Belfond, 332 pages. Néerlandais. Traduction : 2010, d’Isabelle Rosselin.
Paul Lohman narrateur de ce récit, et son épouse, sont invités par le frère aîné Serge, dans un restaurant chic d’Amsterdam, genre le Fouquet’s. Serge fait de la politique, et espère devenir le prochain premier ministre. Mais ce soir, il a réuni tout le monde pour parler des enfants. Michel, le fils de Paul, et ses cousins se sont rendu coupables d’un acte que la justice réprouve.
Paul déteste son frère, il doit le jalouser depuis longtemps. Il est le cadet (il s’appelle Paul ce qui veut dire : petit). « Petit » est un mot qu’il va répéter souvent au début du texte. Il est le petit frère, il est toujours passé en second, ce qu’il fait a toujours été jugé « petit ». Tout ce que fait Serge il le méprise, et le hait.
Voilà qui peut entraîner le lecteur sur une fausse piste. Paul décrit ce restaurant, où l’on fait tant de manières, où tout est si cher, où l’on sert des parts minuscules sous prétexte de gastronomie, où le serveur passe une demi-heure à expliquer comment le plat a été cuisiné et d’où viennent les ingrédients. On peut avoir l’impression que Paul est plus simple et plus honnête que son politicien de frère, tant il met d’application à ridiculiser et dénoncer les travers de cette société prétentieuse.
Et le temps passe sans qu’on parle des enfants. Peu avant de partir au restaurant, Paul a pourtant regardé des vidéos sur le portable de son fils adolescent et en a paru contrarié. On a l’impression qu’il espère que sa femme ne sait rien. Le lecteur sent que nul ne veut aborder le sujet qui fâche.
Petit à petit, on découvre que si Paul est contrarié, ce n’est pas parce que son fils et son neveu se sont rendus coupable d’actes répréhensibles. Bien au contraire ! Lui-même a des pulsions de violence qu’il maîtrise plus ou moins lorsqu’il pense que ça l’arrange ; un psychiatre lui a dit que c’était dans les gènes, et Paul qui n’a aucune morale s’en est trouvé satisfait.
Le récit se déroule pendant le dîner, on alterne les pensées et constatations de Paul, ses flash back sur son propre passé, des communications téléphoniques avec son fils. Chaque chapitre comprend une étape du dîner, mais ce qui est servi au lecteur est de plus en plus… moche, et à la fin il aura peut-être envie de vomir.
En effet, le lecteur est de plus en plus horrifié par les propos de Paul, et les actes de certains des protagonistes, la délinquance en haut lieu, et son impunité...mais à une époque où les agissements de certains mouvements d'extrême droite en Europe inquiètent, ce livre est important. Il va plus loin qu'une simple comédie sociale.
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