Adieu l’ondine je t’aimais bien
On nageait dans les même palais tu sais
On lutinait les mêmes ondins
On se jouait les mêmes drames
Lorsqu’un mortel me prit pour femme.
Adieu l’ondine je vais mourir
C’est rien de périr en hiver, tu sais
Et j’pars au gel sans t’faire de peine
Car vu que tu es une sirène
Un peu d’écume te tient lieu d’âme.
Mais j’veux la cérémonie
J’veux qu’tu boives le thé d’minuit
J’veux qu’ton coeur ne soit pas d’pierre
Quand c’est qu’on m’mettra sous terre.
Adieu l’étranger je t’aimas
Toi la rencontre d’un soir de frimas
Toi qu’était beau comme le silence
Toi qu’était frêle comme l’absence
Toi qu’était un peu maladroit.
Adieu l’étranger j’vais mourir
C’est kühl de mourir en hiver tu sais
Mais j’pars au givre dans l’insouciance
Car j’y sens comme une ambiance
Des froides plaines de la Hanse.
Et j’veux qu’tu sortes faire un tour
Et que tu ne sois pas sourd
J’veux qu’tu sortes des ténèbres
Du côté de Tostes Funèbre.
Adieu l’enchanteur je t’aimais
Adieu l’enchanteur je t’aimais tu sais
Toi qui m’as tenté fait écrire mais
Ma plume est toute ensanglantée
Ma seringue traîne dans l’encrier
Adieu l’enchanteur j’vais mourir
C’est cool de mourir en hiver tu sais
Et j’pars en neige l’âme ravie
Emportée par tes ballades
Tes hymnes et tes litanies
Mais j’veux qu’ tu chantes j’veux qu’ tu brûles
Et que tu franchisses le seuil
J’veux qu’tu chantes j’veux qu’tu brûles
Les planches de mon cercueil.
Adieu collègues j’vous aimais guère
Adieu collègues vous m’étiez allergiques
Vous et vos inspecteurs hostiles
Vos carnets d’notes et vos stencils
Vos bavardages pédagogiques
Adieu collègues je vais mourir
J’vous laisse à vos autocritiques
Je pars au givre, foin de mon âme,
Que j’vends tous les mois neuf mille balles
A l’Education Nationale.
Et j’veux qu’on pense j’veux qu’on prie
Et que tout le monde se mette en deuil
Je veux qu’on pense j’veux qu’on prie
Quand j’aurais tourné de l’œil.
Adieu mes songes j’vous aimais bien
Adieu mes songes adieu mes créatures
Vous qui viviez l’autre aventure
Vous qui étiez plus vrais qu’nature
Puissiez-vous survivre à mon corps
Adieu mes songes je vais mourir
Jamais vous n’m’avez déserté
Et puissiez-vous perdurer
Dans d’autres rêves d’autres pensées
C’est là mon plus cher désir
E j’veux qu’on m’lise une seconde
Et que l’on soit silencieux
J’vaux qu’on m’lise une seconde
Quand j’aurais quitté ce monde.
Adieu mon homme je t’aimais
Adieu les enfants j’vous aimais tellement
Je prends le train pour le néant
Et je fais des économies
Un aller simple cela m’suffit.
Adieu les enfants j’vais mourir
C’est sobre de mourir en hiver voyez
Et je pars pour les neiges d’antan
Rejoindre Laure et Marguerite
Julien Louise et puis Judith
E j’veux qu’on pleure qu’on soupire
Et qu’on plante un grand laurier
J’veux qu’on pleure qu’on transpire
Et qu’on m’couche sur le papier.