1956
Invité à séjourner chez monsieur et madame Stirl, Olivier Lérins débarque un beau matin à Barcos-les-Bains, station climatique du Pays basque.
On n’est pas venu l’attendre à la gare !
Par rapport à son précédent séjour dans leur maison de Savoie, Olivier (peintre de son état) est déçu. La situation a évolué ; l’état de Mr Stirl ( anglais typique, architecte de son état) tuberculeux de longue date, semble avoir empiré ; mais il se tient parfaitement bien et allume toujours sa pipe qu’il ne peut plus fumer. Sa femme, pour qui Olivier nourrit un amour non avoué et apparemment platonique, a beaucoup changé. Elle élève désormais deux gros chiens qui ne la quittent pas et ils se témoignent une affection débordante ; il y a aussi ( oh horreur…) un couple de ouistitis. Par ailleurs cette femme est toujours pleine de vie ( « électrique » pense Olivier) mais elle lui bat froid . Les échanges verbaux sont décevants, hostiles, ou superficiels…
La situation s’envenime, Olivier finit par soupçonner qu’on veut se débarrasser de lui, voire le tuer carrément…
Le lecteur pense que le couple est sous tension, parce que Mr Stirl va mal et que la mort approche. Mais pourquoi ont-ils invité Olivier dans ces conditions, qu’attendent-ils de lui ? Qu’il ne leur donne évidemment pas…
Un huis-clos étouffant, plein de non-dits…une langue soutenue très belle ! description du Pays Basque et d’un Cambo-les bains spécialement mortifère qui ne plaira pas aux autochtones
Cinq filles d'un peu plus de vingt ans dans une petite ville des environs de Roanne. La narratrice, Jess, aide ses parents et sa grand-mère à tenir un hôtel de catégorie modeste qui bat de l'aile. Elle a vécu un an avec Antonio à Lyon et il n'a plus voulu d'elle...
Sa meilleure amie Juliette ( fille des coiffeurs) est un peu trop surperficielle, cherche à devenir mannequin ou actrice et son frère est passé maître dans l'art de chaparder des trucs un peu partout...
Avec trois autres amies ( dont Brousailles qui est employée à la boulangerie,Camille qui aménage un combi Volkswagen pour en faire un salon d'esthétique itinérant, et la dernière ( je ne remets pas son nom) est déjà mariée avec un petit Paul de trois ans.
Les cinq filles vivent de petits boulots et ne sont pas très contentes de leur vie. Voilà qu'un projet naît : pour la fête du printemps elles vont organiser un défilé : il faut se confectionner des vêtements originaux, trouver des musiques pour les présenter, apprendre à marcher...
Juliette a trouvé un emploi partiel de dame de compagnie chez une aristocrate parisienne septuagénaire Mme Barnes. Quelques péripéties plus tard, Juliette doit rester chez elle et demande à Jess de la remplacer provisoirement chez Mme Barnes...on dirait qu'elles ne se déplaisent pas!
Attachant parfois,agaçant quelquefois... agréable dans l'ensemble avec des moments pénibles.
Mais je trouve que le style de Claudie Gallay ces petites phrases à la fois descriptives , tristounettes , et d'une poésie discrète mais réelle, ces petites phrases font mouche.
Petit hôtel dans les Alpes une montagne rebaptisée l’Altefrau, une station thermale en Suisse , V. que je n’arrive pas à identifier avec son pont baroque, son château de S. son eau soufrée son hôtel Majestic…
un abattoir transformé en maison d’habitation, un chien qui mord, les pensionnaires de l’hôtel : Eric et Christine Vasseur ( elle fut danseuse elle n’est plus que femme au foyer surveillée par son mari et déprimée) la narratrice et son Franck de mari qui termine sa thèse interminable ; la patronne qui rêve des Antilles, la serveuse muette et son chignon étrange , le lac ,
l’habitude de regarder ce qui se reflète dans les vitres de toute sorte, ou dans l’eau, notamment d’y observer les gens plutôt que de les regarder en face, et chercher à deviner ceux de leurs mouvements qu’on ne voit pas ; et ce que peuvent signifier leurs expressions,
et le trublion Serge, (un agent du renseignement?) , qui se cache et n’en drague pas moins ces dames...
Beaucoup de citations plutôt bienvenues…une écriture riche comme toujours avec cette auteure, et de l'ambiguité à souhait. J'adore!
Lorsque la narratrice arrive à Hollywood pour y effectuer une recherche biographique sur Buster Keaton, elle ne sait pas encore que son enquête va bifurquer dans une direction très personnelle, réveillant le souvenir d'Henri, ce frère « différent » qui l'a accompagnée pendant toute son enfance.
Quel rapport entre ce garçon dont le développement mental s'est interrompu, et le génie comique qui deviendra l'un des inventeurs du cinéma ?
Henri semble perpétuellement ailleurs. Encombré d'un corps dont il ne sait que faire, il doit subir la rééducation musculaire quotidienne que lui impose son père, et qui ressemble à une suite ininterrompue de tortures.
Joseph Frank Keaton Jr, dit « Buster », naît un siècle plus tôt dans une famille de saltimbanques dont il devient bientôt la vedette, lorsque son père découvre qu'il semble insensible à la douleur.
Henri est le frère du nouveau mari de la mère de la narratrice . IL a onze ans et il est handicapé physique et mental, pas assez pour vivre à l(hosto assez pour vivre en famille , à condition qu'on s'occupe de lui ; il est attachant dans sa différence. Son père l'a elevé à la dure espérant le rendre quasi-normal puis à abandonné la partie...
En parallèle ma narratrice raconte l'histoire de Buster Keaton, le comique triste qui fait des cabrioles sans souffrir apparemment. O n découvre que comme le demi-frère Henri , il a été duremeent traité par son père.
A vrai dire je ne connissais qu'un ou deux films de Keaton et rien sur lui. Le récit m'apprend quelque chose. Et aussi ce qu'est la vie avec un^ proche handicapé ,déconcertant, et attachant...
tout ceci est bien rendu.
S’adresse aux lecteurs qui ont lu, enfants, un certain nombre d’aventures de la série « le Club des Cinq » et s’en souviennent assez bien.
L’auteur imagine le club des cinq se retrouvant quelque quarante ans plus tard (ou moins , cela dépend quand on a cessé de lire leurs aventures …)
François , devenu commissaire de police, est très puritain, il se presse vers le château de Kernach , dans lequel se retrouvaient les cinq en vacances, chez Claude ( la fille qui se faisait passer pour un garçon). Une réunion des "Cinq" devenus adulte est prévue. Sauf le chien Dago, les chiens ne vivent pas trente ou quarante ans...
Claude est devenue scientifique de haut niveau comme son père et vit avec une autre femme ; elle fréquente aussi Jean-Jacques le pêcheur (c’était un personnage récurrent nous dit-on mais je ne m’en souviens pas). Mick est devenu délinquant et il est en couple avec Jo la gitane (je me souviens un peu de Jo mais pour moi ce n’est pas un personnage récurrent). Il y a aussi Pilou ( je n’en ai aucun souvenir) et Annie devenue alcoolique divorcée et nantie d’une fillette …
Cette idée d’avoir transformé ces enfants plutôt bien élevés en losers finis … est plutôt cruelle. Avançant dans le récit on s’aperçoit que les cinq devenus adulte sont hantés, chacun à sa manière, par leur homologues anglais ( le Club des cinq est une traduction des romans d’Enid Blyton « The Famous Five »)
Un retour en arrière nous amène à l’arrêt de la série; les enfants détectives aux prises avec la puberté fut un épisode décisif.
Et maintenant , que va-t-il se passer ?
J'ai trouvé ce récit original mais très très noir!
Me Susane, quarante-deux ans, avocate récemment installée à Bordeaux, reçoit la visite de Gilles Principaux. Elle croit reconnaître en cet homme celui qu’elle a rencontré quand elle avait dix ans, et lui quatorze — mais elle a tout oublié de ce qui s’est réellement passé ce jour-là dans la chambre du jeune garçon. Seule demeure l’évidence éblouissante d’une passion.
Or Gilles Principaux vient voir Me Susane pour qu’elle prenne la défense de sa femme Marlyne, qui a commis un crime atroce…
Qui est, en vérité, Gilles Principaux ?
Bien que le récit soit à la 3 eme personne, il est en focalisation interne, nous ne sortons pas franchement des pensées de Me Susane.
Elle est avocate, chargée de défendre la femme de Gilles Principaux.
Dès que cet homme est entré dans son bureau elle croit le reconnaître : il a changé sa vie l'espace d'un après-midi à l’âge de dix ans, ce qui s’est passé ce jour là elle n’en sait rien , son souvenir globalement flou et précis dans certains détails ( peu éclairants toutefois ) relève du fantasme.
C’était dans « une maison Mauresque « croit se souvenir Mme Susane , sa mère « un Bois lacté » carrément ! le père lui pense que sa fille a passé un mauvais quart d’heure…et ne s'en est jamais remise.
La femme de Principaux a noyé ses trois enfants dans le bain. Pas un seul n’a réussi à s’échapper même l’aîné qui avait six ans. Est-ce qu’elle avait fermé la porte à clé ? me suis-je demandé bêtement, car je me suis imaginé dans la peau de l’enfant qui cherche à sauver sa vie…
et je n’ai pas trop réussi à décoller de cette vision d’horreur. Cette femme, Marlyne, aimait ses enfants et s’en occupait minutieusement, mais « elle aurait préféré ne pas les avoir ». Elle parle de son crime en disant « j’ai posé mon acte » comme si elle devait forcément accomplir cela comme si c’était le destin. Le mari paraît soulagé lui aussi. On devait avoir ces enfants, on devait les tuer, maintenant le pire est arrivé le plus dur est fait… étrange et effrayante famille !
Par ailleurs, Me Susane, (on ne la connaît que sous ce nom bien qu’elle ne soit pas toujours maître ou maîtresse d’elle-même…) s’intéresse à l’avenir de son employée de maison Sharon, venue de l’île Maurice, et sans papiers, dont elle voudrait qu’elle soit régularisée. Elle la paie même si elle ne fait pas le ménage ; les autres employeuses de Sharon sont de méchantes femmes… Me Susane porte à Sharon un intérêt qui va au-delà de ce qu’on attendrait d’une bienfaitrice, et cela gêne la jeune femme.
D’autres personnages font leur apparition, l’ex-compagnon de Me Susane Rudy, et Lila la petite belle fille de Me Susane ; et curieusement Me Susane s’inquiète beaucoup du sort de cette enfant, qu’à vrai dire elle connaît très peu. Elle croit déceler sur son visage son apparence des signes montrant qu’elle est maltraitée (par la méchante mère de Principaux ? qu’elle n’a jamais vue…)
Longtemps après avoir fini la lecture, on ne sait toujours pas quoi penser de ce qu’on a lu. Et pourtant, le talent spécial de Marie N’Diaye fait qu’on imagine très bien les personnages et les situations et qu’on ressent le mal être physique aussi bien que mental, les doutes et les frayeurs de Me Susane. Voire de certains autres personnages… Sans pouvoir en déduire quoi que ce soit…
Le narrateur se souvient de quelques temps ( une année ou deux ?) vécues à Jouy en Josas près de Versailles dans les années 50 ; ses parents ne pouvaient s’en occuper et l’avaient confié à des amies qui occupaient un maison rue du docteur Dordaine . Une maison plutôt grande et qui abrite, entre autres merveilles, la tombe du docteur Guillotin et une auto tamponneuse ; le gamin a une mère actrice en tournée en Afrique du nord ; son père « fait des affaires » du côté de Brazzaville… il fait de temps en temps un apparition et emmène son monde à l’auberge « Robin de bois » ; il paraît aussi que le château tout au bout de la rue, appartient à un certain « Eliot Salter marquis de Caussade » qui y séjourne de temps à autre…
Le narrateur est surnommé « Patoche « par les femmes qui s’occupent d lui et de son petit frère. Ces femmes : la petite Hélène, qui boîte un peu et fur autrefois trapéziste avant son accident. Annie qui travaille au « Carroll’s » un lieu que les enfants n’ont jamais vu mais qu’ils assimilent à un cirque.
Ils voient tous deux leur avenir dans le monde du cirque. La nuit, parfois ils sortent et vont vers le château sans oser aller très loin. Le jour, il leur arrive de se glisser près du moulin à eau dans le bois des Mets ( Metz ?).
La mère d’Annie , Mathilde appelle Patoche « l’Imbécile heureux « elle ne semble pas savoir que c’est une insulte. Ou peut-être que si ? Peut-être n’a-t-elle pas toute sa tête ? Elle fait un peu peur eux deux garçons lorsqu’elle dit « je suis protestante ». Annie a prétendu être la mère de Patoche lorsqu’elle l’a inscrit à l'école. Mais les enseignants sont méfiants : Annie, Hélène, et la baby-sitter qu’il appelle Blanche Neige, brune au teint pâle, ne s’habillent pas comme la plupart de femmes des années 50 : elles portent des blousons de cuir, Hélène une culotte de cheval et des bottes, Annie un blue-jean… Patoche se fait à cet environnement, même s’il trouve cette existence plutôt un peu effrayante.
Le narrateur se transporte également plus tard lorsqu’il écrivait un roman dans une « minuscule chambre mansardée, square de Graisivaudan » (près de la Porte de Champerret à deux pas du Périphérique) . Il y repense à son père, arrêté sous l’Occupation, libéré par un homme qui ensuite l ‘hébergea et lui procura une occupation lucrative ( le Marché noir comme on disait). Son père se cachait doublement parce que juif , commerçant clandestin, et plus tard agent secret au service des allemands . Il semble que les femmes ( et quelques hommes ) qui s’occupèrent du narrateur enfant en l’absence des parents étaient de cette même bande d’ »individus peu recommandables » . Peu recommandables mais sympathiques et faisant tout leur possible pour procurer du bonheur à ces enfants quasi-orphelins.
Dans ses souvenirs, le désir de trouver des points de repère lui fait multiplier les noms de lieux emblématiques, et les prénoms et patronymes de ceux qui se sont occupé de lui et leurs amis.
Ainsi cette liste de noms de garage, parmi lesquels se trouve le point de jonction possible entre « l’endroit où Annie nous emmenait « et celui où travaillait l’homme avec qui son père autrefois faisait du trafic mais aussi l’espère t’il bien d’autres choses.
Un étudiant occupant une minuscule chambre à Paris, ne se rend pas à son examen de sociologie qui doit valider sa licence. A partir de ce manquement à ses obligations, il en vient beaucoup d'autres : il ne fait plus rien; rien qui ait un sens en tout cas.
Il s’adresse à lui-même ou à n’importe qui d’autre, à la deuxième personne du singulier. De ce fait, nous sommes censés nous sentir concernés (davantage qu’avec un je ou un il)
Et se sentir concerné c’est pas évident, car le sujet va abandonner toute préoccupation sociale, s’essayer à l’indifférence, par jeu, curiosité, et manque de conviction soudain pour la vie active voire même la vie routinière ; par dépit de son avenir tout tracé ( travail, famille, patrie en quelque sorte) il reste dans sa chambre sa chambre de bonne d’étudiant, ou chez ses parents , il ferait penser à ces jeunes japonais qui ne veulent plus sortir de chez eux ( les hikikomori).
Est-ce une dépression ou profond ras-le bol, ou une expérience ? Les deux semble-t-il. Il vit sa dépression comme une expérience. Pour ne pas trop en souffrir ?
Dès lors son quotidien sera : l’observation des choses autour de lui, choses usuelles, domestiques , sans intérêt, et répétition de ses observations : la fissure au plafond, la bassine de plastique rose avec les chaussettes dedans, le lavabo du palier qui goutte ( mais pas toutes les secondes…)
-l’arpentage de rues parisiennes, en suivant des itinéraires compliqués ou les promenades dans la campagne ( sous-bois ou chemins de terre) plus monotones encore.
-le refus de tout contact social
- des lectures ou des relectures de livres qu’il connaît déjà par cœur, ou du Journal le Monde, en n’exceptant rien , ne choisissant aucun article. Comme il détaille longuement les différentes rubriques, on se rend compte que le Monde a bien changé depuis 1967 !
Dans une seconde partie cette torpeur qui ne le faisait pas souffrir se met à lui causer de la frayeur.
Dans le miroir brisé où il vérifiait l’intégrité de son image corporelle, il commence à moins s’y reconnaître. Surtout, lorsqu’il traîne au lit, dans un demi-sommeil, en divaguant, dans un état d’autohypnose, ses sensations corporelles commencent à lui jouer des tours. L’appréhension qu’il a de son corps se morcèle ; on dirait que des monstres viennent l’assaillir…. C’est comme un trip, acceptable au début, qui dégénère lentement !
Le sujet va finalement céder à l’anxiété laquelle vire à la panique… et revenir à la vie. Il s’intéresse à son voisin de chambre (l’autre) imagine son existence, se demande s’il l’a déjà croisé. Voit les gens dans la rue, des gens marginaux comme lui, et les perçoit de plus en plus proches.
Il agit aussi sur le plan de la raison : son expérience lui a montré que l’indifférence absolue, d’une part est impossible, d’autre part ne mène à rien de plus que de la déréliction, il revient « à lui » ou « au monde » ? Et recommence à éprouver des sensations, et des sentiments. Le premier sentiment qui s’impose à lui à nouveau, on l’a vu, c’est la peur.
Tu as déjà vécu cela ? Mais pas exactement comme lui… et pas décrit de façon aussi complète, scrupuleuse , intelligente…
Le narrateur 87 ans, sachant son temps compté, a tenu un journal réservé à Lison sa fille, dont il a toujours été proche. Ce sera le Journal de son corps : pas de journal intime, quoique raconter et décrire les ressentis de son corps à sa fille, c’est tout de même dévoiler une sacrée intimité. Mais elle le lira lorsqu’il sera mort, donc elle sera indulgente à son égard, voire contente… en tout cas, il se montre certain de lui faire une surprise plutôt heureuse. D’ailleurs, dit-il, si ce journal devrait être rendu public, je le dédierai aux femmes.
Lectorat féminin attendu. Il s’agit bien d’un journal intime et même du plus intime qui soit. Le narrateur va raconter à sa fille comment il s’est masturbé, comment se déroulent ses relations sexuelles avec certaines femmes, sa mère y compris. Il l’épargne, en racontant une relation avec sa mère irréprochable : coup de foudre partagé, mariage d’amour, entente sexuelle merveilleuse durant plusieurs décennies. Rare… mais possible, pourquoi pas ?
Ce récit est sympathique, malicieux, triste et gai, comme toujours avec Pennac. Un poil trop plaisant, et aussi répétitif, ne retenant que le meilleur, vraisemblable pourtant. Les deuils successifs et les souffrances sont bien là, et les détails aussi. Qu’est-ce qui me fait dire que c’est édulcoré ? Quelque chose d’enfantin dans l’expression. (Pennac est surtout bon lorsqu’il écrit pour les enfants). Un vocabulaire correct et précis, une langue soutenue, familière lorsqu’il le faut, des références littéraires judicieuses. Quelques uns des personnages sont bien rendus : Le père du narrateur, sa chère Violette, son petit fils Grégoire. J’aime bien lorsqu’il parle de ces trois-là, et même de Frédéric l’ami de Grégoire, son dernier médecin traitant.
Un corps : il s’agit du ressenti du narrateur par rapport à son corps ; de réalité plus ou moins fantasmée.
Ensemble qu’on lit très vite, en survolant certains récits.
Ce roman commence par la présentation d’un certain nombre de personnages dont on relate la vie et les préoccupations actuelles. Cette première partie est assez ennuyeuse, les personnages sont convenus : le tueur à gages méticuleux, l’écrivain aux succès très moyens qui vit de traductions et aime une femme bien plus jeune, la femme célibataire qui aime moyennement un type bien plus âgé…
l’intérêt s’éveille un peu avec le ficus desséché, retombe puis revient à cause de la grenouille renaissante d’une petite Sophia ; d’une femme qui découvre que le joli poème composé pour elle, était le recopiage d’une récitation d’écolier péniblement apprise…
Enfin, l’intrigue se met en place : le pilote de l’avion, qu’on avait quitté moribond, va se poser à l’aéroport JFK, mais il est tout de suite dérouté sur une base militaire avec sa cargaison de passagers… nous sommes en juin 2021, et son avion s’est déjà posé avec les mêmes passagers et le même équipage, trois mois plus tôt en mars.
Cette intrigue de personnages dédoublés trois mois plus tard, à cause semble-t-il d’une mystérieuse turbulence qui a violemment secoué l’avion, est bien conduite, et réserve quelques moments désopilants : les mises en place de cellules de crises, les interventions de hauts personnages de l’état, les embrouillaminis des scientifiques, les considérations des religieux, les quiproquos engendrés par les situations, et le suspense bien mené.
On aime aussi quelques phrases bien tournées, des aphorismes (inventés ou non) , des poèmes et des chansons, des pastiches, certains mais pas tous, car il faut reconnaître que « la première fois qu’Adrian avait vu Meredith il l’avait trouvée franchement laide… » c’est un peu lourd.
Ce qui est nettement moins bon c’est la psychologie des personnages ; ils sont peu caractérisés, et leurs conflits amoureux tellement semblables qu’on ne sait plus si l’homme d’âge mûr que Lucie endure c’est André ou Victor, et que l’on préfère qu' Adrian et Meredith parlent de leurs protocoles drôlissimes plutôt que de leurs états d’âme.
Il n’est pas facile de donner un avis tant le récit passe du très bon, voire de l’excellent au franchement plombant !
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Comptes rendus de mes lectures avec des aspects critiques + quelques films de fiction Récits de journées et d'expériences particulières Récits de fiction : nouvelles ; roman à épisodes ; parodies. mail de l'auteur : dominique-jeanne@neuf.fr