne cherche à convaincre les mineurs de se mettre en grève. Avec l'aide de Pluchart un ouvrier du Nord, il leur fait créer une caisse de prévoyance, et les fait adhérer à l'Internationale socialiste....

 

 

Cependant Etienne a des adversaires : le directeur de la mine Deneulin, et des petits actionnaires qui vivent du travail des ouvriers. Ainsi que le grand capital,que nul personnage ne représente, notion qui reste abstraite aux ouvriers.

 

Ce roman mérite d'avoir survécu, témoignage inoubliable de la vie et des luttes de classes des mineurs au dix neuvième siècle.

On partage l'existence de ces personnages , on découvre avec effroi ces existences toutes de souffrance.

L'initiation d'Etienne Lantier, pendant son premier jour à la mine nous fait froid dans le dos. Dix heures par jour à sept cent mètres de fond perdus dans des galeries, qui évoquent aussi bien l'antique Labyrinthe, que les feux de l'Enfer, ceci sous la plume inspirée de Zola, nous devenons claustrophobes et étouffons, c'est dire le talent de l'auteur.

 

 

Etienne est un personnage pétri de contradictions comme on les aime : les mineurs sont ses camarades et il partage leur misère de classe sociale incroyablement opprimée; mais il se sent aussi supérieur à eux, rêve d'une carrière politique à Paris, se grise de son pouvoir , d'influencer tant d'hommes …

Des hommes mais aussi des femmes. Lors de la révolte, elles seront les plus actives à l'offensive, et l'un desmoments clef sera peut-être la vengeance sanglante contre l'épicier Maigrat, un commerçant vénal qui donnait quelques provisions aux ménagères et à leurs filles en échange de relations sexuelles.

 

Titre : Germinal est l'un des mois imaginés par les Révoultionnaires de 1992 pour remplacer le calendrier et inaugurer une ère nouvelle.

Mais le peuple de Germinal n'est pas celui de la Révoution française. Ce peuple est devenu le prolétariat, les travailleurs des mines ,des usines et des chantiers, ainsi que l'a transformé la révolution industrielle.

Ce titre peut néanmoins faire penser à un dénouement heureux. L'action a duré un an; Etienne est arrivé fin mars et repart au mois d'avril de l'année suivante, il veut croire que les mineurs sont désormais acquis à la lutte sociale et que la Révolution germe en eux. Je les trouve moi, p)lus démunis qu'auparavant... à vous de voir!

 

 

 

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3 août 2009 1 03 /08 /août /2009 23:10

Vladimir Nabokov Lolita ou la Confession d'un veuf de race blanche

(première publication en 1959)



Ce frisson avant-coureur fut déclenché je ne sais trop comment
par la lecture d'un article de journal
relatant qu'un savant avait réussi, après des mois d'efforts,
à faire esquisser un dessin par
un grand singe du Jardin des Plantes ;
ce fusain, le premier qui eut été exécuté par un animal,
représentait les barreaux de la cage de la pauvre bête. »

(Nabokov, A propos de Lolita)



Comme nous l'annonce le mot mis en exergue, l'amour pour Lolita fut déclenché par cette vision d'un singe qui dessine les barreaux de sa cage.

Ce singe est-il Lolita? Ou est-ce Le narrateur?


Ce roman est présenté comme le récit que fit Humbert Humbert en prison où il attendait d'être jugé pour meurtre. H.H. est bien sûr un pseudonyme.

Celui qui le porte vient de décéder, et , selon son vœu, l'ouvrage peut être publié, Lolita étant morte elle aussi.



La Confession de Humbert est présfacée par un soi-disant docteur en philosophie «  Ray » et suivi d'un «  A propos  de l'auteur de Lolita »


Le Dr Ray donne Lolita comme une leçon de morale;  l'auteur ironisera là-dessus, spécifiant que le Dr Ray représente la «  mauvaise lecture par excellence ». Il insistera lui, sur le «  fait esthétique », que représente son amour pour Lolita...



L'histoire:


La première partie compte 33 chapitres, le dernier compte comme un épilogue.


Humbert s'adresse à ses juges et prétend reconstituer son journal intime, déchiré cinq ans auparavant. Il débute par un récit assez bref de sa vie sur le ton de l'ironie et du sarcasme.

Une vie qui comporte beaucoup d'invraisemblances dans les situations, et des morts violentes.

Malgré tout le narrateur est aussi très fleur bleue, sentimental à l'occasion, analytique dans d'autres cas, (érotique? pas tellement...)  ce qui fait un mélange bizarre.


Suisse franco-anglais, il a rencontré à l'âge de 13 ans Annabelle, aussi jeune que lui, en Italie, en est tombé amoureux, et ils se sont séparés.

Vingt-quatre ans plus tard, Humbert tombe amoureux une seconde fois de Dolorès ( Dolor) qu'il appellera Lolita ou «  ma Lo », lors d'un séjour en Amérique.

Nous sommes en 1947.

Il est professeur de littérature et écrit des manuels de français à l'usage des étudiants anglo-saxons. Il a connu plusieurs dépressions et fréquente des maisons de santé. Il cherche une retraite en Nlle Angleterre, et se sent d'humeur à travailler...

Or, il va hélas, cesser toute activité intellectuelle pour avoir aperçu la fille de sa future logeuse à Ramsdale où on lui propose d'emménager. Humbert constate qu'il plaît à Louise Haze sa logeuse. Ce fait l'insupporte, il  a horreur des femmes faites.

C'est sur une imitation de la Riviera, que Louise Haze la logeuse un peu snob  a posée sur sa pelouse, qu'il voit Lolita ,12 ans ½, nonchalamment allongée.

Il croit revoir Annabelle, son amour de 13 ans «  Annabelle Lee » que Poe chanta.



Il s'explique longuement sur son choix amoureux «  les nymphettes de 9 à 14 ans ». Les filles pépubères, ni complètement petites filles, ni tout à fait adolescentes, avec force références littéraires, et tente de capter le charme qu'elles exercent sur lui. Dante, Virgile, Pétrarque, selon lui,  ont aimé des fillettes et en ont fait leurs inspiratrices ( Béatrice, Didon, Laure).


A cause de Lolita, il emménage dans cette maison, supporte la maman, son club littéraire et ses bavardages, réussit à se satisfaire de Lolita en la touchant à peine. Il détaille une sorte de gymnastique acrobatique incroyable, comico-tragique, à laquelle il se livre, alors que la fillette lui est déjà devenue familière.

Les événements précipitent sa perte, son entrée dans l'illégalité. Lo est envoyée dans un camp de vacances. Pour la revoir, Humbert est contraint d'accepter les avances de sa mère et de l'épouser.

Hélas, la mère veut la mettre en pension. Pire, elle découvre l'agenda secret de son époux. Alors qu'il se croit perdu, assez comiquement, elle se fait écraser par une voiture en traversant la rue.

Nous voyons clairement que l'intrigue n'est qu'un prétexte, mais y prenons goût tout de même.



Le voilà en train de présenter son rival Clare Quilty, auteur dramatique de son âge, qui va aussi s'intéresser à Lolita....


Humbert se rebaptise plaisamment Mr Hyde. Jeune veuf, (il a trente-sept ans) il va retrouver Lolita au camp de vacances, et le périple commence. Il n'osait rien trop lui proposer à « l'hôtel des Chasseurs enchantés », mais elle «  se donne » et n 'était plus vierge. Humbert avait préparé de la drogue pour l'endormir mais n'a pas eu à en faire usage.


La deuxième partie c'est « notre grand voyage à travers les Etats-Unis ( d'aout 47 à 48 et jusqu'en 1952.) La Nlle Angleterre, Le sud, Dixieland, le Pays du coton, les Montagnes Rocheuses, les déserts du sud ( en hiver), la côte Pacifique jusqu'au Canada, l'est jusquà la côte Atlantique, avec pour point de chute le site universitaire de Beardsley où Lo fut à l'école quelque temps.

 

Car " Lolita " c'est aussi et peut-être avant tout, un road-movie très réussi, avec une remarquable course-poursuite...

 



Dans le dernier chapitre Humbert s'adresse à Lo.


L'aventure tourne assez mal.La relation de ce couple un peu spécial évolue vers la séparation.

Le professeur Humbert s'ennuie à mourir avec Lolita, fillette au demeurant assez vulgaire et sans goût pour se cultiver ; il se sent bientôt suivi et remarque que Lo disparaît et revient pour de courtes périodes. Il repère une voiture mais ne pourra empêcher Lolita de lui fausser définitivement compagnie en 1950, lors d'un séjour à l'hôpital.


Deux ans plus tard n'ayant pas trouvé son rival, qui se fait inscrire dans les hôtels sous des noms facétieux, il reçoit une lettre de Lo, mariée et enceinte. Elle a vécu avec Quilty, et s'est sauvée pour échapper à des partouzes. Elle a trouvé un ami de son âge, un ouvrier,l'a épousé...

Humbert va chercher Clarence...


__________________


L'auteur retient ce qu'il y a de pervers dans l'amour, pour à partir de cette perversion, en dégager une transmutation esthétique. De la perversion à l'art s'opère une transformation, qui n'est ni de la sublimation ( Humbert ne renonce pas à la sexualité) ni de l'idéalisation ( il reste cynique et lucide, quoique éperdu d'amour).


Il n'aime pas le Souvenir de Léonard de Freud.

Forcément, car il voudrait que son art soit inné, alors que Freud désignait ,à l'origine des œuvres d'art, des expériences fantasmatiques de l'enfance, que certaines personnes auraient ensuite arrangée de manière à produire une œuvre esthétique.


Nabo nous dit de remarquer le jeu de tennis de Lo . Sa façon de jouer au tennis est « perverse par excellence, » car elle ne cherche pas à atteindre le but fixé par le jeu, ni à marquer des points. C'est même dans cette façon de perdre qu'elle a les poses les plus singulières et les plus esthétiques.


«  Ma Lolita, en arrangeant l'essor ample et ductile du cycle de son service, avait une façon inimitable de lever son genou gauche légèrement plié et pendant une seconde on voyait naître et flotter ans le soleil la trame d'équilibre vital que formaient le bout de ce pied pointé, cette aisselle pure, ce bras poli et brun, sa raquette levée haut en arrière ».


Déesse «  Elle souriait, les dents étincelantes, au petit globe suspendu dans le ciel, au zénith de ce comos puissant et délicat qu'elle avait créé à seule fin de l'abattre d'un coup bref et retentissant de son fléau d'or ».


«  le long essor de la balle, dépourvu d'effet et de mordant »


elle y est toujours gaie ( «  elle l'est si rarement dans sa sombre existence auprès de moi »)


«  Son style de tennis... était au sommet de ce qu'on peut atteindre dans l'art du faux-semblant »

-clarté exquise de ses mouvements

  • contre-partie acoustique dans le claquement de chacun de ses coups.

Lorsqu'il tue Clarence c'est avec un « claquement ridiculement menu et infantile que le coup partit. La longueur du meurtre, le corps à corps dérisoire,le fait qu'il mette Clarence et lui sur le même plan ( un vieux drogué et un pervers au cœur malade) fait penser qu'il tue une mauvaise partie de lui-même, non artistique.


Nabokov cite largement la «  Recherche «  : il est clair que Lolita est une sorte d'Albertine  "je voudrais appeler la dernière partie «  Lolita disparue ».


La conclusion, Nabokov nous la joue « jamesienne » : Lui et Lolita « ce serait la vieille Europe, tendant ses bras fatigués à la Jeune Amérique ».


la « jeune Amérique », Lolita, c'est cette gamine de douze ans, forcée de vivre maritalement avec l'époux de sa défunte mère, puis avec l'homme qui les suivait, espérant être tombée en de meilleures mains; hélas, ce fut pire, et à 17 ans, sans ressources la voilà mariée à un ouvrier de son âge. Et enceinte. Elle se croit enfin tirée d'affaire, et mourra en couches...


Je n'ai pas répondu à la question: Lolita ne fut-elle, en dépit de toutes les grandes théories esthétiques de l'auteur qu'un petit singe que l'on dresse et dont on prend plaisir à voir qu'il sait dessiner les barreur de sa cage? Où est-ce le narrateur qui est prisonnier, et son roman le dessin des barreaux d'une cage?



Lolita a été adaptée au cinéma en 1962, par Stanley Kubrick. Un film critiqué, que, personnellement j'aime beaucoup, au moins autant que le roman. On y voit bien l'évolution de la relation d'Humbert avec l'adolescente qu'il fait passer pour sa fille avec plus ou moins de bonheur, les conflits qui naissent au sein de ce couple, et la composition de Peter Sellars en Quilty est remarquable.


 

 

Pour une autre expérience Nabokovienne, je vous conseille aussi et surtout " La vraie vie de Sébastien Knight" que j'ai chroniquée.


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30 juillet 2009 4 30 /07 /juillet /2009 23:43

Ce roman, l'un des plus réussis de Virginia Woolf, paraît en 1926, entre «  Mrs Dalloway » et «  Orlando » : une période de création féconde mais qui génère chez l'auteur de graves crises de dépression, en particulier lorsque le roman est achevé, paru, et qu'elle ne peut encore se mettre sérieusement au suivant.




La famille Ramsay est en vacances, dans une propriété aux Nlles Hébrides.


L'auteur a pris pour modèle La propriété familiale de St Ives en Cornouailles, lieu de vacances, de la famille de Virginia enfant.


La maison est pleine : Huit enfants (filles et garçons de 6 à 18 ans) Mr Ramsay, prof de littérature à l'université, Mrs Ramsay, ménagère, mère au foyer. Des amis et voisins dont la plus importante est Lily Briscoe , artiste peintre, qui résiste à la tyrannie masculine pour se consacrer à son art.

Elle résiste aussi à la tentation de peindre des sujets à la mode du temps.


Mrs Ramsay est le personnage principal. Qui tient toute la place. Qui est reflétée et digérée par chacun des autres protagonistes. Qui ne vit que d'être irremplaçable. Rien ne doit se faire dans la maison ni au village sans qu'elle n'y joue un rôle central, négatif ou positif. Elle ne perd jamais des yeux un membre de la famille ni un objet de la maison

Le petit James, 6 ans, est couvé par sa mère, déteste M. Ramsay, écrivain présenté comme dominateur, intellectuel.

Le Phare brille tous les soirs, présence inaccessible. La promenade dont il est question dans le titre est toujours remise au lendemain pour des raisons fallacieuses. En fait, on sent que le phare doit rester loin et que la maison ne doit pas être désertée...

  1. Mr Ramsay a un admirateur, Charles Tansley, l'équivalent d'un jeune normalien en France, et William Banks un collègue sans enfant qui le critique d'avoir une si nombreuse famille, mais le jalouse en même temps. Le troisième allié est M. Carmichael, poète. 

Mrs Ramsay doute de son mari. Il aurait déjà écrit tout ce qui était important pour renouveler la philosophie de son temps, et son prestige actuel serait dû à ce passé. Il a écrit un nouveau livre mais il se répète et il le sait. Sa femme doit le réconforter le soir, et lui répéter qu'il est l'un des plus grands esprits de sa génération, tout en lisant à James le « conte du pêcheur ».


En réalité ce que ressent Mr. Ramsay, c'est une impression d'étrangeté, entre l'univers culturel où il vit en pensée, et la retombée subite au milieu de de sa vie de famille, des êtres qui lui sont chers, mais qu'il n'appréhende que de loin. Sa citation préférée est le letmotiv du roman: «  Nous pérîmes chacun tout seul » allusion à un naufrage décrit par Tennyson. La phrase deviendra obsédante dans la dernière partie de l'ouvrage.


La partie I, pendant laquelle nous pénétrons dans la conscience des différents personnages, se déroule pendant une après-midi et une soirée d'été, incluant le repas du soir qui représente un chapitre particulier.


Après ce repas, Mrs Ramsay a réussi à persuader Paul Raylay, un jeune homme qu'elle considère comme un simple d'esprit, d'épouser Minta Doyle, une jeune femme de 24 ans, dont elle craint qu'il ne plaise à son mari.



La partie 2 s'intitule «  Le Temps qui passe ». On relate une période de dix ans, probablement de 1913 à 1923: la grande guerre de 14-18 y est mentionnée, ainsi que la vie de la famille et celle de la maison de vacance : personne n'y vient plus et l'endroit se détériore plus ou moins malgré les soins d'une femme de service, Mrs Mc Nab.

La description de cette maison vide qui attend en vain que ses habitants viennent l'animer est déchirante, surtout dans les détails : la châle vert de Mrs Ramsay autour de la tête de sanglier qui plaisait à James, mais effrayait Cam, est finalement emporté par le vent en plusieurs phases.

Les lectures de jeunesse de Mr Ramsay ( Walter Scott) auxquels il tenait tant moisissent sur les rayonnages.

La vaisselle en porcelaine finit par se briser à cause des tempêtes.... la maison se désincarne, les tempêtes la font grincer et gémir , elle se plaint. Nous apprenons incidemment que les Ramsay ont connu des deuils : Mrs Ramsay est morte «  brusquement » annonce la femme de service, et Prue ( la plus jolie des quatre filles) à peine mariée, a succombé à son premier accouchement.

Andrew, le plus intelligent des quatre garçons, est tué à la guerre, des morts violentes, qui reviennent en écho dans les pensées des personnages restant, dans la troisième partie.


La partie III ,le Phare : Dix ans plus tard, Mr Ramsay n'a rien de plus pressé que de conduire James et Cam au phare, promenade que James désirait tant dix ans plus tôt, et qu'il n'a pas obtenue.

En souvenir de Mrs Ramsay, James et sa soeur, maintenant adolescents, vont pouvoir se rendre au Phare.

Et maintenant, ils s'en fichent mais tant pis!

James hait toujours son père, et imagine souvent lui planter un couteau dans le coeur, mais, durant cette traversée, il ne saura pas résister à un compliment,  lui disant qu'il conduit fort bien le voilier. Ce qui amuse Cam, la jeune soeur...

Cam s'ennuie, et James peste contre son père, qui essaie maladroitement de dialoguer avec eux.


Restée à terre, Lily recommence la toile inchevée dix ans auparavant, de la maison, sa façade, ses haies, le jardin, Mrs Ramsay et James dans un coin( «  le triangle violet ») .

Lily ne vit pas de sa peinture. Sa toile sera « roulée sous un lit ou accrochée dans le grenier »

Cependant son souci est d'équilibrer les masses d'ombre et de lumière. Elle doit représenter l'absence et la présence de Mrs Ramsay dans le trait blanc qu'elle trace au milieu des courbes qui figurent la maison et tendent vers un centre qui est vide : elle sait enfin quoi y mettre...

 


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27 juin 2009 6 27 /06 /juin /2009 14:05

Sa majesté des mouches... 


Il n'y a pas de fille dans le roman.


Lorsque Jack devient chasseur, il ne ramène le gibier à aucune femme, et aucun père ne le félicite.


Les partisans de la civilisation (Ralph et Piggy) entretiennent le feu de l'espoir, celui qui sert de langage, mais les amis du jeune chasseur Jack, se comportent comme s'ils avaient inventé le feu, et Ralph et Piggy comme s'ils l'avaient volé.


D'ailleurs c'est le feu, qui, en incendiant l'île, finira par donner l'alerte, le feu devenu une parole gigantesque, un appel au secours et une destruction.


Les enfants sont orphelins ; la mère, c'est cette truie dont ils viennent adorer la tête,déjà pourrissante,  et que l'on appelle Lord Of The Flies (il s'agit d'une femelle dans la version française mais en anglais c'est " Lord" ), et qui donne son titre dérisoire au roman.


Simon, le gamin contemplatif et inquiet, se demande si elle vit.

C'est lui aussi qui découvre que la bête effrayante, le fantôme sur la montagne, ce n'est que les restes d'un des pilotes de l'avion, engoncé dans son parachute et qui se ballotte au gré du vent , alors que son parachute est pris dans un arbre.

Ce parachutiste symbolise tout ce qui reste du père...

Simon est le premier des enfants à être éliminé.


Piggy, le second, parce qu'il réfléchit. Il n'a pas de nom, juste un pseudonyme, et ce pseudo évoque fâcheusement l'animal tué.


Ralph pourrait être éliminé parce qu'il sait parler. Son meeting avec le coquillage «  la conque » qui leur sert de micro est digne d'un petit Moïse au Sinaï.


Finalement, je trouve que ce roman qui m'avait frappée il y a très longtemps ( et dont j'avais " récupéré" les personnages pour en faire des histoires de mon cru) a résisté au temps.

Je l'aime encore!


Si je vous disais que j'étais très attachée à ces garçons vous ne me croiriez pas et pourtant...


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21 février 2009 6 21 /02 /février /2009 11:30

 

Né à Coat-Congar près de Morlaix en Juillet 1845, il est le fils d'Edouard Corbière, romancier auteur de romans maritimes bretons ( le Négrier) et capitaine au long cours.

Sa mère s'appelle Aspasie Corbière-père l'a ramenée de ses voyages. Lors de la naissance, Aspasie a 18 ans et Edouard, 50. Ni l'un ni l'autre ne sont bretons d'origine,  contrairement à la légende du «poète breton » que Verlaine inventa.


Toutefois,  Joachim-Edouard Corbière ( Tristan est un pseudo qu'il s'est choisi) vivra à St Brieuc et à Roscoff, y prendra goût, et adore aller en mer. Breton de coeur, c'est parfois mieux que d'origine.

 Malade dès l'enfance, Tristan fait quelques voyages, et  vivra aussi en Italie, à Capri, où il noue une relation avec une femme qu'il nomme «  Marcelle » dans son recueil, une passion non payée de retour. Ses dernières années, il les vit à Paris, avec ladite Marcelle et Rodolphe( l'ami attitré de cette femme), une existence de bohème riche, mais toujours malade, de plus en plus. Il meurt en 1875, il n'a pas encore trente ans. On ne sait pas bien de quoi il souffrait, mais ce mal semble avoir été physique avant tout.


Il publie son recueil  à compte d'auteur en 1873 + neuf poèmes dans « La Vie parisienne ».La Saison en enfer de Rimbaud vit le jour la même année,mais les deux poètes ne se connaissaient pas.

Corbière semble avoir souffert  moralement à cause de sa maladie physique.

En 1884, Verlaine consacre trois articles à Corbière dans son recueil «  les Poètes maudits ». Huysmans y fera allusion dans A rebours. Les Amours jaunes seront réédités en 1891.


Ce recueil de poèmes est profondément désenchanté. La facture classique y est constamment pastichée, ainsi que la manière des grands auteurs tels La Fontaine, Hugo, Lamartine, Malherbe.

Corbière use de la langue d'une façon très libre : onomatopées mots latins anglais italiens espagnols. Il abandonne la ponctuation dans «  cris d'aveugles », coupe les mots vers la fin des vers. Mais dans d'autres pièces il use de nombreuses fois du tiret et du point de suspension.

La typographie est  variée : italiques, majuscules fréquentes.


On pourrait croire que l'œuvre manque d'apprêt de polissage, que le rythme est resté heurté et brut, avant que le poète ait eu le temps de terminer. Mais bien sûr il s'agit d'un choix délibéré.

Le premier jet serait un vers relativement harmonieux et régulier qu'il s'emploie à désarticuler, à bousculer les césures, multiplier les arrêts brusques, proscrivant tout ce qui pourrait engendrer une musicalité.


Les surréalistes aimèrent beaucoup Corbière, et tenaient la « Litanie du sommeil » (véritable bréviaire pour les insomniaques)  pour un exemple d'écriture automatique.

 Personnellement, je ne crois pas que l'écriture automatique puisse rendre aussi bien sur un poème long.


Adolescente, j'ai été immédiatement attirée par le côté antipoésie, anti-lyrisme, vers en miettes, présentation de l'existence comme  survie et provocation. On peut trouver Corbière grinçant et disharmonieux, voire dérisoire, moi je le trouve pathétique et maniant l'humour noir en maître.


Le crapaud:


Un chant dans une nuit sans air...
La lune plaque en métal clair
Les découpures du vert sombre.

...Un chant ; comme un écho, tout vif
Enterré, là, sous le massif...
-Ca se tait : Viens, c'est là, dans l'ombre...

-Un crapaud!-Pourquoi cette peur,
Près de moi, ton soldat fidèle !
Vois-le, poète tondu, sans aile,
Rossignol de la boue...-Horreur !-

...Il chante.-Horreur !!-Horreur pourquoi ?
Vois-tu pas son oeil de lumière...
Non : il s'en va, froid, sous sa pierre.

.................................................................
Bonsoir-ce crapaud-là c'est moi.


crapaud

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12 décembre 2008 5 12 /12 /décembre /2008 00:44

Dès ma première lecture au début des années 70,  j'ai aimé Julien Sorel ! Et plus encore , le ton vif de ce roman et  la façon dont Stendahl nous mène de surprise en surprise.

Voilà une passion qui perdure...

L'imprévisibilité des actions ou réactions de Julien donnent du piquant au récit. Et l'on se laisse mener en bateau.

Je ne mets aucune image, car Julien n'a pas pour moi l'apparence des comédiens qui l'ont  incarné, des films que je n'ai pas vus, et ne souhaite pas voir le moins du monde.



En   1825 à Verrières dans le Jura. M. de Rénal, maire de cette petite ville » qui peut passer pour l'une des plus jolies de la Franche-Comté », est jaloux de son voisin Valenod qui vient de s'acheter une nouvelle voiture. Pour faire bonne figure, il décide d'engager un précepteur pour ses garçons. Ce sera moins coûteux que la bagnole et plus distingué.

Il choisit Julien Sorel, dix-neuf ans, fils d'un charpentier, car ce garçon a été éduqué par l'abbé Chélan et on dit qu'il sait le latin.

Julien est fan de Napoléon, mais pour s'élever socialement il lui faut devenir prêtre.

 Engagé comme précepteur, il pense que ce serait utile, pour aider à sa carrière, de séduire la maîtresse de maison. Mme de Rénal en est  tombée amoureuse aussitôt vu, et  elle ne lui est pas indifférente même s'il ne se l'avoue pas. les voilà bientôt amants ce qui donne à Julien l'occasion de s'investir dans l'amour, sans renoncer à son ambition.

Une femme de chambre jalouse, vend la mèche. Julien doit fuir. Grâce à l'abbé Chélan, il est admis au séminaire de Besançon, se fait aimer de l'abbé Pirard, et détester de l'abbé Frilair .


Lorsque Pirard s'en va à Paris, il recommande Julien au marquis de la Môle. Il fait l'apprentissage des mondanités à Paris dans les salons du marquis. Mathilde, fille de cet homme, a dix-neuf ans et Julien un peu plus de vingt. « Elle rêve d'un grand amour exotique » comme dit la chanson. Exotique et tragique, comme son ancêtre Boniface, amant de Marguerite de Navarre, la célèbre conteuse.

Julien est «  exotique » parce que roturier et venant de la province. Il est aussi plus instruit que les jeunes nobles qui fréquentent le salon. Mais, alors qu'ils sont devenus amants, Mathilde fait souffrir Julien en feignant de s'éloigner de lui.  L'amour entier et naïf de Louise de Rênal ne l'avait pas accoutumé à ces cruautés. Il entre dans le jeu, se venge, en écrivant des lettres d'amour à une autre femme, et en le faisant savoir. Par la même occasion il prépare un complot » ultra » à Strasbourg pour le compte du marquis.

De retour à Paris, on apprend que Mathilde est enceinte et veut épouser Julien. Le marquis finit par s'y résoudre et donne à Julien un titre de noblesse et une rente. Le jeune homme est content.

Louise a appris tout cela. Jalouse, elle envoie un courrier au marquis pour discréditer son ex-amant. Pris de folie, Julien se rend à Verrières, et tire sur Louise pendant la messe.

C'était aussi à la messe qu'il l'avait vue pour la première fois.


Il est incarcéré à Besançon. Louise vient le voir, la passion renaît entre eux. En  prison, Julien se réconcilie même avec son père l'avare charpentier. Le jugement venu il plaide coupable, prétend avoir prémédité son acte. Il prononce un discours dans lequel il explique qu'il est un paysan ayant voulu s'élever au-dessus de sa condition et met en accusation les hypocrisies de la bourgeoisie et de la noblesse. Devenu lucide, il ne peut envisager autre chose que la mort, et s'en va sans vrai regret. 

Mathilde s'empare de sa tête pour aller l'ensevelir elle-même, toujours fidèle à ce que fit Marguerite de Navarre pour son ancêtre Boniface...

On pense à Salomé avec entre les mains la tête du Baptiste, mais aussi à l'histoire contée dans le Décaméron, de la femme dont le mari avait décapité son amant et lui avait offert la tête. Qu'elle conserva dans un pot où elle avait planté du basilic... Là je m'égare... ! 

______________________________________________________


Julien Sorel , donc "arriviste" et naïf, découvre progressivement d'autres valeurs que l'ambition  et la satisfaction de l'amour propre :  le plaisir d'un amour partagé. De 19 à 25 ans il fait l'apprentissage de la vie : Verrières, le Séminaire, l'hôtel de La Mole, la prison.La mort ne signifie pas son échec. Georgy Luças appelle dans la Théorie du roman ce type de personnage «  l'idéaliste abstrait ».

 

Les femmes du roman :

Je pense que Julien n'aurait pu vivre avec Louise ( ennui prévisible) ni avec Mathilde ( problème de classe sociale).


Maintenant, je trouve que Louise et Mathilde sont deux figure féminines sans grande surprise par rapport à leur rôle social. Elles servent surtout à mon sens de faire-valoir à Julien. Mathilde est un peu plus complexe et plus intéressante. Au contraire, dans la Chartreuse, Gina  est un personnage aussi solide que Fabrice.  Je n'arrive plus à croire que Julien soit réellement amoureux de Mme de Rénal...!

D'ailleurs il s'agit plus de « la joie de posséder, lui, pauvre être malheureux, si méprisé , une femme aussi noble et aussi belle que Mme de rénal »


«  Cette éducation de l'amour donnée par une femme extrêmement ignorante, fut un bonheur ».



A la fin il éprouve de la jouissance, davantage que le goût de posséder qu'il n'a plus.


Mathilde est la femme qui sert ses ambitions et assure sa descendance. Elle est utile, elle a été agréable. 


L'aspect social du roman est loin d'être à dédaigner.


Les écclésiastiques : l'abbé Chélan est un brave homme, Frilair un dangereux Tartuffe, Pirard un intellectuel janséniste.


Il y a la Congrégation, organisation de surveillance et ses espions qui contrôlent l'opinion, s'immiscent dans la vie privée et destituent Chélan, Pirard et même M. de Rénal trop «  timide », quoique royaliste convaincu. Je dois dire que cet aspect-là m'avait totalement échappé autrefois.


Les nobles : le marquis de la Mole est juste un politicien sans scrupule, le comte Altamira a du cœur, le comte Chalvet de l'esprit. A Paris, l'aristocratie est la sur vivance de l'Ancien Régime. Ils fomentent un complot « ultra «  contre la monarchie du roi-bourgeois, et échouent, pas étonnant car ils ne savent vivre que de mondanités.


Les bourgeois : Valenod est une vraie crapule, M. de Rénal asservi à l'opinion est faible, trop tiède pour cette société de rapaces.


La   société offre ses bienfaits aux arrivistes sans scrupules dont Valenod, et aux hypocrites. Valenod est le gagnant de cette histoire comme l'est Homais dans Bovary...


C'est un roman qui semble s'achever en apothéose. Julien  a tout  réussi. Même à se réconcilier avec son père et sa classe sociale dont il finit par parler avec la distance suffisante mais sans rancœur. Pourquoi cette distance ? parce que Julien, le roman le laisse entendre, n'est peut-être pas le fils de son père. Dès le départ il est différent. il ne cherche pas à gommer cette singularité, il veut la  réaliser pleinement. Il a compris à la fin que ce vieux connard de Sorel l'y a aidé, même si c'était par avarice. Il fait peur au maire et exige que Julien  ne soit pas traité comme un domestique. Dans le fond il respecte ce garçon et lui trouve de la valeur même si cette valeur est surtout à ses yeux marchande.

Et l'on se rend bien compte qu'être différent, ce n'est pas renier sa naissance, ni sa culture, et pas davantage les  accepter. Etre différent, c'est assumer une situation impossible... Impossible aussi pour Julien de vivre la vie des bourgeois ou celle des aristocrates.

«  Je ne suis pas jugé par mes pairs ; je ne vois aucun paysan enrichi dans la tribune. Rien que des bourgeois ».

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27 juillet 2008 7 27 /07 /juillet /2008 09:20

La Princesse de Clèves (1678)

Editions Librio, 2 euros.

C'est un roman historique dont l'intrigue se situe à  la cour d'Henri II, dans les dernières années de ce règne. (1555 à 1559), donc un siècle avant sa parution. Il paraît sans nom d'auteur. Aujourd'hui, on pense que ce roman est autant le fait de Mme de Lafayette, que de ses amis, dont La Rochefoucauld, pour ne citer que le plus illustre. 

 

L'auteure décrit tout d'abord les mœurs de cette société aristocratique préoccupée d'amour, de fête, de plaisirs, à l'image de son roi, un peu écervelé.

 

Nous avons là quelques pages où se succèdent des noms de nobles et des descriptions dithyrambiques

" esprit vif et éloquence admirable... âme noble et élevée... égale capacité pour la guerre... ambition démesurée... vie glorieuse... dispositions pour les belles choses..."

tous ces compliments n'étant là que pour introduire  le duc de Nemours :

" ce prince était un chef d'oeuvre de la nature ; ce qu'il avait de moins admirable, c'était d'être l'homme du monde le mieux fait et le plus beau. Ce qui le mettait au-dessus des autres était une valeur incomparable, et un agrément dans son esprit, dans son visage et dans ses actions que l'on n'a jamais vu qu'à lui seul..." 

Cette description typique des coutumes lexicales littéraires de ce que l'on nomme le Grand siècle, peut nous paraître bien abstraite! Ayant lu ce qui précéde, nous ne savons toujours rien de l'apparence physique de Nemours, de ses particularités. Nous n'avons que des superlatifs.

 

Cela vient en partie du fait que Mme de Lafayette a pris des leçons de "préciosité" . La littérature des " Précieux" veut enrichir le langage en l'épurant.

 

Le lecteur doit imaginer Nemours  conforme à son idéal  personnel de beauté masculine, en y mêlant   un habillage  de ce qu'il connaît et préfère des accoutrements de ce temps, tels qu'il a pu les admirer en regardant des tableaux de peinture, ou des films en costume d'époque.

Si le lecteur ne fait pas cet effort, il risque de lâcher le livre...

 

Le récit se concentre sur les personnages autour desquels va se nouer l'intrigue : le duc de Nemours, le prince de Clèves, et Mlle de Chartres, bientôt Mme de Clèves, soit l'amant, le mari, et la femme, trio bien connu des intrigues romanesques...

 

A cause de conflits opposant Catherine de Médicis (femme du roi, future régente) à Marie Stuart ( sa belle-fille) et à Diane de Poitiers( maîtresse du roi), Mme de Chartres craint de ne pouvoir faire épouser à sa fille un prince de sang. Tous  les prétendants se retirent, pour ne pas déplaire au roi. Reste M. de Clèves, qui passe outre, parce qu'il est amoureux de la  jeune fille (elle a 16ans). Elle l'estime mais ne partage pas son inclination.

Alors .... Alors l'irrésistible séducteur, le « chef d'œuvre de la nature », le Duc de Nemours, le Duc, regagne la cour et y rencontre la nouvelle Mme de Clèves, au cours d'un bal. Ils s'éprennent l'un de l'autre. Mais Mme de Clèves dissimule son sentiment. Sa mère l'a mise en garde : Nemours a un passé de séducteur impénitent et,  présentement, vise le cœur d'Elisabeth, nouvelle reine d'Angleterre. (Il s'agit d'Elisabeth 1ere, qui eut de nombreux prétendants, mais n'épousa personne..)

 

Mme de Clèves et Nemours ont l'occasion de se voir chez la reine Dauphine (Marie Stuart, même âge que Mme de Clèves). Nemours se comporte avec discrétion, renonce à la galanterie.

Une sorte de jeu secret commence entre les deux «  amants »  qui se font des signes pour s'assurer de leur mutuelle inclination. Nemours ignore, ou feint d'ignorer, que sa passion est payée de retour. 

Mme de Clèves est culpabilisée par son entourage.

Sa mère décède.

 

II

Son mari lui conte l'histoire d'une « perfide » qui avait promis son cœur à deux hommes; cette histoire édifiante semble longue à Mme de Clèves comme au lecteur : la conversation d'un mari n'est pas toujours excitante...

Mais voilà que la reine Dauphine lui fait savoir que Nemours semble profondément amoureux d'une femme qui ne le lui rend pas.

Et  Nemours trouve l'occasion de se déclarer, entre les lignes !

- les grandes afflictions et les passions violentes repartit M. de Nemours, font de grands changements dans l'esprit : et, pour moi, je ne me reconnais pas depuis que je suis revenu de Flandre...et même Mme la Dauphine m'en parlait encore hier.

Mme de Clèves approuve...l'air de rien.

- Je ne suis pas fâché, madame, répliqua M.de Nemours, qu'elle s'en soit aperçue ; mais je voudrais qu'elle ne fût pas la seule à s'en apercevoir. Il y a des personnes à qui on n'ose donner d'autres marques de la passion qu'on a pour elles que par les choses qui ne les regardent point ; et, n'osant leur faire paraître qu'on les aime, on voudrait du moins qu'elles vissent que l'on ne veut être aimé de personne. L'on voudrait qu'elles sussent qu'il n'y a point de beauté, dans quelque rang qu'elle pût être, que l'on ne regardât avec indifférence, et qu'il n'y a point la couronne que l'on voulût acheter au prix de ne les voir jamais.

 

Admirez  les imparfaits du subjonctif qui pointent le bout de leur nez sur ce blog aux frais de la Princesse.  Puis toutes les complétives que qu',et  les relatives...

 

Les femmes jugent d'ordinaire de la passion qu'on a pour elles,  continua t-il par le soin qu'on prend de leur plaire et de les chercher; mais ce n'est pas une chose difficile pour peu qu'elles soient aimables ; ce qui est difficile c'est de ne pas s'abandonner au plaisir des les suivre... c'est de les éviter... et ce qui marque encore mieux un véritable attachement , c'est de devenir entièrement opposé à ce que l'on était, et  de n'avoir plus d'ambition, ni de plaisir, après avoir été toute sa vie, occupé de l'un et de l'autre...

Nous avons là l'énoncé du béaba de la séduction : pour plaire il faut se faire désirer, donc feindre de n'éprouver rien pour la personne que l'on aime, et même en cas de rapprochement intime avéré, prendre soin de n'être jamais complètement disponible. L'autre vous désire pour autant que vous n'êtes pas tout (e) à lui ou à elle.

 

Mais le Duc  ajoute qu'en réalité, il a renoncé à toute autre femme pour elle, Mme de Clèves, dont nous ne connaîtrons pas le prénom...ici des prénoms, il n'y en a pas.

 

Pour fuir sa passion, la princesse se retire à la campagne et vit en recluse.  Son mari l'oblige à revenir à la cour. Nemours dérobe un portrait d'elle chez la Reine Dauphine ; il se blesse au jeu de paume et cette fois elle ne peut cacher son émotion.

 

Autre source de tourment : la lettre tombée de la poche de Nemours, apparemment adressée à une femme ! Nemours se justifie : c'était une lettre pour le vidame de Chartres, amant de Catherine de Médicis (cela ne veut pas dire qu'ils entretenaient un commerce charnel) et qui craignait sa fureur car il l'avait trompée.  Le Vidame ayant demandé à Nemours de le couvrir, la lettre devait feindre de lui être destinée...

Mme de Clèves et Nemours écrivent ensemble une lettre de substitution. Moments délicieux...

 

Pourtant Mme de Clèves se retire à Coulommiers. Nemours trouve un prétexte pour s'y rendre au cours d'une partie de chasse.

Il s'introduit dans le pavillon et assiste à l'aveu de son amante à M. de Clèves. Nemours l'entend lui dire je suis courtisée par un autre, et j'ai de l'inclination pour lui, mais je ne réponds pas à ses avances.

La Princesse  se donne des verges pour se faire battre...

 

M. de Clèves, qu'elle a rendu jaloux, espionne, et découvre qui est son rival. Nemours se confie au vidame sans dire le nom de son objet d'amour. On en parle à la cour. Les de Clèves s'accusent mutuellement de ces bruits. 

Survient la mort d'Henri II  suite à un duel : il avait fort stupidement forcé Gabriel de Montmorency à se battre contre lui, par jeu.

 

François II monte sur le trône de France. Catherine assure la régence.

Mme de Clèves se retire à Coulommiers, se querelle avec son mari. Nemours s'y rend à nouveau, suivi par un espion du prince. Après un parcours d'obstacles , il voit Mme de Clèves, sans être vu, et «  a des preuves de son amour ».

Elle ne pense qu'à lui, croit le voir, ne lui fait pas signe, s'agite, ferme ses volets.  C'est la deuxième fois qu'il la contemple et s'imagine on ne sait quoi,  sans être vu.

Le Duc est un "voyeur" avant tout.

Informé par son espion, M. de Clèves croit que sa femme l'a trahi, tombe malade et meurt.

Nemours demande en mariage cette jeune veuve de vingt ans. Elle refuse, persuadée que si elle lui accorde tant, il se détournera d'elle. Elle lui dit seulement «  devoir se retirer au monastère par devoir envers le défunt et pour son repos personnel". Et elle entre au couvent et n'en sort plus!

Cette chute est quelque peu invraisemblable; tout comme l'est le récit que Mme de Clèves fit à son époux de sa passion pour un autre que lui...si un homme que vous aimez ,déclare éprouver la même chose, et vous propose de vivre avec lui, allez-vous refuser, sous prétexte que cela risque de ne pas durer???

Il faut croire que La princesse de Clèves était littéralement dévorée par la culpabilité.  Cela explique son comportement névrotique à l'excès. La pauvre jeune femme renonce une deuxième fois au peu de bonheur qu'elle pouvait espérer sur terre.

Une fin bien triste.

 

 




 

 
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30 mai 2008 5 30 /05 /mai /2008 23:58

 


Paru d'abord sous forme de feuilleton en 1895, Jude l'Obscur fit par sa façon franche de traiter des mœurs dans la campagne anglaise de la fin du siècle.

 


Jude Fawley est  orphelin et a dû travailler très tôt dans sa vie. Il livre tous les jours le pain de sa tante la boulangère en échange du gîte et du couvert. Mais il rêve de faire des études, de devenir enseignant écrivant ou chercheur. Lorsque débute le roman, l'instituteur Phillotson, va quitter la petite ville, et s'il avait été sincère, il aurait dû emmener Jude avec lui, connaissant ses aptitudes et ses ambitions. Mais il s'en fiche, admettra seulement de lui expédier des grammaires grecques et latines. Jude  apprendra seul en travaillant. A dix-huit ans, il part à pied pour Christminster (Oxford) après un mariage raté avec une paysanne qui a feint d'être enceinte de lui, Arabelle. Il a appris un métier : tailleur de pierre et s'est beaucoup instruit en autodidacte.

Mais à Christminster, il vit de son métier et ne trouve aucune embauche dans les milieux intellectuels. Les professeurs l'envoient promener en lui enjoignant de rester dans sa classe sociale (le monde ouvrier et artisan).

Jude rencontre sa cousine Sue, elle aussi en mauvaise posture. Elle a quitté ses parents qui ne pourvoient pas à ses besoins. Elle aussi est cultivée et pauvre.  Jude est épris d'elle depuis l'enfance et rêvait à partir de sa photographie.

Sue intègre une école d'institutrices, mais elle est trop libre de pensée et de caractère pour le supporter et s'enfuit. Quoique Jude et elle s'entendent bien, elle ne veut pas lui céder, soit par frigidité, soit pour d'autres mystérieuses raisons. Elle se résout à épouser l'instituteur, qui n'avait guère aidé Jude et qui sera décidément son rival....

Mais la vie conjugale avec cet homme lui répugne et elle s'enfuit encore, se met en ménage avec Jude. «La guerre terrible qui se livre entre la chair et l'esprit»

N'ayant pu vivre de leur  intelligence , ils végètent, font de petits jobs. Malgré leurs connaissances,  ils laissent venir les naissances inconsidérément. Jude doit récupérer le fils d'Arabelle, dont elle prétend qu'il est le sien. Ce petit garçon est  gravement perturbé et se suicide entrainant ses frères dans la mort. Le ménage n'était pas heureux, il explose, et Sue retourne avec M. Phillotson.

 Jude est atteint de tuberculose et  agonit seul dans la maison d'Arabelle, en prononçant des paroles désespérées du Livre de Job en guise d'excipit....






Jude l'obscur est un roman unique :

Thomas Hardy  écrivait dans son journal : «  ce sera une nouvelle sur un jeune homme qui n'a pu aller à Oxford. Ses efforts, son échec.» Hardy estime que «le monde doit savoir» quelles difficultés rencontrent les non-privilégiés pour s'instruire - l'ultime ambition de Jude.

L'auteur  veut aussi contester  les lois sur le mariage, qui «constituent la machinerie tragique de l'histoire».

Effectivement, traiter un tel sujet à l'époque, et avoir des revendications aussi radicales, c'est tout à fait remarquable.

Thomas Hardy n'a pourtant pas complètement réussi son roman. Il tourne au mélodrame : le nombre de pépins qui pleuvent sur les héros finit par agacer et nuit à la vraisemblance. 

Le retour d'Arabelle l'épouse de Jude et ce petit garçon  dont les  penchants sont  tellement destructeurs sont en trop. Le mariage avec Arabelle, tôt dans le roman, m'ennuie.   On a peine à croire que Jude la prenne au sérieus,  se contraigne à l'épouser. Il ne convient pas au roman qu'il soit à ce point naïf. On ne saisit pas très bien non plus pourquoi Jude et Sue, qui sont tout de même des esprits éclairés, enchaînent les naissances non désirées dès lors qu'ils se sont mis en ménage... !

Malgré ces imperfections, Jude l'Obscur reste un roman cher à mon cœur.


Le personnage de Sue est plus intéressant que ses homologues françaises tels que la Marie de l'Education sentimentale, ou encore  Louise de Rênal et Mathile de la Mole dans le Rouge et le noir, deux romans par ailleurs tout à fait bons...  Les romanciers français du 19eme siècle ( pour ne pas parler du 20eme...)  ne mettent en scène que des femmes incultes, tout juste bonnes à tomber amoureuses, faire des dettes,  et/ou à intriguer. Il faut lire les pages où Jude et sa cousine ont des conversations sur la littérature et la société.... !   




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30 mai 2008 5 30 /05 /mai /2008 19:57

 

« Plume » est un recueil de récits qui prend la suite des poèmes regroupés sous le titre "Lointains intérieurs". On peut le trouver dans la petite collection "Poésie" de " Gallimard, pour un prix modique.

Ces récits sont au nombre de 13, Plume en est le personnage principal. C'est un être marqué par son inadaptation sociale. Les situations auxquelles il est confronté le mettent dans l'embarras.  

Si nous prenons le cas de « Plume au restaurant » et Plume voyage, ou encore Plume a mal aux doigts, on le voit placé dans des situations banales qui deviennent étranges, voir comiques par la façon dont elles sont vécues.

 

Ces situation aboutissent au surnaturel ou débouchent sur le fantastique. «  Dans les appartements de la reine » ou encore  La Nuit des Bulgares.

 

Toutes ces situations montrent le héros désemparé, trop poli( «  un serpent tombé d'un régime de bananes rampa vers lui ; il l'avala par politesse..in « L'hôte d'honneur du Bren club »), courtois, étonné, ou indifférent à l'égard de diverses figures de l'autorité. : la police, le couple royal, un juge, un chef de train, un officier de l'armée, un médecin... une épouse, et même des coutumes barbares établies par une instance dont on ne sait rien. Plume est toujours la victime ; dans le meilleur des cas, il ne comprend tout simplement pas.

Ces rapports de force avec l'autorité évoquent les situations chez Kafka. On l'a dit et c'est à juste titre pour une fois.

Excepté le fait que les héros de Kafka multiplient les hypothèses sur les causes et les conséquences possibles des situations qui les gênent, ainsi que les moyens d'y remédier.

A l'inverse, Plume cogite peu. Dans Plume à Casablanca, cependant, il a l'idée de se livrer à toutes sortes de manœuvres pour se faire bien voir de la police mais  en vain ! On ne saura pas ce qu'on lui reproche. Ce texte-là est effectivement très proche de Kafka. De même que Plume au restaurant : il est accusé d'avoir mangé un plat non spécifié sur la carte : non écrit. Ce peut-être une façon de dire qu'il est hors-la-loi  (si la carte des menus  symbolise un écrit juridique fixant les « choses permises »).

 

Dans « les appartements de la reine », Plume semble avoir une relation sexuelle avec la reine. Il n'est pas sans éprouver quelque chose (« Il touche, il tête avec des doigts peu sûrs, et la recherche des réalités le fait trembler... »), Relation évidemment interdite puisqu'il y a un roi. L'allusion fréquente au «  Danemark » (entretenons-nous du Danemark, sa Majesté aime les Danois) fait penser à Hamlet.  Et dans ce cas, il devra tuer le roi qui entre et l'on sera dans une situation œdipienne, comme dans cette pièce.

Sinon comment interpréter ces références au Danemark et aux Danois ? On peut aussi entendre Danois comme « chien », Plume ne serait qu'un  pauvre chien dans l'affaire.

 

Les récits des mésaventures de Plume n'ont pas l'étoffement propre au romanesque. Il y manque les décors et les portraits de personnages. De Plume lui-même on ne sait rien. Pourquoi voyage-t-il continuellement? Où a-t-t-il rencontré une épouse aussi acariâtre ?

L'histoire se résume à une série de question et de réponses, une série de contraintes... Plume se trouve à l'issue, victime d'une nécessité si inattendue qu'elle lui échappe.

C'est un être agi par un destin absurde.

L'étrange, l'absurde des situations vient du fait que l'auteur a banni de chaque histoire tout contexte. Pourquoi faut-il tuer les bulgares (la nuit des bulgares) ? De quoi est-il coupable au restaurant ?

Que s'est -il passé dans sa maison et de quoi est victime son épouse ? ( Un Homme paisible)

Chaque représentant de l'autorité réclame une réponse mais Plume ne sait rien.

 

La dramaturgie est souvent au rendez-vous avec une somme conséquente de mutilations parfois radicales (mort) : 

-Plume a mal au doigt, on le lui coupe. Il reste optimiste.

-Dans l'Arrachage des têtes (Plume n'y joue aucun rôle, il n'y est pas nommé), il semble que     l'on doive offrir des têtes en offrande à un personnage non nommé, qui les réclame et les   recueille sans manifester approbation ni ressentiment. Ce pourrait être un dieu.  Les têtes ne sont pas l'objet d'une grande considération... pas plus que des fruits ou des têtes de clous.

-Dans la nuit des bulgares, on tue des êtres humains.

-Plume arrive dans un pays habité par des culs-de-jatte.

- Une  femme est  découpée en morceaux (un Homme paisible)

C'est le monde de l'inquiétante étrangeté tel que Freud l'a défini (L'Inquiétante étrangeté et autres texte in Folio-bilingue). Freud  prenait l'exemple de «  l'Homme au sable «, dans quoi le héros craignait une mutilation des yeux.

«  Le véritable intérêt de l' »Unheimliche » dans l'homme au sable, c'est le thème de la castration métaphorisée  là par al crainte de la cécité. (L'Homme aux sables « arrache » les yeux).

 

 

Cependant l'absence de contexte et l'aspect élémentaire de Plume laisse à penser qu'il est peut-être responsable, et exprime aussi l'humour, un humour noir qui pourrait faire rire si ces situations étaient mises en scène.

Plume fait songer à Chaplin. Même si dans le contexte où évolue Charlot les situations sont beaucoup plus classiques il les transforme souvent jusqu'à l'absurde. On a bien ici cette façon de raconter des énormités en gardant  le style du constat ou celui de la relation neutre du fait banal. On peut penser au style de Camus dans l'Etranger.

 

Michaux s'est fortement démarqué du surréalisme mais il en reste proche.

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